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Éducation: une consultation de façade?

Comment le gouvernement peut-il faire une politique de la réussite éducative sans un bilan de la dernière réforme, décriée par tous ? Le ministère transforme le système à la pièce sans une vue d'ensemble. Il refait le programme en histoire, il met sur pied un nouveau programme expérimental pour l'éducation sexuelle, il prépare un nouveau cours en économie et il adopte la loi 105 qui vient modifier la loi sur l'instruction publique.
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Alors que le conseil supérieur de l'éducation (CSE) souligne que notre système d'éducation est inéquitable et que nous risquons d'atteindre un point de rupture, le premier ministre Couillard annonçait, avant même la fin de la consultation nationale sur la réussite éducative, qu'il n'y aura pas de grande réforme en éducation, mais seulement une amélioration. Est-ce que cette consultation visait vraiment à faire le point sur l'éducation au Québec ?

Par ailleurs, dans le document de référence pour la consultation, le ministère de l'Éducation nous présentait une image idyllique de notre réseau. «En 2012-2013 le taux d'obtention d'un diplôme ou d'une qualification du secondaire, que ce soit en formation générale ou en formation professionnelle, était de 94,4 % dans la population québécoise. À cet égard, le Québec est la province la plus performante au Canada, tous âges confondus, ce taux dépassant largement le taux moyen des pays de l'OCDE, qui est de 84,0 %». Le ministère souligne également les résultats obtenus en français, en maths et en sciences, au test international PISA, classant le Québec parmi les premiers de l'OCDE. Est-ce que ces prémisses de départ ne biaisent pas les résultats attendus de la consultation en faisant une analyse déformée de la réalité ?

Cette même année 2013, selon les chiffres du ministère, le taux de décrochage était de 20,8 %, aucune mention de ce fait dans le document de préparation à la consultation. En sciences, le Québec fait piètre figure, il est passé de la 13e à la 24e position pour les derniers résultats disponibles et valides du PISA de 2012, mais le ministère continue à dire que le Québec se classe dans les premiers *. Sans compter que plus de 50 % des québécois sont considérés comme analphabètes fonctionnels. Est-ce que les participants de la consultation ont eu une bonne lecture de la réalité de la part du ministère ?

Comment le gouvernement peut-il faire une politique de la réussite éducative sans un bilan de la dernière réforme, décriée par tous ? Le ministère transforme le système à la pièce sans une vue d'ensemble. Il refait le programme en histoire, il met sur pied un nouveau programme expérimental pour l'éducation sexuelle, il prépare un nouveau cours en économie et il adopte la loi 105 qui vient modifier la loi sur l'instruction publique. Mais il ne veut surtout pas d'une réforme en profondeur, sinon il aurait mis sur pied de véritables états généraux en éducation ou encore mieux comme le proposait Normand Baillargeon une Commission Parent 2.0. Au lieu de cela, le gouvernement a organisé une consultation à la va vite, avec une orientation biaisée, dont les conclusions sont déjà en bonne partie écrites. Pour preuve, avant même la fin de la consultation, alors que c'était un enjeu de débat, les écoles ont reçu une directive du ministère annonçant l'introduction d'un cours en économie financière obligatoire pour tous dès l'an prochain en secondaire cinq !

Le CSE soulignait dans son rapport la surcharge d'élèves en difficultés dans les classes régulières du secteur public. C'est connu le réseau privé draine les meilleurs élèves et prive le réseau public d'une masse critique nécessaire pour favoriser l'équité et la réussite du plus grand nombre. Comment le gouvernement peut-il sincèrement envisager une politique de la réussite éducative sans même questionner le fait que l'État subventionne grassement un réseau privé au détriment de l'école publique ? Alors que les écoles privées reçoivent des subventions additionnelles par exemple pour construire des terrains de soccer intérieur, pour aménager des terrains de football et pour acquérir les dernières technologies numériques, l'école publique n'a même pas les plateaux sportifs nécessaires pour donner les cours d'éducation physique de base à tous les élèves. Comment M.Couillard peut-il parler d'une chance égale de réussir ? Il est clair que le gouvernement a déjà fait son lit en fonction du privé et que pour ce gouvernement la réussite ne passe pas par une école gratuite et publique. Le démantèlement entrepris des CPE par l'augmentation de 1000 % des garderies privées depuis 2007(selon l'IRIS) en est un bon exemple. Durant les dernières années, sous le signe de l'austérité, le gouvernement Couillard a coupé des centaines de millions dans le réseau public de l'éducation, privant de services les plus démunis. Maintenant, le gouvernement se serait découvert une passion pour l'éducation ! Difficile de croire les intentions des libéraux. Ce gouvernement a abandonné l'esprit de la commission Parent et du même coup l'école publique !

* Programme international de l'OCDE pour le suivi des acquis des élèves (PISA). Les faits sont têtus et démontrent que le Québec recule en sciences :

année: 2006 moyenne : 531 position :10

année: 2009 moyenne : 524 position: 14

année: 2012 moyenne : 516 position: 24

Source : résultats canadiens de l'étude PISA de l'OCDE

En 2015, le Québec a obtenu une moyenne de 537 pour remonter à une 5e position. Le hic, comme le rapportait Marco Fortier dans l'édition du Devoir du 7 décembre, c'est que ces résultats sont biaisés du au fait que seulement « 51,7 % des écoles québécoises invitées à prendre part au PISA ont participé au test, ce qui est nettement moins que le taux de réponse de 85% considéré comme la norme par l'OCDE ». Les écoles publiques auraient été sous représentées. Toujours dans Le Devoir, « Le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada (CMEC), qui supervise le PISA au pays, estime que les données du Québec sont fiables malgré le faible taux de réponse de 51,7 %. Les résultats du Québec sont similaires à ceux enregistrés dans des tests comparables en 2006, 2009 et 2012, note une source au CMEC ». On voit que ce n'est vraiment pas le cas avec les résultats compilés ci-haut. La validité de ce test est sérieusement remise en question. D'autant plus que les résultats de juin 2016 à l'examen du ministère de secondaire quatre, en application technologique et scientifique viennent confirmer cette faiblesse en sciences avec un taux de réussite aussi peu élevé que 64%, selon le Journal de Montréal du 23 novembre.

Et que dire de l'examen de fin de cycle en secondaire deux, en science et technologie, à la CSDM où un famélique taux de réussite de 34 % a été atteint. Le ministère devrait se poser des questions sur les programmes et l'évaluation en sciences au lieu de se mettre la tête dans le sable, l'enjeu est trop important.

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Mai 2017

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