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La paralysie est là pour rester

Devant l'incapacité des démocrates et des républicains de s'entendre à Washington sur un plan évitant des réductions dans la croissance des dépenses fédérales la semaine dernière, la question que plusieurs semblent actuellement se poser est la suivante: quand la paralysie cessera-t-elle au sein de l'appareil politique fédéral américain? La réponse est claire: pas de sitôt.
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Devant l'incapacité des démocrates et des républicains de s'entendre à Washington sur un plan évitant des réductions dans la croissance des dépenses fédérales la semaine dernière, la question que plusieurs semblent actuellement se poser est la suivante: quand la paralysie cessera-t-elle au sein de l'appareil politique fédéral américain?

La réponse est claire: pas de sitôt.

En mai dernier, quelque six mois avant l'élection présidentielle de 2012, alors que les médias n'en avaient à peu près que pour le duel opposant Barack Obama à Mitt Romney, j'écrivais au sujet de l'importance de savoir ce qui se produirait au niveau de la gouvernance du pays advenant la victoire de l'un ou l'autre des candidats.

Alors qu'Obama et la majorité républicaine à la Chambre des représentants n'avaient pas produit la moindre législation bipartisane significative au cours des deux années précédentes, je soutenais que rien ne portait à croire que la situation changerait advenant la réélection du président et de ses adversaires au Congrès.

Un an plus tard, on peut affirmer qu'elle n'a effectivement pas changé - et on peut également prédire qu'elle ne changera pas substantiellement, à moins d'un immense revirement, au cours des quatre prochaines années.

Certains diront que cette paralysie est due à la structure constitutionnelle même des États-Unis - contrairement au système parlementaire canadien, le pouvoir y est beaucoup plus fracturé, et ce particulièrement lors d'une période de gouvernement divisé où un parti contrôle la Maison-Blanche et l'autre le Congrès, comme c'est présentement le cas.

Pourtant, l'histoire américaine regorge d'exemples, plusieurs relativement récents, de projets bipartisans importants ayant connu un succès législatif et politique - la refonte de l'aide sociale promue par le président démocrate Bill Clinton et le Congrès républicain au milieu des années 90, ainsi que la réforme du système d'éducation adoptée par le président républicain George W. Bush et le Sénat démocrate au début des années 2000, pour n'en nommer que deux.

Ce n'est donc pas qu'il est impossible pour un président et les membres du parti adverse au Congrès de parvenir à faire aboutir des projets majeurs. C'est davantage que ce président et ce Congrès spécifiquement en ont décidé autrement.

Le raisonnement politique de part et d'autre n'est pas sans fondement. D'un côté, Obama a bâti avec succès une carrière politique nationale (autant comme sénateur que comme président) sans jamais mener à terme le moindre projet bipartisan majeur. Il a bâti sa campagne de réélection en 2012 en faisant explicitement appel d'abord et avant tout à sa base de gauche. Et même en perdant une majorité d'électeurs indépendants (ceux n'étant pas affiliés avec l'un des deux principaux partis politiques), il a été réélu.

De l'autre côté, les républicains sont parvenus à reprendre les rênes du Congrès dans le tsunami de 2010 avec des candidats passionnément anti-Obama au point de le qualifier ouvertement de pire président de l'histoire américaine alors qu'il n'avait pas complété la moitié de son premier mandat. Plus de 90% des républicains à la Chambre proviennent de circonscriptions remportées par Romney au niveau présidentiel en 2012, dans une année où l'électorat était particulièrement favorable aux démocrates. Le risque, pour bon nombre d'entre eux, n'est pas tant d'être puni aux urnes pour avoir refusé de collaborer avec Obama... mais plutôt pour avoir accepté.

Le Washington Post écrivait en fin de semaine dernière que le président avait essentiellement abandonné l'idée de collaborer avec les républicains. Il avait plutôt opté pour tenter de regagner une majorité démocrate à la Chambre des représentants lors des élections de mi-mandat de 2014, question de pouvoir passer son agenda lors des deux dernières années de sa présidence en faisant un minimum de concessions à l'opposition.

Le fait que le porte-parole de la Maison-Blanche ait depuis publiquement démenti les conclusions de l'article a au final peu d'importance - car que ce soit ou non l'objectif du président, il est aujourd'hui extrêmement difficile de concevoir qu'il l'atteigne.

Depuis le début du 20e siècle, trois présidents ont vu leur parti faire des gains lors des élections de mi-mandat - Franklin Delano Roosevelt en 1934, Bill Clinton en 1998 et George W. Bush en 2002. Un seul - Clinton - a connu un tel sort lors du scrutin survenant au milieu de son deuxième mandat. Et un seul - Roosevelt - a vu son parti remporter plus de 10 sièges... alors qu'il en a gagné 14. Les démocrates en ont actuellement besoin de 17 pour reprendre la majorité. Considérant par surcroît le peu de sièges détenus par des républicains en terrain naturellement fertile pour les démocrates, il s'agit d'une commande gigantesque.

Cela ne fait même pas état du Sénat, où les démocrates risquent d'éprouver une certaine difficulté à conserver leur majorité actuelle de six sièges. La route d'Obama, donc, pour retrouver la main dont il jouissait lors des deux premières années de sa présidence, s'annonce excessivement ardue, pour ne pas dire impossible.

Concrètement, cela veut dire qu'il y a fort à parier que le président doive composer avec un Congrès au moins partiellement contrôlé par les républicains jusqu'à ce qu'il quitte ses fonctions en janvier 2017... et qu'avec Barack Obama à la Maison-Blanche et ce caucus républicain à la Chambre, la paralysie est là pour rester.

Les opinions exprimées dans ce blogue sont strictement personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l'Université du Québec à Montréal.

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