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Ces élections sont peut-être les plus importantes de l’histoire moderne du Mexique.
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Andrés Manuel López Obrador, en avril 2018.
REUTERS
Andrés Manuel López Obrador, en avril 2018.

C'est le 1er juillet et Andrés Manuel López Obrador, surnommé AMLO par ses partisans, vient de remporter la victoire haut la main avec plus de 50% des votes, devançant ainsi d'au moins 30% le conservateur Ricardo Anaya, du PAN, arrivé deuxième. Des milliers de personnes unies dans le cri résonnant à l'unisson: «¡Es un honor estar con Obrador!» («C'est un honneur d'être avec Obrador!»). L'euphorie règne au zócalo de Mexico, où toute sorte de slogans se font entendre dans la foule qui fond en larmes, tandis que les leaders du Mouvement de régénération nationale(MORENA) se félicitent les uns les autres dans la joie d'avoir gagné.

Peu après, c'est le moment du discours triomphant: «Je ne vais pas vous trahir. Vous ne serez pas déçus. Je suis tout à fait conscient de ma responsabilité historique (...)», a proféré sobrement depuis l'estrade l'homme de 64 ans. C'est ainsi qu'il s'est dressé en digne successeur de Enrique Pena Nieto.

Seulement 5 minutes après le début du calcul des résultats, il n'y avait pas de doute. Contrairement aux élections historiques de 2006, la fraude électorale n'était plus un scénario possible. En fait, ces élections sont peut-être les plus importantes dans l'histoire moderne du Mexique, même comparées à celles de 2000. Le pays avait en effet vécu pour la première fois l'alternance du pouvoir avec l'arrivée de Vicente Fox, parce que, en conformité avec l'évolution du pays, marquée par l'Indépendance, la Réforme et la Révolution mexicaine, Obrador est bien déterminé à achever la quatrième transformation du Mexique.

En 2006, lors de sa première participation aux présidentielles, une bonne partie de l'électorat avait embrassé la rumeur selon laquelle AMLO était un danger pour le Mexique (slogan de campagne de son opposant Felipe Calderón) puisque, une fois au pouvoir, il établirait une dictature en plongeant le pays dans la misère économique, la violence et la déstabilisation, comme ça a été le cas au Venezuela. Il n'est pas surprenant que les adversaires du «PRIAN» - terme crée ex professo faisant allusion au binôme PRI-PAN, partis qui se sont échangé le pouvoir pendant tout le XXIe siècle - aient eu recours à la même stratégie de peur pendant ce dernier processus électoral.

Chaviste, socialiste, populiste, émissaire de Poutine, Trump à la mexicaine... il ne restait qu'à lui associer à Daech pour couvrir tout le spectre de figures mondialement stigmatisées; mais avec un faible résultat cette fois-là. Après tout, dire que le Mexique deviendra le Venezuela si Obrador est élu n'a pas beaucoup de sens lorsque le pays est déjà au bord du gouffre (insécurité galopante, dévaluation monétaire, présence des cartels par tout le pays, faible croissance économique, etc.).

En tout cas, il est vrai aussi qu'Obrador a fait de grands efforts pour effacer ou au moins réduire l'ensemble des préjugés négatifs que les médias, de même que ses adversaires, se sont chargés de propager autour de sa personne, le décrivant comme un leader radical et autoritaire aux délires messianiques.

Dès le début de sa campagne, il s'est dédié sciemment à intégrer dans son équipe des personnalités clés de la droite ou bien liées aux hommes d'affaires, telles que Tathiana Cloutier ou Alfonso Romo. Il a aussi modéré son discours en réorientant ses positions vers le centre, par exemple par rapport à l'ALENA, afin de ne pas trop inquiéter les investisseurs et paraître beaucoup plus présidentiable. Et cela n'a pas fini avec la campagne électorale.

Président élu déjà, il a commencé dès le premier jour, cinq mois avant l'investiture officielle, à préfigurer ce que sera le nouveau projet de nation.

Président élu déjà, il a commencé dès le premier jour, cinq mois avant l'investiture officielle, à préfigurer ce que sera le nouveau projet de nation, celui auquel plus de 30 millions de personnes ont accordé leur confiance. À peine quelques semaines après les élections, il est clair que son gouvernement ne sera pas celui de Chávez ou de Castro, mais qu'il se rapproche plutôt de Lula, Bachelet ou, au maximum, Correa.

Bien que profondes de par leurs implications, les réformes que son cabinet et lui sont en train de formuler ne peuvent pas être définies réellement de gauche. En réalité, il cherche à créer un programme «interpartis», post-idéologique, rassemblant tous les acteurs politiques et économiques sous le même agenda, par voie de consensus, grâce auquel toutes les classes sociales pourront être bénéficiaires.

Cela inclut notamment la pacification du pays, moyennant la légalisation des drogues et la mise en marche d'un processus d'amnistie auquel des organisations internationales participeraient et même le Pape(!). Y figure aussi la décentralisation des institutions publiques, qui seront relocalisées partout le pays, avec l'idée, d'un côté, de diminuer la surpopulation dont souffre la capitale et, de l'autre, d'améliorer la distribution de la richesse et le développement, spécialement au sud du pays.

L'augmentation progressive du salaire minimum aura son importance, pour le rapprocher de la moyenne de l'OCDE et reconstruire le tissu social.

L'augmentation progressive du salaire minimum aura toute son importance, pour le rapprocher le plus possible de la moyenne de l'OCDE, une condition sine qua non pour reconstruire le tissu social et en finir une fois pour toutes avec la délinquance régnante; l'instauration d'une austérité républicaine, cherchant finir avec les rémunérations onéreuses, ainsi que les privilèges excessifs dont certains fonctionnaires jouissent et qui sont tout à fait discordants si on les compare aux revenus des gens qu'ils sont censés représenter.

Comme il est possible de le constater, les promesses faites par le candidat AMLO ont été fort nombreuses, du moins, autant que les besoins urgents des Mexicains qui attendent impatiemment le président AMLO. Sur ses épaules, il porte l'espoir de tout un peuple, avide d'un président honnête, humble, proche des gens, mais surtout qui donne de bons résultats, qui transforme vraiment la vie des gens.

Seul le temps dira si Obrador sera à la hauteur des attentes qu'il a lui-même suscitées, mais il est indéniable que jusqu'à maintenant, il prend de l'avance sur son agenda en faisant dès maintenant tous les préparatifs nécessaires à une présidence couronnée d'un succès sans précédent. Il sera assermenté le 1er décembre.

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