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L’héritage durable de l’ancien député William F. Shaw

Son objectif n’a jamais été d’encourager l’unilinguisme des anglophones: il privilégiait un bilinguisme personnel et parlait bien mieux français que la plupart des anglophones.
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Un service commémoratif sera célébré pour un ancien député de l’Assemblée nationale du Québec, William (Bill) F. Shaw, dont l’élection personnelle a coïncidé avec la première montée au pouvoir du Parti québécois en 1976.
AOL/Laurette Vachon-Shaw
Un service commémoratif sera célébré pour un ancien député de l’Assemblée nationale du Québec, William (Bill) F. Shaw, dont l’élection personnelle a coïncidé avec la première montée au pouvoir du Parti québécois en 1976.

Le 22 septembre, à l'Église unie de Cedar Park, à Pointe-Claire, un service commémoratif sera célébré pour un ancien député de l'Assemblée nationale du Québec, William (Bill) F. Shaw, dont l'élection personnelle a coïncidé avec la première montée au pouvoir du Parti québécois en 1976. Ceux d'entre nous, les anglophones, assez âgés pour se souvenir de cet événement capital se rappelleront cette époque de préoccupations qu'a vécue notre communauté.

Toutefois, au moment où j'écris ces lignes, je ne souhaite pas faire l'impasse sur la joie et la fierté liées à leur héritage qui semblaient revenues chez mes homologues francophones. Je ne souhaite pas non plus minimiser les objectifs énoncés par un autre ministre sous le gouvernement péquiste, Camille Laurin, qui souhaitait guérir le sentiment d'«incomplétude» et d'«identité fissurée» par sa loi sur la langue de 1977, la Charte de la langue française, la Loi 101.

Néanmoins, ce rétablissement de fierté qui aurait dû être célébré par tous les Québécois comprenait aussi sa part de tragique. Une tempête s'était abattue sur les anglophones, même si ce n'en était pas l'objectif. Nombreux sont ceux qui ont vécu des séparations familiales causées par l'émigration de nos amis et familles. Ceux qui ont fait le choix de rester ont parfois été victimes de discrimination sur le plan professionnel.

Un peu d'histoire

Se plier à la nouvelle loi sur la langue du PQ représentait tout un défi idéologique. Élu dans la circonscription de Jacques Cartier, à l'ouest de l'Île, M. Shaw a ensuite quitté l'Union nationale pour cofonder le Parti de la Liberté de choix.

La proposition selon laquelle la langue des affaires devrait être décidée selon les marchés libres et non soumise à une réglementation gouvernementale complexe était au cœur de la raison d'être de ce nouveau parti.

La proposition selon laquelle la langue des affaires devrait être décidée selon les marchés libres et non soumise à une réglementation gouvernementale complexe était au cœur de la raison d'être de ce nouveau parti. De plus, les choix éducatifs pour les enfants ne devraient pas être déterminés par l'identité de leurs parents.

Que l'on soit d'accord ou non avec ces arguments, est-ce vraiment une position extrême, dans le cadre d'une réflexion démocratique occidentale? Son objectif n'a jamais été d'encourager l'unilinguisme des anglophones en conservant l'anglais sur les panneaux. Il privilégiait un bilinguisme personnel et d'ailleurs parlait bien mieux français que la moyenne des anglophones. Il s'est d'ailleurs ensuite marié avec une francophone et parlait les deux langues à la maison.

Néanmoins, pensant que cette perspective libertarienne sur la langue était vouée à l'échec avec les nationalistes québécois, de nombreux anglophones autoproclamés «modérés» ont rapidement accepté de sacrifier cette vision de liberté sur l'autel du pragmatisme. Ils ont concédé que certaines restrictions de liberté, visant à accorder aux francophones un sentiment de sécurité culturelle, pouvaient se justifier.

Qu'ils aient réellement adhéré à cette vision ou qu'ils y aient simplement vu un pacte faustien pour des concessions ultérieures, ils ne pouvaient se fier entièrement à cette stratégie (par exemple, il suffit de consulter le rapport Chambers de 1992 ignoré par le gouvernement qui demandait que SEULS les enfants d'immigrants provenant de pays anglophones soient autorisés à étudier dans des écoles anglophones).

C'était comme si une sorte de pensée de groupe à la mode avait envahi la communauté anglophone; or, elle était presque aussi menaçante pour son sentiment d'identité que l'étaient les restrictions législatives qui lui étaient imposées. Leur relation avec le patrimoine, partagé avec le reste du monde anglophone, qui malgré le débat le plus exemplaire, la plus grande diversité de points de vue et la concurrence politique la plus acharnée, semblait être perdue en raison du besoin de s'unir localement. Et c'est encore parce qu'il était en contradiction avec cette toile de fond que l'héritage durable de M. Shaw ne devrait pas être oublié.

Ceux d'entre nous, les anglophones d'aujourd'hui qui, comme M. Shaw sont à contre-courant de la pensée éducative établie, car ils promeuvent ce que le juriste constitutionnel montréalais renommé Julius Grey, décrit comme «la création d'un nouveau système scolaire, accessible à TOUS les Québécois, qui fonctionnerait aux deux tiers en français et en anglais pour le tiers restant», tirent en partie leur inspiration de Bill.

En se présentant à une élection, il ne s'est pas contenté de s'exprimer sur le principe de la liberté de choix de langue en matière de politique publique, il a offert une solution démocratique aux anglophones en apposant son nom sur un bulletin de vote.

Étant un dentiste prospère, il ne s'est pas porté candidat pour l'argent. Toutes ses activités militantes lui prenaient du temps qu'il aurait autrement passé avec sa famille. Ceci ne l'a pas empêché de s'engager.

Si sa forte opposition à la Loi 101 l'a rendu déraisonnable, alors nous devrions peut-être voir le changement politique à la lumière de l'aphorisme de ce polémiste irlandais reconnu, George Bernard Shaw: «L'homme raisonnable s'adapte au monde: l'homme déraisonnable persiste à essayer d'adapter le monde à lui-même. Par conséquent, tous les progrès proviennent de l'homme déraisonnable.»

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