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Intégration des immigrants: les francophones n'aident pas

Les francophones souhaitent que les immigrants s'intègrent davantage - ce qui est une demande légitime -, mais ils doivent aussi les aider à le faire plutôt que de les laisser à eux-mêmes.
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L'immigration au Québec est un enjeu délicat, complexe, mais surtout très important. Nous sommes parmi les nations qui en accueillent le plus. Si nous devions en être fiers, il faut néanmoins s'assurer d'avoir les structures d'intégration nécessaire, ce qui est loin d'être le cas actuellement.

Le Québec reçoit annuellement entre 50 000 et 55 000 immigrants. Cela semble énorme, mais il ne faut pas oublier qu'environ 25% décident de repartir après quelque temps. Parmi ceux qui arrivent, 58.6% déclarent connaître le français, et après plusieurs années d'installation, environ 80% réussissent à s'exprimer dans notre langue.

Au niveau de l'apprentissage, les immigrants font assez bonne figure malgré qu'il y a encore un 20% - environ 200 000 allophones - qui ne peuvent toujours pas s'exprimer en français après plusieurs années.

C'est bien que la grande majorité des immigrants sachent parler le français, mais il faut aussi que le français reprenne sa place comme langue d'intégration. Avec neuf francophones pour un anglophone au Québec, 90% des immigrants devraient procéder à un transfert linguistique vers le français. En réalité, c'est à peine plus de 50% qui le font. En conséquence, la proportion de francophones au Québec chute malgré l'augmentation du nombre total de Québécois pouvant s'exprimer en français.

L'anglais demeure toutefois la langue la plus attrayante. On ne peut pas leur en vouloir pour autant; pour eux, l'anglais leur procurera le meilleur avenir pour leurs enfants. C'est l'anglais qui leur ouvrira le plus de portes sur le marché du travail.

Malgré la supériorité de la langue anglaise dans le monde des affaires, les francophones ont-ils leur part de responsabilité au fait que les immigrants s'intègrent de façon disproportionnée aux anglophones? En partie, oui.

La première raison concerne les problématiques du marché du travail québécois. En effet, le taux de chômage chez les nouveaux arrivants est à 17.2% et à 11.1% chez l'ensemble des immigrants, comparativement à 7.7% dans l'ensemble du Québec, en 2014. Or, c'est le secteur public qui offre le moins d'opportunités pour les non-francophones, et c'est là où la langue française est le plus utilisée. En conséquence, de nombreux parents choisissent l'éducation anglophone pour leurs enfants puisqu'elle est la langue la plus porteuse dans le secteur privé.

En comparaison, le pourcentage d'allophones utilisant principalement le français au travail en 2011 était à 59% dans le secteur public contre 48% dans le secteur privé. À l'inverse, l'utilisation de l'anglais au travail chez les allophones était 36% dans le secteur privé contre 29% dans le secteur public. Les administrations provinciales (81%) et municipales (76%) demeurent les secteurs d'activités où le français est la langue la plus utilisée, alors que les universités sont les endroits où le français est le moins présent (22%). Nous aurions intérêt à les intégrer davantage dans le secteur public afin qu'ils puissent s'intégrer plus facilement aux francophones.

Mais ce n'est pas seulement pour des raisons économiques que les immigrants s'intègrent de façon importante aux anglophones, c'est aussi pour des raisons sociales. Les anglophones ont généralement tissé davantage de liens envers les allophones que les francophones. Selon le démographe Michel Paillé, 41.4% des mariés anglo-québécois ont épousé un ou une allophone, contre 23.9% des francophones entre 2009 et 2011. Les francophones et les allophones sont divisés par un mur qui donne une impression de «eux contre nous»; il faudra détruire cette barrière.

Il est aussi important à noter que 36.2% des allophones se sentent «très attachés» et 49.3% «plutôt attachés» au Québec. Seulement 13.8% se sentent «peu» ou «pas» attachés. Il y a donc un grand potentiel d'intégration qui est présentement limité pour ces raisons.

Les francophones souhaitent que les immigrants s'intègrent davantage - ce qui est une demande légitime -, mais ils doivent aussi les aider à le faire plutôt que de les laisser à eux-mêmes. Pour y arriver, la société francophone doit être ouverte et accueillante envers les immigrants les encourager à travailler dans les secteurs où le français est la langue de travail.

Sources

» Ministère d'Immigration, Diversité et Inclusion du Québec , 2014

» Michel Paillé (démographe), 2012

» Jack Jedwab, 'L'identité du Québec en 2011: les attachements, l'identité et la diversité', Association d'études canadiennes, 2010

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