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Peru, le nouveau visage du zombie

Le bédéiste pourrait bien se retrouver sur la liste de ceux qui ont repoussé les limites du mort-vivant.
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Parmi les personnages qui titillent le plus l'imagination, Nostradamus occupe assurément une place de choix. Le bonhomme fascine autant pour sa vie que pour ses fameuses prophéties, qui continuent, elles, à nous intriguer. Un véritable héros de roman, aussi bien à sa place dans le roman fantastique que dans le thriller vaguement ésotérique, qui évolue au cœur d'une période charnière de l'Histoire où la science et les technologies se confrontent à l'obscurantisme religieux et populaire. Un personnage à la démesure d'un siècle sur le point de bouleverser toutes les conventions et les croyances qui régulaient jusqu'alors la vie des Occidentaux.

Le lyon ieune le vieux surmontera, en champ bellique par singulier duelle

XVIe siècle, Salon-de-Crau, France. Nostradamus, vieux et usé, reçoit un coffret orné des effigies d'un chat et d'un hibou. Pâle, l'apothicaire semble avoir aperçu dans cette boîte une réminiscence d'un passé qu'il tente d'occulter depuis toujours. Encore sous le choc de ce présent, Michel de Nostredame apprend que trois de ses disciples, Arthus, Angulus et Angélique, envoyés en mission en Europe, sont disparus. Et si ces deux événements étaient liés ?

Premier tome auréolé de commentaires dithyrambiques de Marini, créateur du célèbre Scorpion, d'une série qui devrait s'imposer comme LA série d'aventure des prochaines années, Les anges de Nostradamus nous souffle littéralement. Il faut avouer qu'elle comporte tous les éléments d'une grande bédé : un graphisme exceptionnel, un scénario intelligent aux nombreux rebondissements, truffé de personnages mystérieux aux motivations secrètes.

Comme les grands feuilletonistes du XIXe siècle, Raule, le créateur de l'excellent Jazz Maynard, concocte la recette parfaite pour un grand thriller ésotérique, combinant avec le savoir d'un alchimiste les différents éléments qui permettent de créer une quête irrésistible, de celles qui frappent l'imagination, qui séduisent et qui ne s'oublient pas, y saupoudrant de l'aventure, des duels, une foule en colère, des mécréants tordus, des héros sympathiques un brin cabotins, un climat d'hystérie collective, du mystère, de l'occulte et un secret caché.

Impossible de résister à son histoire qui coule de source et nous garde sur le bout de notre chaise.

Mais, curieusement, si le scénario est excellent, c'est avant tout le dessin de Landa qui impressionne. Le dessinateur espagnol, absent du marché européen de la bande dessinée ces 20 dernières années, fait ici un retour fracassant. Le genre d'entrée qui coupe le souffle et qui donne envie lire ses autres créations. De la première page, où on voit le devin en proie à de violentes visions futuristes, dont celle de ce petit Allemand à la curieuse moustache, jusqu'à la dernière, Landa propose un dessin somptueux vivant, rythmé, élégant et nuancé, de véritables petits tableaux qui, pourtant, ne lorgnent jamais vers l'esbroufe.

Au contraire, Landa est complètement au service de son scénariste. Chaque trait, chaque mouvement, chaque décor jouent un rôle essentiel dans le récit et lui fait gagner une force et une efficacité qu'un autre dessinateur n'aurait peut-être pas été capable de traduire. Raule trouve en Landa le compère parfait pour illustrer l'intelligence et les grandes qualités de son scénario.

Vivement la suite...

L'avenir meurt avant le passé

Si Raute se glisse avec brio dans l'aventure, le cape et d'épée et le feuilleton à la Dumas, que dire d'Olivier Peru ? Celui qui est déjà reconnu pour sa connaissance du zombie s'attèle maintenant à transcender le mythe en l'adaptant à ses propres préoccupations. C'est du moins l'impression que j'ai eu à la lecture du 4e tome de sa série Zombies.

Rappelons rapidement l'intrigue, quoique toutes les histoires de zombies se ressemblent. Trente ans se sont écoulés depuis l'arrivée du virus «zombifiant». Les États-Unis n'existent plus. Quelques poignées de survivants immunisés tentent tant bien que mal de survivre non seulement aux mangeurs de cadavres mais aussi aux autres bandes humaines non infectées. Le passé est mort, le futur inexistant et seul le présent compte, un présent qui ressemble plus à une interminable attente de la mort et de l'extinction de l'espèce humaine.

Mais le futur de l'homme se trouve peut-être en Islande, où est regroupée une communauté de scientifiques qui tentent de trouver un remède ? C'est ce qu'espère Clay, leader d'un groupe de survivants bostonnais qui entreprend un long voyage vers l'île volcanique.

Jusque ici rien de nouveau, Robert Kirkman a depuis longtemps foulé les terres que Peru arpente. Mais si y on sent des airs «walkingdeadesques», comme dans toutes les autres productions «zombiesques» d'ailleurs, ce 4e tome de Zombies réussit pour la première fois à se démarquer de la célèbre bédé de Kirkman, Moore et Adlard et de son pendant télévisuel.

Dès l'ouverture de ce nouvel opus, au parfum de Mad Max et de La Route de Cormac McCarthy, le scénariste propose un nouveau zombie devenu la proie des humains affamés. De page en page, le scénariste échafaude l'édifice de cette nouvelle humanité et de ce nouveau mort-vivant qui évolue sans s'en apercevoir. Un nouvel univers plausible et logique qui s'inscrit parfaitement dans le futur possible de l'espèce humaine.

Appuyé par le dessin dynamique et efficace de Cholet et les couleurs de Bastide, Peru métamorphose tranquillement le zombie. Vers où l'amènera-t-il ? Je ne sais pas, mais les dernières pages laissent entrevoir de magnifiques avenues à explorer. Tout comme Romero, Kirkman, Brooks, Wellington et Browne, le bédéiste pourrait bien se retrouver sur la liste de ceux qui ont repoussé ses limites et qui en ont fait une véritable créature de cauchemar, au lieu d'un prétexte à surexploiter la violence et l'hémoglobine.

• Raule, Landa, Arthus Trivium, Tome 1, Les anges de Nostradamus, Dargaud.

• Peru, Cholet, Bastidee, Zombies, Tome 4, Les moutons, Soleil.

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