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Elle vient, elle repart mon anxiété

Chaque personne qui souffre d'anxiété est différente. On peut avoir des symptômes qui se ressemblent, mais on les vit tous et on les interprète différemment.
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Elle vient, elle repart... J'sais jamais combien de temps elle va rester. C'est comme la visite, sauf que la visite, je peux la sacrer dehors n'importe quand. Pour mon anxiété, c'est pas aussi évident...

Lorsqu'elle me quitte pour des semaines, des mois, voire même des années, j'ai le sentiment d'avoir fait beaucoup de progrès, d'avoir vaincue cette chose terrible qui me crée tant de stress inutile (mon anxiété, pas la visite). C'est une victoire pour moi. Mais aussitôt qu'elle revient, et souvent sans élément déclencheur important, j'ai l'impression d'avoir échoué, d'être revenue au point de départ.

Je croyais être plus forte qu'elle après toutes ces années. Je croyais être en mesure de lui botter l'cul si jamais elle refaisait surface. Eh non... En 2010, elle est revenue, elle a redéfait ses bagages et j'ignorais combien de temps elle allait demeurer cette fois-ci.

Chaque personne qui souffre d'anxiété est différente. On peut avoir des symptômes qui se ressemblent, mais on les vit tous et on les interprète différemment. Par contre, que ce soit un trouble d'anxiété généralisée, un trouble panique, un trouble obsessif compulsif, une phobie spécifique, une phobie sociale ou une agoraphobie, il y a une chose que nous avons tous en commun: la peur.

Il peut s'ajouter à cette peur plusieurs symptômes physiques qui se manifestent en même temps, comme des palpitations cardiaques, des étourdissements, des engourdissements, une sensation d'étouffement, la gorge serrée, des nausées, des maux de tête, des tensions musculaires et la liste continue comme ça. Certaines personnes peuvent ne pas ressentir de symptômes physiques, d'autres oui, un ou deux, ou plusieurs en même temps. Ç'a l'air le fun, hein?

Pour ce qui est de mon anxiété à moi, les symptômes sont sensiblement toujours les mêmes. Par exemple, imagine que tu marches tranquillement, et là, tout d'un coup, un ours apparaît juste devant toi. Un vrai, là! Avec des grandes griffes, des grandes dents et une haleine de cul! Je présume que ta première réaction sera de faire le plus gros sursaut de ta vie. Bien, ce sursaut-là, cette seconde de panique intense-là, je peux la ressentir pendant des heures. Et je ne sais même pas pourquoi! Y'a même pas un putain d'ours, non! Je suis juste chez moi en train de désosser du poulet en jaquette! Je suis loin de mettre ma vie en danger!

Donc, pourquoi j'ai peur tout d'un coup? Je ne sais pas. Et ce sentiment de panique-là, je peux le ressentir n'importe où, n'importe quand, tout bonnement comme ça. À moins que tu sois un(e) de mes proches et que je t'en parle, t'auras aucune idée que je suis en train d'angoisser. Parce que physiquement, ça ne paraît pas. Comme les gens qui souffrent de dépression. Ça ne se voit pas. Je fais quand même ce que j'ai à faire, quotidiennement, sans trop laisser l'anxiété prendre le dessus, même si à quelques reprises ç'a été pas mal plus compliqué.

En 2010, ça faisait plus de deux ans que je me sentais bien. Pas d'angoisse ni d'anxiété majeure. Je n'avais pas recroisé mon ours imaginaire depuis tout ce temps-là. Je croyais être «guérie», yes! Mais non. Un matin du mois d'octobre, je me suis réveillé en panique... (Je déteste l'automne! Aller aux pommes, regarder les feuilles des arbres changer de couleurs et boire le overrated latté à citrouille à huit piasses du Starbucks. Ark! J'haïs ça. Surtout parce que ça me rappelle le réveil brutal de ce mois-là.) Je savais que cette p... d'anxiété était revenue et elle était plus forte que jamais. J'étais incapable de la faire taire. Je pensais mourir, virer folle, perdre le contrôle de mes actions et de mes pensées. Je devais faire quelque chose et vite. Je ne pouvais pas rester chez moi à angoisser de la sorte. J'ai donc décidé d'aller à l'hôpital.

L'hôpital psychiatrique. Hostie, j'avais la chienne! C'est les fous qui vont là! Tout d'un coup qu'ils décident de m'interner, de m'attacher et de faire jouer les grands succès d'Alys Robi! M'a mourir, c'est certain! (J'apprécie toujours mes pensées «rationnelles» dans ces moments-là.) Mais je suis restée, je devais rencontrer un professionnel qui allait m'aider à comprendre LA chose que je n'avais pas saisie sur l'anxiété et qui allait mettre un terme à tout ça.

J'arrive à l'urgence. Ah ciboire! Qu'est ce que je fais ici? Ce n'était pas l'urgence typique, mettons avec des gens qui ont des infarctus, des jambes cassées, pis d'autres qui n'ont pas d'affaires là avec une grippe genre, non. Il y avait une fille en boule qui pleurait accompagnée de sa mère qui tentait de la consoler, un gars qui demandait pourquoi on n'a pas le droit de fumer dans cette hostie de salle d'attente de marde et un autre qui criait: «The Lord of the Rings!! The Lord of the Rings!»

