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Alix, l'art de Jacques Martin, redécouverte d'une bande dessinée majeure

On ne peut qu'être impressionné par son intelligence, son dynamisme et sa pertinence graphique et scénaristique.
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Courtoisie

L'histoire est jonchée de triumvirat. Certains très connus ont marqué notre imaginaire occidentale : César, Pompée le Grand et Crassus ou encore Marc-Antoine, Octave et Lépide. D'autres un peu moins, comme celui de Napoléon Bonaparte, d'Emmanuel-Joseph Sieyès et de Roger Ducos qui prend le pouvoir à l'issue du 18 Brumaire. Et certains totalement inconnu. Mais il est clair qu'ils sont au cœur de nos civilisations et de toutes ses sphères. Même la bande dessinée à ses triumvirats, pensons à Tintin, Astérix, Spirou ou encore pourquoi pas Tintin, Astérix et Alix.

Alix l'intrépide

Apprécié des professeurs et des amateurs d'histoire l'Alix de Jacques Martin est un peu relégué dans les oubliettes depuis la mort de son créateur en 2010. Il faut dire que le trait classique au parfum suranné de la bande dessinée des années 50 du bédéiste attire moins l'attention des nouvelles générations de lecteurs de bd.

Pourtant à la lumière du superbe Alix, l'art de Jacques Martin, ouvrage essentiel paru lors de l'exposition que lui consacrait en début d'année le Festival internationale de la bande dessinée d'Angoulême, on ne peut qu'être impressionné par son intelligence, son dynamisme et sa pertinence graphique et scénaristique.

Grâce au travail rigoureux des collaborateurs qui ont scruté sa vie et son travail sous toutes ses coutures, c'est toute une modernité insoupçonnée qui se déploie devant nos yeux incrédules qui à force de le lire avaient perdu de vue toute la richesse qu'il insufflait à ses histoires.

Truffées d'anecdotes captivantes, Alix, l'art de Jacques Martin propose une analyse aussi fascinante qu'irrésistible de ses années de bandes dessinées.

De ses prises de bec avec Edgar P. Jacobs à ses relations tendues avec les historiens et archéologues français, les politiciens grecs – la Grèce des Colonels a refusé de publier Le dernier Spartiate considérant que l'album montrait une vision négative de la civilisation hellénique – ou le gouvernement français – qui interdit la publication de La griffe noire pour haine et incitation à la violence. Certains bien-pensants y voyaient des allusions à certains officiers français très actifs durant le conflit algérien – Alix, l'art de Jacques Martin est une exceptionnelle monographie d'où ressort toute la richesse d'une série qui est beaucoup plus qu'un témoignage sympathique de la bande dessinée d'antan.

Les gaugau... les gaugau... les gaugau!

De Alix nous passons à Astérix. Définitivement les Gaulois ont la cote aujourd'hui. Mais attention pas n'importe quel Astérix, non, non, celui du Québec, à la fois semblable et différent du Astérix de l'hexagone. C'est qu'ici il faut le reconnaitre Astérix a pris au fil du temps un véritable phénomène identitaire. Sûrement à cause de notre position géographique, une poignée de francophones résistants dans une océan d'anglophones.

C'est cet Astérix qu'analyse le père de Gargouille Tristan Demers dans son excellent Astérix chez les Québécois: un Gaulois en Amérique. Comme il l'avait fait il y a quelques années pour Tintin, Demers décortique toutes les facettes du phénomène.

Et tout comme dans sa monographie consacrée au reporter à la houppe, Demers présente un ouvrage passionnant, magnifiquement illustré, qui met à contribution avec succès témoignages évocateurs, anecdotes savoureuses et exemples évocateurs. Grâce à son œil aiguisé Tristan Demers explore l'importance du petit Gaulois dans notre psyché nationale sous toutes ses déclinaisons des plus éclatantes au plus anodines.

Avec un enthousiasme communicatif et une plume rythmée et dynamique, Demers suit les traces de nos Gaulois adorés comme un reporter qui aurait décidé de couvrir l'étape québécoise du fameux tour de Gaule.

Un bouquin réjouissant qui nous donne envie de relire les albums et de revoir les films des Gaulois et ça tombe bien puisque Ciné-Cadeau n'est pas encore terminé.

Cherchez la femme

On termine notre triumvirat avec Tintin et la question des femmes grâce à une plaquette intéressante de Renaud Nattiez publiée aux éditions Sepia.

Petite étude d'une soixantaine de pages, le bouquin de Nattiez veut faire le point sur les accusations de misogynie souvent accolées à l'univers hergéen. Explorant avec discernement l'œuvre du maître, l'auteur nous amène sur deux nouvelles pistes beaucoup plus riches que le sempiternelle débat sur la misogynie de Tintin : l'absence du couple et de famille traditionnelle et la place importante des orphelins.

Deux filons innovateurs plein de potentiels qui apportent un nouvel éclairage sur le reporter. Une nouvelle vision de Tintin beaucoup plus motivante que cet éternel débat qui ne convainc personne tant les positions des différents camps sont connues et la question déjà jugée depuis très longtemps.

Stephane Beaujean et al, Alix, l'art de Jacques Martin, Casterman.

Tristan Demers, Astérix chez les Québécois, un Gaulois en Amérique, Hurtubise.

Renaud Natiez, Les femmes dans le monde de Tintin, Sepia.

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