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Mobilité et urbanisme: l’incompétence légitime des partis

Il serait inconséquent d’investir massivement pour développer tant les routes que les transports collectifs et espérer un transfert significatif vers les transports collectifs.
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Il faut s'en réjouir: les transports collectifs sont désormais incontournables. Le hic, c'est que tous les partis ont, à différents degrés, tendance à se substituer aux véritables planificateurs.
Hyungwon Kang / Reuters
Il faut s'en réjouir: les transports collectifs sont désormais incontournables. Le hic, c'est que tous les partis ont, à différents degrés, tendance à se substituer aux véritables planificateurs.

On en demande beaucoup aux politiciens, notamment de «régler les problèmes de congestion» dans les couronnes de Montréal et de Québec. Bien sûr, il faut offrir des alternatives et atténuer la circulation automobile, mais l'expérience démontre que la congestion est là pour de bon.

Depuis longtemps, les partis politiques tentent de gagner des comtés en promettant des routes. Les voilà maintenant chacun équipé d'une boîte de Crayola de 24 couleurs qu'ils utilisent pour tracer au meilleur de leur capacité de nouvelles lignes de transport collectif.

Il faut s'en réjouir; les transports collectifs sont désormais incontournables. Le hic, c'est que tous les partis ont à différents degrés tendance à se substituer aux véritables planificateurs.

À cet égard, les critiques de François Legault envers l'Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) ont de quoi inquiéter. Malheureusement, le favoritisme accable aussi dans les projets de transport en commun, comme on le constate ailleurs au Canada. Il faut chérir l'ARTM qui vient d'être instaurée notamment pour éviter l'arbitraire et baser le choix des projets sur des données probantes.

Le vrai rôle des politiciens: établir des priorités

Dans nos villes, une nette majorité de citoyens se déplacent en automobile. C'est normal, depuis les années 1960, le mode de développement urbain a systématiquement favorisé ce mode de transport.

Certains politiciens répètent ad nauseam qu'il ne faut pas opposer le développement du réseau autoroutier et dans les couronnes au développement des transports collectifs. Ils ont tort, on ne peut pas tout faire en même temps. Il faut établir des priorités budgétaires.

Le rôle des élus, c'est de proposer une vision cohérente à la population et débloquer les fonds en fonction des objectifs identifiés. Il serait inconséquent d'investir massivement pour développer tant les routes que les transports collectifs et espérer un transfert significatif vers les transports collectifs.

Aberrations électorales

Une des plus grandes aberrations entendues lors de cette campagne, c'est l'idée selon laquelle les 100 milliards$ inscrits au Plan québécois des infrastructures (PQI) offriraient une marge de manoeuvre suffisante pour promettre d'énormes projets comme un 3e lien à Québec, sans faire de sacrifices.

Les routes, les écoles, les hôpitaux nécessitent des investissements majeurs pour être remis en état. En transport routier, par exemple, 81% des 20 milliards $ planifiés sont prévus pour l'entretien des infrastructures. Ça demeure insuffisant.

Difficile de concevoir comment la CAQ arriverait à respecter ses engagements alors qu'elle s'engage coûte que coûte à commencer la construction du 3e lien et à lancer d'autres projets autoroutiers dans les couronnes, tout en construisant un réseau de transport collectif structurant à Québec et un tramway dans l'est de Montréal. Probable qu'un gouvernement caquiste serait contraint à laisser tomber certains projets actuellement prévus, question de dégager une marge.

Gardons en tête que les fonds investis dans de nouveaux projets autoroutiers en banlieue ne servent pas à l'entretien des routes. À cet égard, la position de Québec solidaire peut sembler radicale, mais m'apparaît justifiable: mettre fin à l'augmentation de la capacité routière «sauf pour des enjeux de sécurité [assurons-nous toutefois qu'elles soient bien réelles] ou pour désenclaver des régions isolées».

Le déni de l'évidence

En entrevue la semaine passée au journal Métro, François Legault a déclaré qu'il n'était «pas d'accord avec ces études» qui démontrent que les élargissements autoroutiers résultent systématiquement en davantage de congestion parce qu'ils causent de l'étalement urbain.

Voilà qu'un aspirant au poste de premier ministre nie la science sans même tenter de fournir une contre-expertise. C'est grave.

Espérons que les propos du chef de la CAQ ont dépassé sa pensée. Il pourrait au moins nuancer, dire qu'un élargissement d'autoroute fonctionnera uniquement s'il est dédié aux transports collectifs, conjugué à un contrôle strict de l'urbanisation et à des mesures de tarification routière. Mais on est loin de là.

Le lien entre augmentation de la capacité routière, étalement urbain et congestion a également été nommé dans la Politique de mobilité durable déposée par le gouvernement ce printemps. Cette Politique met d'ailleurs l'urbanisme au coeur de sa vision. Ses objectifs ambitieux ne pourront être atteints que si la croissance urbaine se fait à proximité des axes de transports collectifs.

La démonstration est effectivement faite que l'étalement urbain contribue puissamment à alourdir le bilan carbone des ménages. C'est pourquoi le premier ministre Philippe Couillard a soulevé l'ire de nombreux environnementalistes et de quelques élus municipaux lorsqu'il a proposé de réviser la Loi sur la protection du territoire agricole «pour donner de l'oxygène aux municipalités qui veulent poursuivre leur expansion» le 14 septembre au Sommet organisé par l'UMQ.

François Legault a d'ailleurs fait une déclaration similaire au mois d'août, affirmant «qu'il fallait entamer des discussions avec l'Union des producteurs agricoles (UPA) dans le but de raisonner la Commission de protection du territoire agricole du Québec afin de les inciter à changer leur position au sujet de l'expansion urbaine sur les terres arables du Québec».

De l'espoir pour la mobilité et l'urbanisme

Un débat organisé par l'Ordre des urbanistes, l'Ordre des architectes et l'Alliance ARIANE devait avoir lieu la semaine dernière entre les quatre partis politiques sur l'avenir de l'aménagement du territoire et de l'architecture.

En raison du refus du PLQ d'envoyer un candidat et du désistement à peine quelques heures à l'avance du porte-parole de la CAQ, l'échange a davantage pris la forme d'une discussion entre les représentants du Parti Québécois et de Québec solidaire, Sylvain Gaudreault et Pierre Dostie. La qualité des réflexions des deux candidats a plu à l'audience.

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Il est tout de même permis d'espérer. Trois des quatre partis (le PQ, la CAQ et QS) se sont clairement montrés favorables à une Politique nationale d'aménagement du territoire qui devrait selon moi être un grand projet transpartisan pour la prochaine législature.

Voilà même que la ministre libérale Isabelle Melançon a déclaré il y a quelques jours que son parti est «loin d'être contre». Très bien!

Ça m'a fait penser à la chanson de Jean-Pierre Ferland reprise par Hubert Lenoir: Si on s'y mettait!

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