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Il est ironique - et révélateur d'une certaine ignorance - que certains «progressistes» considèrent l'opposition à l'État d'Israël comme étant en soi une marque de «progressisme». Une sorte de carte d'accès à un club dont il détiennent les clés. Plus grave encore, il est pour le moins bizarre que de vouloir la disparition d'un pays (ce que veut l'anti-sionisme) soit considéré progressiste.
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Il est ironique - et révélateur d'une certaine ignorance - que certains «progressistes» considèrent l'opposition à l'État d'Israël comme étant en soi une marque de «progressisme». Une sorte de carte d'accès à un club dont il détiennent les clés. Plus grave encore, il est pour le moins bizarre que de vouloir la disparition d'un pays (ce que veut l'anti-sionisme) soit considéré progressiste.

La réception du livre anti-sioniste de Yakov Rabkin, Comprendre l'État d'Israël - avec invitation pour une discussion à sens unique à l'émission phare de Radio-Canada Tout le monde en parle - est un excellent exemple.

Le sionisme: une rebéllion, notamment contre la religion

Le mouvement sioniste (i.e. ceux qui appuient le droit à l'autodétermination du peuple juif dans ses terres ancestrales) a été dès le départ une rébellion, bien insérée dans les mouvements nationaux de l'Europe de l'époque.

Une rébellion contre l'antisémitisme est-européen et russe, contre les pogroms, contre les quotas, contre le racisme.

Et une rébellion contre la société juive traditionnelle du shtetl (petit village pauvre d'Europe de l'Est où vivaient des communautés juives).

Les sionistes, héritiers du mouvement des Lumières, divisés principalement entre libéralisme et socialisme, ont rejeté le joug de la religion traditionnelle, des pouvoirs des rabbins, des obligations cultuelles. Ils étaient, pour la plupart, soit athées ou agnostiques. Pensons à Théodore Herzl, le fondateur du mouvement sioniste moderne, journaliste autrichien, assimilé, libéral qui n'avait rien d'un pratiquant et ne voulait rien savoir de la religion. Ou encore à David Ben Gourion qui fut le premier Premier ministre d'Israël en 1948, un homme pétri de culture juive mais un farouche athée. Soyons honnêtes avec nous-mêmes: aurions-nous, au Québec de l'époque, en 1948, élu un athée au poste de Premier ministre?

C'est ce qui fait qu'aujourd'hui Israël est un phare en matières des droits des femmes. Qu'une femme (Golda Meir) a obtenu le poste de premier ministre 43 ans avant que la même chose ne se produise au Québec. Que les homosexuels y sont libres et protégés. Qu'il s'y déroule annuellement un des plus gros défilés de la Fierté gaie. Que les syndicats - parmi les principaux bâtisseurs de l'État avec le Parti travailliste - y jouent un rôle si important.

Rabkin veut une théocratie

Ce rejet de la religion, cette libre pensée, cette distanciation du judaïsme sont parmi les principales raisons pour lesquelles, dès le début du mouvement sioniste, celui-ci fut combattu par les mouvements les plus traditionnels, les plus orthodoxes, du judaïsme. Pour eux, un État juif doit en effet exister, mais celui-ci doit être théocratique et suivre les préceptes de la Torah.

Ne nous laissons pas leurrer par Rabkin, dont la position est marginale et ultra-minoritaire dans le monde juif (y compris dans la communauté juive pratiquante orthodoxe). Quand Rabkin affirme que: «Pour beaucoup de juifs, l'État israélien détourne les croyants de la Torah», ce qu'il dit, c'est oui à un État juif, si celui-ci est théocratique, si celui-ci est mené par les rabbins - et on ne parle évidemment pas ici des rabbins des mouvements qui ordonnent des femmes rabbins ou qui célèbrent des mariages homosexuels.

C'est du progressisme, cela?

Alors que le Québec fait consensus autour du concept de la laïcité et de la séparation de la religion et de l'Etat (on se chicane sur les détails, par sur le principe), alors qu'Israël est un État libéral et démocratique, Rabkin souhaite un État juif théocratique.

Alors que le droit israélien est la common law, comme pour le Canada anglais, les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres pays anglo-saxons ou dans ce giron, Yakov Rabkin veut qu'un État juif soit régi par la halakhah (loi religieuse juive).

Rabkin, un progressiste comme l'a affirmé Michel Lapierre dans les pages du Devoir du samedi 22 février? Vraiment?

Ce genre de raisonnement est la preuve de l'aveuglement d'un certain progressisme, qui fait de l'opposition à Israël un élément majeur de son identité politique. C'est le même genre de raisonnement qui amène des universitaires américains telles Judith Butler à affirmer que le Hamas et le Hezbollah (qui sont parmi les groupes islamistes les plus violents et radicaux) sont des progressistes!!!

De plus, la paranoïa et l'obsession antisionistes de Rabkin sont telles qu'elles qu'elles l'ont conduit à affirmer que la secte ultra-orthodoxe Lev Tahor connaissait des difficultés non pas à cause des abus vécus par les enfants et les femmes de la secte, mais à cause de l'idéologie anti-sioniste de cette secte extrémiste.

On peut très bien être en désaccord avec les implantations juives dans les territoires acquis en 1967 (c'est mon cas), souhaiter la création d'un État palestinien aux côtés de l'État d'israël (c'est aussi mon cas) sans célébrer la pensée d'un homme qui souhaite la disparition du seul État juif existant - non pas parce que les Juifs n'ont pas droit à un État, mais parce que cet État n'est pas religieux mais doit l'être.

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