Et y'a moi, qui regardais tout ça en me disant: «Je suis déjà assez angoissée, j'aurais besoin de calme. Voir tous ces gens en détresse, ça me crée encore plus de nervosité, mais je vais tout de même essayer de me détendre en attendant mon tour.»

Pantoute! Je n'ai jamais pensé ça.

Honnêtement, je me disais: «C'est tous des fuckés!! Sortez-moi d'icitte! God! À quoi j'ai pensé? Je ne peux pas rester ici, s'ils décident de me garder, je vais devoir manger leur bouffe! Ouache! Ça me dégueule d'la bouffe d'hôpital. Awww wow! Ils sont beaux les souliers de la madame qui vient de passer. M'en sacre de ses souliers, j'veux m'en aller chez nous!!! Tout d'un coup j'suis bipolaire? Ah non! Ou peut-être schizophrène? Ah non! Ah non! Je ne veux pas commencer à entendre des voix! Tout d'un coup y'a une voix qui me dit de crier qu'on doit ramener le groupe Yelo Molo!? Non! J'ai pas le goût d'être fuckée. Je veux juste être une fille zen qui cuisine des cupcakes en babydoll

Ça ressemblait à ça, mettons.

Quelques minutes plus tard, j'entends mon nom à l'intercom. La honte, tsé! C'est la dernière place où tu veux entendre quelqu'un crier ton nom. C'tait pas comme si je venais de gagner un prix Gémeaux et que j'allais chercher mon prix. C'est peut-être parce que mon prénom n'est pas très familier. Des Robyn, y'en mouille pas au Québec. J'aurais tellement aimé m'appeler Marie «Kekchose» à ce moment-là.

En passant, je dois mentionner que mon époux était là avec moi pour me supporter. Il me disait que tout allait bien aller en tentant de me faire rire avec des jokes poches. En quittant mon siège, il me prend par la main et me demande: «Aimes-tu mieux j'apporte ta brosse à dents électrique ou la normale?» J'ai presque ri.

Après avoir discuté une bonne heure avec la psychiatre sur place, elle a donné son diagnostic; je souffre d'anxiété généralisée, avec quelques épisodes paniques. Elle m'a rassurée, m'a dit que je n'étais pas en psychose, que je n'étais pas en train de virer folle et que j'étais loin d'être la seule. Beaucoup de gens souffrent d'anxiété comme moi. Elle m'a donc conseillé de consulter un spécialiste en troubles anxieux. Ce dont j'ai fait.

Là, tu vas me dire: «Ayoye! Franchement, t'as juste à relaxer, prends une respiration, calme-toé!» Ah ben oui! C'est vrai, t'as ben raison, j'ai juste à me calmer pis relaxer. Je n'ai jamais pensé à ça. Merci du judicieux conseil! Tu crois pas qu'après 20 ans d'anxiété qui vient et qui repart que je ne me suis jamais dit de me calmer, que ça allait passer?! Je sais que les gens qui ne souffrent pas d'anxiété peuvent avoir de la difficulté à saisir ce qu'on ressent, nous, les anxieux. Souvent nos peurs sont irrationnelles, mais elles sont là.

J'ai essayé de tout faire pour m'en débarrasser. Livres sur l'anxiété, tisanes à la camomille, méditation (super facile méditer quand t'as l'impression tu vas crever, d'abord!) yoga et même médication. Mais ce que j'ai appris de mes rencontres avec la médecin spécialiste en troubles anxieux, c'est qu'il n'y a pas de remède miracle. Je n'ai pas découvert LA chose en particulier que je voulais absolument découvrir pour me débarrasser de mon anxiété. Ma nature anxieuse va toujours demeurer, elle fait partie de moi. J'ai réalisé que mon anxiété venait en grande partie de ma peur de mourir (ça, on s'en reparle).

Finalement, j'ai appris que le mieux est d'essayer de la gérer, non pas de la combattre. D'apprendre à vivre à ses côtés, de reconnaître qu'elle est là, mais sans lui laisser prendre toute la place. Ce sont mes réactions par rapport à l'anxiété que je vis dans ces moments-là qui vont déterminer si elle va amplifier ou diminuer. Alors maintenant, lorsque mon «ours» apparaît, je lui fais un high five! Même si, en réalité, j'ai envie de lui sacrer un coup de pic à fondue dans l'œil. J'accepte un peu plus sa présence, car lorsque je ne lui porte pas beaucoup d'attention, il a tendance à quitter plus tôt que prévu. Comme la visite.

Je terminerai en disant quelque chose de très cliché. N'hésite surtout pas à demander de l'aide si tu vis avec de l'anxiété sur une base régulière. Pas à moi là, quand même, j'ai pas mon doctorat en psychologie! Mais il existe beaucoup de groupes d'entraide qui te feront le plus grand bien si c'est le cas.

Là, je m'en vais mettre mon babydoll, j'ai deux douzaines de cupcakes à faire.

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