Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Pourquoi j'ai décidé d'éduquer mes fils comme des filles

Dites à votre fils qu'il sera un père merveilleux. Dites à votre fille qu'elle fera un très bon patron. Nous devons accepter de nous sentir gênés quand nos enfants refusent les pressions sociétales, même si les autres se moquent d'eux.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Gloria Steinem a récemment posté sa liste de Noël sur internet. C'est une liste fantastique, dont l'un des objets a résonné chez la mère de trois garçons que je suis.

«Je me réjouis que nous commencions à donner à nos filles la même éducation qu'à nos garçons. Mais rien ne fonctionnera tant que nous n'éduquerons pas nos fils comme nos filles.»

Les attentes sociétales imposées à nos filles sont loin d'être parfaites. On attend des femmes qu'elles soient belles, gentilles et jamais - au grand jamais - autoritaires. Cependant, de l'eau a coulé sous les ponts depuis les années 1950, quand les seules aspirations convenables pour une femme étaient de se marier et de fonder une famille.

J'ai été élevée dans l'idée que je pouvais devenir tout ce que je désirais. On m'a encouragée à nourrir de grands rêves, même dans les univers traditionnellement patriarcaux de la loi et de la politique.

Il n'en va pas de même pour les garçons à notre époque.

On leur enseigne en effet que certains rêves ne sont pas envisageables. On leur apprend de mille et une façons qu'ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent, tant que ce ne sont pas des trucs de filles.

Amos adore le vernis à ongles, mais il n'en porte plus parce que d'autres (des enfants et des adultes) lui ont dit que c'était pour les filles. Griffin adorait Mon petit poney jusqu'à ce qu'on lui fasse comprendre que ce dessin animé s'adressait à ses petites camarades. J'entends CONSTAMMENT des gens cultivés me dire qu'ils ne laisseraient jamais leur fils porter telle chemise ou participer à telle activité sous prétexte que c'est un «truc de fille».

C'est-à-dire quelque chose de nul, de non désirable, de méprisable.

Cette attitude est préjudiciable, non seulement pour les petits garçons à qui l'on dit à demi-mot que ce qu'ils aiment n'est pas acceptable, mais aussi pour les petites filles qui s'entendent dire que ce qu'elles sont et ce qui leur fait plaisir ne sont pas assez bien pour les garçons.

Il y a peu, j'ai entendu Anne-Marie Slaughter, de l'émission Why Women Can't Have It All Fame sur la station Freakonomics, dont le point de vue sur la question sonnait tout à fait juste:

En regardant mes deux fils, je me suis dit que si j'avais eu des filles, nous les aurions élevées d'une manière radicalement différente de ce que ma mère avait vécu, et moi aussi, d'ailleurs (même si mon père, qui était très progressiste, m'a poussée à faire carrière).

Pour mes fils, en revanche, je me suis dit que je les élevais à peu près de la même manière que mon père avait été éduqué. Enfin, disons que nous leur apprenons à endosser un rôle plus actif quand ils seront pères. Mon père n'a jamais changé une couche. Mon mari, des centaines. Et j'en attends autant de mes fils.

Pourtant, nous transmettons toujours aux hommes l'idée que leur valeur dans la société se réduit à leur fonction de gagne-pain, c'est-à-dire à la quantité d'argent qu'ils gagnent et à leur position sociale. Voilà qui pose de sacrées limites. C'est le revers de la médaille du discours dispensé aux femmes de la génération de ma mère, dont la valeur dépendait de leur capacité à se marier et à faire des enfants.

Ce que je veux dire, c'est que nous devrions tous avoir le choix de faire l'un ou l'autre. En tant que femme, je veux pouvoir me battre pour être la meilleure, faire carrière. Ça, c'est génial. Mais je ne veux en aucun cas que cela se fasse au détriment de mon rôle de mère, d'épouse, de sœur et de fille.

Alors je dis aujourd'hui à mes fils que s'ils sont vraiment pour la parité, s'ils se marient un jour et qu'ils pensent aider leur conjoint(e) à faire carrière, ils devront endosser le rôle de parent principal pendant que l'autre s'occupera de gagner de l'argent pour deux. C'est ce qui s'est passé dans notre mariage. Mes enfants comprennent parfaitement que je n'aurais jamais pu faire une telle carrière sans Andy.

Et c'est pour cela que je dis aux hommes: si vous croyez à l'égalité des sexes, vous ne pouvez pas vous contenter de dire que vous y croyez, accepter toutes les promotions, mais refuser de déménager si votre conjoint(e) obtient une promotion.

Quand on dit aux garçons que les «trucs de filles» ne sont pas pour eux, on ne limite pas simplement les jouets auxquels ils ont accès, mais le chemin qui mène à la découverte de leur identité et au bonheur.

Nous devons apprendre à nos garçons que le fait d'éduquer des enfants et de s'occuper d'un nourrisson a autant de valeur que l'ambition et l'argent du ménage. Nous devons leur faire comprendre que le seul choix qui compte vraiment est celui qui leur permettra de s'épanouir.

C'est difficile. Difficile de désapprendre ce qu'on nous a appris, de remettre en question nos propres choix et de se demander si nous aurions pu emprunter un chemin différent. C'est difficile, car l'éducation des enfants est aussi un miroir sur nous-mêmes.

Mais il nous faut tenter le coup. Laissez votre fils se mettre du vernis. Laissez votre fille se couper les cheveux courts. Dites à votre fils qu'il sera un père merveilleux. Dites à votre fille qu'elle fera un très bon patron. Nous devons accepter de nous sentir gênés quand nos enfants refusent les pressions sociétales, même si les autres se moquent d'eux.

On me dit souvent que j'expose mes enfants aux quolibets. Tout d'abord, je n'ai jamais rencontré une seule personne qui ait échappé pendant sa jeunesse à la cruauté de ses camarades. Je préfère leur apprendre à gérer ces quolibets plutôt que de les éviter à tout prix. Ensuite, je ne veux pas qu'ils aient l'impression qu'ils doivent changer d'attitude en fonction de l'avis des autres.

Dans une récente interview, Gloria Steinem déclarait: «J'espère que nous adapterons un jour la société à l'individu et non l'inverse, mais nous faisons tous partie de cette société et nous essayons tous de trouver nos propres solutions. Voilà pourquoi nous devons nous entraider.»

Voilà ce que je mets sur ma liste de vœux: pour moi, pour tous et, SURTOUT, pour mes garçons.

J'aime mes fils, j'aime tout ce qui fait d'eux des personnes uniques.

Personne ne les empêchera d'être qui ils sont vraiment. Ni de faire des «trucs de filles».

Ce blog, publié à l'origine sur le Huffington Post américain, a été traduit par Mathilde Montier pour Fast for Word.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.