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C'est reparti comme en 14!

La Deuxième Guerre mondiale a alimenté énormément de scénarios de bandes dessinées. La confrontation entre les forces de l'axe et les forces alliées représente presque un genre spécifique. Ce n'est pas le cas pour la Première Guerre mondiale qui reste un théâtre moins utilisé par les bédéistes.
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Le 28 juin, l'Occident commémorera le centième anniversaire de l'assassinat à Sarajevo de l'archiduc François-Ferdinand, héritier de la couronne austro-hongroise, par un anarchiste nationaliste serbe Gavrilo Princip. Ce triste événement, qui mènera à une guerre totale, changea à jamais le visage de la planète. À l'occasion de la diffusion le 5 mai prochain de la série Apocalypse la première guerre mondialesur TV5, j'ai décidé de consacrer cette chronique à cette grande boucherie.

La guerre selon Tardi

La Deuxième Guerre mondiale a alimenté énormément de scénarios de bandes dessinées. La confrontation entre les forces de l'axe et les forces alliées représente presque un genre spécifique. Ce n'est pas le cas pour la Première Guerre mondiale qui reste un théâtre moins utilisé par les bédéistes.

Mais que la der des ders soit populaire ou non, un de plus grands bédéistes de l'histoire, Jacques Tardi en a fait un de ses sujets de prédilection.

En cette année commémorative, Casterman a eu la brillante idée de réunir en un seul volume les deux tomes de Putain de guerre!, la chronique sur la Première Guerre mondiale que Jacques Tardi et l'historien, spécialiste de ce conflit, Jean-Pierre Verney ont publié en 2008 et en 2009.

Regard critique et chirurgical, Putain de guerre!, est presque un récit anthropologique, celui d'un ouvrier parisien envoyé au casse-pipe, comme beaucoup de ses camarades, par des généraux incompétents, nostalgiques des soldats de plomb de leur enfance, qui rêvaient de gloire et de prestige. Le résultat est à couper le souffle, une grande œuvre qui laisse pantois.

À partir des réflexions du narrateur et sans avoir recours aux bulles et aux phylactères, Tardi construit un récit efficace et révoltant, un plaidoyer pour la paix et pour le dialogue, un émouvant réquisitoire contre la guerre. Avec l'aide d'une habile utilisation de la couleur - plus le conflit avance, plus les couleurs laissent la place à des teintes monochromes empreintes de grisaille, de froideur, d'isolement et de désespoir - Tardi traduit la lassitude, la peur et l'incompréhension qui tenaillent les entrailles des poilus face à l'ennemi, face à leur état-major, face à leurs alliés, face à une situation inextricable qui pourrit à mesure que le temps file et face à Dieu lui-même. «Chacun pour soi et Dieu contre tous », écrit le bédéiste.

Loin d'être une bédé héroïque où les protagonistes courent sous une pluie de balles et de grenades, Putain de guerre! explore la vie quotidienne des poilus. Chaque case devient un instantané de ces soldats français, jouets d'un affrontement entre nations impérialistes pour le contrôle des richesses du monde.

Une œuvre dérangeante, déstabilisante qui rappelle une fois de plus toute l'importance de la démarche de Tardi. En utilisant cette commémoration pour nous rappeler les erreurs d'un passé qui ne cesse de garder son actualité, le bédéiste qui nous avait ébloui avec C'était dans la guerre des tranchées et Moi, René Tardi, prisonnier de guerre au Stalag 11B prouve encore une fois toute sa pertinence. Une œuvre incontournable, du grand Tardi!

La guerre selon Clarke et Costello

Dans la foulée de la présentation de la série Apocalypse, consacrée à la Première Guerre mondiale, Flammarion vient tout juste de lancer deux bouquins complémentaires à la série qui nous racontent cette guerre.

Isabelle Clarke et Daniel Costello les deux auteurs, scénaristes et réalisateurs de la série et des bouquins proposent une démarche qui n'est pas sans rappeler celle de Tardi. Tout comme le bédéiste, les deux auteurs se consacrent à une vision plus humaine de la guerre. Au contraire des froides analyses historiques, Apocalypse transpire l'émotion. Grâce à une habile utilisation de témoignages et de photos évocatrices, Costello et Clarke racontent la guerre à partir des mots (et des maux) de ceux qui l'ont véritablement vécue... dans les campagnes, dans les villes, dans les tranchées et sur les différents champs de bataille. Ici pas question de politiciens, d'autorités civiles et militaires, exit les généraux et les premiers de rang, ici la parole revient aux soldats qu'ils soient poilus ou des autres armées.

Le résultat est une vision plus intime de ce conflit, une vision à hauteur d'homme, loin d'une vision habituelle, désincarnée, vaguement virtuelle et totalement hollywoodienne. Une vision qui pue la mort, la souffrance, la sueur, le désespoir, la peur et les pleurs. Parce que la guerre c'est surtout ça.

Un témoignage important pour ne jamais oublier.

Pour oublier un peu ce triste anniversaire, pourquoi ne pas se plonger dans le superbe univers de Guillaume Perreault qui vient de publier Cumulus chez Mécanique Générale. Teinté de poésie douce-amère, Cumulus raconte l'amitié entre un jeune garçon et un nuage. Une bande dessinée d'une grande sensibilité qui fait vibrer une corde sensible, parce que nous avons tous eu un ami inanimé, qu'il soit jouet, arbre ou nuage. Une belle surprise.

Tardi-Verney, Putain de guerre! 1914-1918, Casterman.

Isabelle Clarke, Daniel Costello, Apocalypse, la Première Guerre mondiale tome 1 et 2, Flammarion.

Guillaume Perreault, Cumulus, Mécanique générale.

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