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Régimes de retraite du secteur public: la désinformation se poursuit

Si l'on faisait le débat avec les vrais chiffres, cela serait déjà un bon début, non? Car, pour reprendre une formule bien connue, les chiffres peuvent être aux commentateurs ce que les lampadaires sont aux personnes en état d'ébriété : ils servent parfois plus à s'appuyer aveuglèment qu'à éclairer.
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Il y a deux ans, lorsque la solvabilité des régimes de retraite était sérieusement ébranlée à la suite de la crise financière de 2008-2009 et d'une période de rendements boursiers médiocres, certains chroniqueurs financiers s'en donnaient à cœur joie : « Retraite dorée pour les fonctionnaires », « Fonctionnaire à pension millionnaire », « Les privilégiés du système », etc. Il faut croire que cela fait vendre de la copie (ou augmenter les cotes d'écoute) que de casser du sucre sur le dos des fonctionnaires...

La mode du jour était de remettre en question l'existence des régimes de retraite à prestations déterminées. Ces régimes fournissent pourtant de précieux bénéfices à des centaines de milliers de retraités, mais aussi à la société dans son ensemble. En effet, les personnes qui contribuent toute leur vie à un régime de retraite acquièrent une autonomie financière qui les rendra beaucoup moins dépendants de l'aide de l'État durant leur vieillesse. Ne jetons surtout pas le bébé avec l'eau du bain.

La solvabilité des régimes de retraite à prestations déterminées s'est grandement améliorée depuis deux ans. Par exemple, la caisse des participants du plus important régime du gouvernement du Québec - le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (RREGOP) - a bénéficié d'un rendement net de 13,6 % en 2013. Au 31 décembre 2013, la valeur marchande de cette caisse s'élevait à 49,9 milliards $ et sa valeur actuarielle, à 46,5 milliards $ (avec des gains reportés de 3,4 milliards $). Comme la valeur actuarielle des prestations acquises s'élève à 48,6 milliards $, on en est donc pratiquement arrivé à une capitalisation de 100 % pour la caisse des participants du RREGOP.

La capitalisation de la caisse de l'employeur du RREGOP est aussi en forte progression. Depuis 1994, le gouvernement accumule progressivement des fonds pour assumer sa part de 50 % des obligations de retraite, dans un fonds spécial appelé Fonds d'amortissement des régimes de retraite (FARR). L'an dernier, le gouvernement avait comblé environ les deux tiers de ses obligations. L'argent du FARR est placé à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Précisons enfin que les prestations accordées par ce régime de retraite gouvernemental n'ont rien de pharaonique : la rente annuelle moyenne versée aux retraités du RREGOP a été de 19 027 $ en 2013.

Mais revenons-en à nos moutons. Voilà qu'une certaine litanie se poursuit, cette fois autour des régimes de retraite du secteur municipal. Pas plus tard que le 21 août, un article interpelle avec le titre suivant : « Près de 1 million $ pour vivre comme un retraité municipal ».

Pour en arriver à cette somme, l'article se réfère aux paramètres suivant : un employé municipal moyen, prenant sa retraite à 65 ans avec un salaire en fin de carrière de 50 000 $, et qui touchera 35 000 $ en revenus de retraite, soit 22 540 $ de son régime de retraite et 12 460 $ de son Régime de rentes du Québec. Jusqu'ici, ça va.

Mais l'article induit en erreur quand on y avance que pour s'offrir une rente semblable à celle de cet employé municipal, le Québécois moyen aura besoin d'une épargne totale de 896 000 $. Les 25 500 professionnelles et professionnels que nous représentons ne peuvent être dupés par cette grossière erreur de calcul.

Premièrement, le Québécois moyen aura droit lui aussi à une rente du Régime de rentes du Québec, puisque tout comme l'employé municipal, il y aura contribué durant toute sa vie active.

Deuxièmement, s'il ne dispose pas d'un régime de pension, il devra effectivement avoir épargné une somme importante pour disposer d'une rente annuelle équivalente à celle de l'employé municipal en question (22 540 $). Mais pas 896 000 $, quand même!

On parle plutôt d'une somme d'environ 350 000 $ si l'épargne a été accumulée dans un REER, et d'environ 250 000 $ si l'épargne a été accumulée dans un autre véhicule de placement comme le CELI. Les sommes retirées d'un CELI n'étant pas imposables à leur retrait, le capital requis est moindre pour assurer une rente nette d'impôt équivalente à celle d'un REER ou d'un régime de pension agréé.

Si l'on faisait le débat avec les vrais chiffres, cela serait déjà un bon début, non? Car, pour reprendre une formule bien connue, les chiffres peuvent être aux commentateurs ce que les lampadaires sont aux personnes en état d'ébriété : ils peuvent parfois servir plus à s'appuyer aveuglément qu'à éclairer.

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