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Cinq merveilleuses anthologies de 175 pages qui font le tour de la question et qui démontrent hors de tout doute et avec éloquence et brio, la richesse, l'intelligence et la pertinence de ces courtes nouvelles dessinées.
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J'adore les auteurs qui revisitent les grandes mythologies fondatrices de nos sociétés, qui les empoignent à bras-le-corps, les tordent, les déconstruisent, les réinventent et les habillent sous de nouvelles formes.

J'adore ces vieux mythes vêtus de nouveaux habits!

La célébrité est pavée de bonnes intentions

Les eaux paresseuses du vieux Mississippi racontent le soir, quand l'humidité tombe et que l'odeur des magnolias s'estompe, que le jeune Robert Johnson, en mal de reconnaissance et de richesse, aurait signé un pacte avec Satan lui-même. En échange de l'âme du jeune Johnson, le grand fourchu lui aurait offert une guitare possédée qui devait en faire le plus grand guitariste vivant et lui amener argent, célébrité, gloire et femmes. Le vent qui parcourt les grandes plantations mississippiennes renchérit que ce pacte fut signé un soir à minuit à un carrefour routier près de la ferme Dockery.

Eh bien il semble bien que ce bon «ole Mississippi» ait un peu arrangé l'histoire. Certes, il y eut effectivement un pacte signé à un carrefour. Mais ce carrefour n'était pas situé dans l'État du Magnolia, mais plutôt dans un bled perdu de l'Ouest lointain, isolé, poussiéreux et brûlé par le soleil et l'aridité du désert. Et n'en déplaise à Eric Clapton et aux autres grands aficionados et exégètes du blues, ce n'est pas Robert Johnson qui le signa, bien que l'idée soit séduisante, mais plutôt un pauvre chien bâtard, alcoolique, mal embouché et pitoyable du nom de Jug.

Courtoisie

Loin de lui offrir sur un plateau d'argent la célébrité et tous les autres plaisirs de la vie des rock stars, Belzebuth, qui apparait sous la forme d'un fantôme, l'oblige à réussir une série d'épreuves avant de goûter à la gloire méritée. Jug aura donc 100 jours pour prouver qu'il mérite de posséder cette guitare et de devenir le plus grand guitariste de l'histoire.

Bien malin celui qui pourrait prétendre qu'Iris raconte la véritable histoire derrière cette légende fondatrice de la planète Rock, mais il est certain que la vision qu'elle propose dans son Folk en est une relecture irrésistible.

L'auteur amérindien Sherman Alexie l'avait fait auparavant, dans son excellent Reservation Blues — Indian Blues en français — en la déconstruisant et la transposant dans l'univers des Premières Nations. Maia ici, Iris la réinterprète totalement et la bonifie en la situant dans un univers déjanté qui n'est pas sans nous rappeler certains des moments les plus hilarants d'O Brother where art thou des frères Cohen et du Blazing Saddles de Mel Brooks.

Courtoisie

Drôle, imaginative, ingénieuse et truffée de références à la culture «folkie» et au western mythique, la bédé d'Iris est un petit bijou. Un moment d'humour bien réussi qui nous donne envie d'écouter les chansons fictives qui accompagnent les pérégrinations de Jug. Des chansons qui auraient pu être issues des nombreux enregistrements que le grand ethnomusicologue Alan Lomax a collectés toute sa vie dans les campagnes les plus profondes de l'Amérique.

Une relecture de Robert Johnson, sans prétention, tout en bonne humeur et en plaisir.

Parlez-moi d'horreur, redites-moi des choses horribles

Puisqu'on parle de relecture de légendes ancestrales, il ne faut pas passer sous silence le travail exceptionnel de revue Tales from the Crypt. De 1950 à 1955, cette revue indépendante de bande dessinée, qui inspira fortement le film Creep Showde George Romero, explora les mythes traditionnels et modernes de l'horreur, quelques fois avec respect, d'autres fois avec impertinence, mais toujours avec humour et plaisir.

Avec le résultat que ses 30 numéros ont donné à ces mythes, qui commençaient à sentir le renfermé, le premier coup de balai bienfaiteur nécessaire pour leur permettre de retrouver leur pertinence. Une tâche que la génération suivante, celle des Stephen King et autres Clive Barker, continuera avec enthousiasme.

«Tales from the Crypt», Tome 1.
Courtoisie
«Tales from the Crypt», Tome 1.

Que ce soit les loups-garous, les vampires, les créatures de l'espace, les sorcières, les zombies, les savants fous et les autres goules et succubes, tout ce qui errait sans but dans les couloirs mal éclairés et glauques de l'enfer occidental a fait un jour ou l'autre l'objet d'une histoire par la géniale équipe de la revue éditée par EC Comics.

Et si l'expérience n'a duré que pendant 30 numéros, six par année, elle a eu une influence indéniable sur la littérature d'horreur, de science-fiction et policière américaine. Une influence aussi importante que celle des pulp magazines du début du siècle dernier.

Depuis quelques années la maison d'édition Akileos s'est attelée à republier sous forme d'anthologie ces 36 numéros. Certes, d'autres maisons d'édition l'avaient déjà fait en partie. Mais jamais en totalité et encore moins en suivant la chronologie des parutions et à partir des planches originales. Cinq merveilleuses anthologies de 175 pages qui font le tour de la question et qui démontrent hors de tout doute et avec éloquence et brio, la richesse, l'intelligence et la pertinence de ces courtes nouvelles dessinées.

Cinq tomes essentiels, dont le tout dernier qui vient d'arriver en librairie clôt admirablement bien l'événement Tales from the Crypt.

«Tales from the Crypt», Tome 5.
Courtoisie
«Tales from the Crypt», Tome 5.

Et, en prime pour le lecteur, l'opus final contient l'histoire qui me hante depuis ma prime jeunesse. Celle du criminel qui avait assassiné son associé au point de rencontre des frontières du Colorado, du Nouveau-Mexique, de l'Arizona et de l'Utah.

Tout un casse-tête pour la justice, quel État est responsable de faire appliquer la justice? Un plan machiavélique d'une intelligence perverse. Le crime parfait? Je vous laisse, ainsi qu'a notre ami Daniel Marois, le plaisir de décider.

- Iris, Folk épisode 1, La Pastèque.

- Tales from the Crypt, tome 5, Akileos.

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