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On est encore loin d'une Amérique au-delà des races

Lors de l'élection de Barack Obama au poste de président en 2008, il y a eu ce fantasme général que nous vivions dans une Amérique au-delà des races. Les médias ont mis en avant l'idée que l'activisme pour l'égalité des droits appartenait au passé et que les activistes comme moi étaient obsolètes. Même si cela a fait rire beaucoup d'entre nous, il est important de revenir sur le sujet alors qu'approche le 50e anniversaire de la Marche vers Washington pour le travail et la liberté de Martin Luther King.
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Lors de l'élection de Barack Obama au poste de président en 2008, il y a eu ce fantasme général, relayé par les médias, que nous vivions dans une Amérique au-delà des races. Les médias ont mis en avant l'idée que l'activisme pour l'égalité des droits appartenait au passé et que les activistes comme moi étaient obsolètes. Même si cela a fait rire beaucoup d'entre nous, il est important de revenir sur le sujet alors qu'approche le 50e anniversaire de la Marche vers Washington pour le travail et la liberté de Martin Luther King.

Il est tout aussi important que nous discutions de ces fausses vérités alors que Martin Luther King III, National Action Network et moi préparons une suite à cette marche au mois d'août avec un rassemblement national qui abordera les défis auxquels nous sommes toujours confrontés aujourd'hui. Intitulée "L'Action nationale pour réaliser le rêve", cette marche se déroulera le 24 août dans la capitale du pays, comme il y a 50 ans. Il y a non seulement eu de nombreux problèmes concernant les ethnies durant les presque cinq années d'administration Obama, mais nous sommes aussi face au plus grand revers sur le droit de vote depuis le mouvement pour l'égalité des droits, un chômage toujours aussi élevé chez les Noirs, un tas de défis judiciaires et bien plus encore. Jusqu'à ce que nous mettions fin à ces maux une bonne fois pour toutes, parler d'une Amérique au-delà des races restera une petite phrase pour opportunistes.

De nombreux Américains (y compris moi) sont fiers de voir que la majorité du peuple a élu puis réélu le premier président afro-américain des États-Unis d'Amérique. C'était effectivement un geste symbolique qui montrait que cette superbe nation a fait d'énormes progrès depuis l'esclavage ou la ségrégation. Mais quiconque est déjà monté en avion sait que ce n'est pas parce que les pires turbulences sont passées que l'on est pour autant arrivé à destination.

Malheureusement, de nombreux médias ne prennent pas en considération certaines réalités, car ils aimeraient bien ne pas avoir à se confronter à ces problèmes, mais leur silence peut être perçu comme une complicité avec ceux qui voudraient revenir en arrière. Et quand des personnes comme moi sensibilisent à des sujets cachés sous la surface, nous sommes diabolisées et dépeintes comme si nous avions un intérêt personnel à continuer de se battre pour une protection plus juste de la loi et pour l'égalité des chances.

Je me rappelle très bien du jour où l'avocat Benjamin Crump et les parents de Trayvon Martin m'ont approché pour me demander si je pouvais utiliser le pouvoir de la National Action Network pour attirer l'attention sur le fait que le tueur présumé de leur fils, George Zimmerman, avait été disculpé par la police de Sanford avant même qu'ils n'aient eu le temps d'enterrer leur enfant. J'étais hors de moi lorsque j'ai appris que la police avait libéré Zimmerman la nuit même de l'incident grâce à sa version de l'histoire racontée aux autorités. La police de Sanford a laissé cet homme sortir avant même d'avoir identifié le corps de la victime ou avant même d'avoir pu imaginer un précédent entre Zimmerman et le défunt ou plusieurs autres scénarios. On a dit à Zimmerman qu'il pouvait rentrer chez lui et qu'il reviendrait sur la scène du drame le lendemain pour raconter ce qu'il s'était passé. Les parents de Trayvon, leur avocat et des membres de la communauté étaient furieux et ont affirmé que la police de Sanford ne se serait jamais comportée de la sorte si la victime avait été blanche. Le cœur de leur contestation n'a jamais été que l'action de Zimmerman était basée sur la race, mais plutôt que les actions de la police et la mauvaise gestion de la situation étaient, elles, basées sur la race. Et quand on connait les antécédents de la police de Sanford, leur contestation était fondée.

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Procès Zimmerman: manifestations en réaction à lacquittement

Quand la famille Martin et leur avocat m'ont approché, la National Action Network et moi étions en plein combat sur les conditions de vote. Nous venions de finir la reconstitution des Marches de Selma à Montgomery et nous ne cherchions pas à nous attaquer à de nouveaux projets. Mais après avoir regardé les faits dans cette affaire, j'étais furieux à mon tour. Il est devenu de mon devoir d'attirer l'attention du pays sur cette injustice. Bien évidemment, les critiques se sont élevées en chœur et on a dit que j'ajoutais cette histoire de race dans cette affaire quand ce sont clairement ceux qui ont fait appel à moi qui ont estimé que la race jouait un rôle important dans la façon dont l'affaire avait été gérée dès le début. C'est, après tout, la raison pour laquelle ils se sont adressés à moi, figure du combat pour l'égalité des droits. Et ceux qui disent que je fais cela uniquement pour me faire de la publicité -- même si j'ai déjà une émission télévisée à succès le weekend et une émission de radio nationale six jours sur sept -- ne veulent tout simplement pas prendre au sérieux ceux qui se battent pour la vérité. Ils feraient et diraient n'importe quoi pour ne pas avoir à regarder la vérité en face en ce qui concerne les problèmes liés à l'ethnie en Amérique aujourd'hui.

J'utilise le cas de Zimmerman comme un exemple du déni de beaucoup au sein du gouvernement et des médias sur la discrimination raciale dans l'ère moderne. Soyons bien clairs sur un point: les problèmes ne disparaîtront pas comme par magie en les évitant ou en attaquant ceux qui s'en occupent de front. Cela ne fera qu'empirer jusqu'à ce que le problème soit réglé directement. Comme pour une maladie, ne pas diagnostiquer empêche de guérir. La National Action Network et moi nous sommes toujours battus et continuerons de nous battre pour les droits des immigrés, des femmes et de la communauté LGBT. Et j'espère qu'ils seront à nos côtés pour défendre le rêve de Martin Luther King.

Il n'y a pas si longtemps, le célèbre John Lewis m'a rejoint à la Nouvelle-Orléans et a apporté son soutien à la marche organisée au mois d'août. C'est en tant que dernier membre vivant des Big Six ayant été aux côtés du Dr King il y a 50 ans qu'il a promis de se tenir aux côtés de Martin Luther King III et moi le 24 août prochain. Myrlie Evers, la veuve du grand organisateur de l'égalité des droits Medgar Evers - vicieusement tué il y a 50 ans - a récemment tenu un discours fort sur les progrès de notre société, mais elle a aussi souligné le fait qu'il nous reste encore beaucoup à faire. Je crois en leurs jugements et leurs conseils. Plus que je ne crois en ceux du gouvernement ou des médias qui ne se sont jamais battus pour ce problème et qui espèrent seulement que ces réalités vont disparaître pour qu'ils ne soient pas tenus responsables de leurs actes. Jusqu'à ce que nous, peuple de cette nation, ne faisions plus qu'un dans ce combat pour l'égalité de tous les enfants de Dieu pour qu'ils soient libérés des persécutions, discriminations et des chaînes de l'inégalité, prononcer les mots "une Amérique au-delà des races" ne sera qu'un réconfort pour ceux qui veulent s'avancer. Nous devons travailler pour que cela devienne une réalité, car c'est un rêve que nous devrions tous avoir.

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