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Si le PQ est sérieux dans sa démarche, pourquoi ne pas prendre clairement le parti du gel ou de la baisse des frais en mettant sur la table des propositions alternatives de financement? À son arrivée à la tête du Parti Québécois en 2007, Pauline Marois se disait favorable au dégel des frais de scolarité. Elle était d'ailleurs au ministère de l'Éducation lorsque le PQ avait tenté de mettre en place une hausse au milieu des années 90. Si le passé est garant de l'avenir, les associations étudiantes devraient se méfier. Tout ce verbiage politique ne cadre que dans un seul objectif: consolider la base électorale social-démocrate du PQ en vue des prochaines élections, quitte à tenter de ménager la chèvre et le chou.
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CP

Pauline Marois est de nouveau bien en scelle à la tête du PQ. La contestation a été matée, les éléments les plus réfractaires siègent désormais comme indépendants ou ont rejoint les rangs de la CAQ. Enfin, la possibilité d'une campagne électorale printanière ou automnale a fini de rassembler le caucus péquiste derrière sa chef. Désormais, celle que l'on surnomme la «dame de béton» peut se concentrer à faire «passer son message», comme on dit dans les officines de communication, plutôt que de mettre tous ses efforts à se maintenir en place.

Pauline Marois s'est récemment attaquée au dossier des frais de scolarité en invitant le gouvernement Charest à ouvrir les négociations avec les associations étudiantes. Si elle appuie les revendications des étudiants en grève depuis plus d'un mois maintenant, elle est restée avare de détails quant à ses intentions advenant son élection à la tête du gouvernement. Le flou artistique de la chef péquiste s'est matérialisé dans ces quelques mots : «Nous établirons un mode de financement acceptable pour toutes les parties concernées, y compris, bien sûr, les contribuables.»

De la vertu tactique des sommets

Pauline Marois a affirmé ne pas vouloir trancher la question du maintien ou non d'un gel des frais à leur niveau précédent la hausse actuelle avant d'avoir tenu un sommet réunissant les acteurs du milieu universitaire. Cette idée, qui peut paraître vertueuse et consensuelle de prime abord, pourra cependant s'avérer dangereuse pour la cause des étudiants québécois. Si ces derniers n'ont pu, jusqu'à maintenant, faire bouger de façon significative l'aiguille de l'opinion publique vers leur position à la faveur du plus grand effort de mobilisation étudiante de l'histoire du Québec, nous pouvons raisonnablement nous demander comment ils y parviendront lors d'un sommet restreint, qui se déroulera dans une salle de congrès, loin du bitume des rues, des manifestations et des perturbations publiques. Tout est déjà sous-entendu dans la réponse donnée par Pauline Marois: son futur ministre de l'Éducation siègera en modérateur et en initiateur des débats. Il devrait, par la suite, récupérer et porterle fruit des discussions qui s'y seront tenues à la table du conseil des ministres. L'avantage politique de cette position est évident : faire mine d'appuyer les étudiants dans un moment critique de leur lutte contre le gouvernement Charest tout en se gardant d'adopter une position claire, à défaut d'être audacieuse, sur le sujet. À la suite de ce futur sommet, s'il devait s'avérer que la position des recteurs et des financiers ait gain de cause - et c'est une possibilité réelle - Pauline Marois aura alors le beau jeu de dire qu'elle se range, à contrecœur, derrière l'avis des représentants du milieu. Exit les nobles idéaux des étudiants!

Si l'exercice de la consultation est essentiel à la conduite des affaires de l'État, encore faut-il savoir dans quelle direction le parti au pouvoir veut orienter cette réflexion collective. Le Parti Québécois, par la voix de sa chef et de ses députés, répète ad nauseam (et sur ce point ils ont raison) que les étudiants et les familles de la classe moyenne n'ont pas les moyens d'absorber une nouvelle hausse des frais de scolarité, après les hausses (santé, hydro, SAAQ, etc.) des dernières années. Soit! Si ces derniers n'ont pas les moyens d'assumer une hausse aujourd'hui, pourquoi les auraient-ils dans un an ou deux, sous un éventuel gouvernement péquiste?

Si le PQ est sérieux dans sa démarche, pourquoi ne pas prendre clairement le parti du gel ou de la baisse des frais en mettant sur la table des propositions alternatives de financement? Au moment où l'on ne sait toujours pas si nous payons nos infrastructures publiques à un juste coût et où l'opposition péquiste affirme que nous vendons à rabais nos ressources naturelles,la logique et la cohérence politique commanderaient que la chef de l'opposition regarde de ce côté afin de financer le gel futur des frais de scolarité.Si sommet il devait y avoir, il me semble qu'il devrait plutôt porter sur la place de la recherche fondamentale ou appliquée dans nos universités et sur les grandes orientations de notre réseau pour les vingt prochaines années. Que l'on déleste les dirigeants du système de la mécanique financière et qu'on leur demande de se concentrer sur leur mission essentielle : la transmission et la production du savoir. Au gouvernement, de son côté, de voir comment il peut financer adéquatement le réseau alors que l'on sait que certaines entreprises et que de nombreux citoyens (via l'évasion fiscale) ne paient pas leur «juste part».

Si le passé est garant de l'avenir ...

À son arrivée à la tête du Parti Québécois en 2007, Pauline Marois se disait favorable au dégel des frais de scolarité. Elle était d'ailleurs au ministère de l'Éducation lorsque le PQ avait tenté de mettre en place une hausse au milieu des années 90. Plusieurs membres du caucus actuel, comme les députés de Taillon et de Rousseau, ont récemment tenu pareil discours. Si le passé est garant de l'avenir, les associations étudiantes devraient se méfier. Tout ce verbiage politique ne cadre que dans un seul objectif: consolider la base électorale social-démocrate du PQ en vue des prochaines élections, quitte à tenter de ménager la chèvre et le chou. Ce faisant, Pauline Marois risque peut-être de se mettre à dos cette jeunesse qui est dans les rues et qui attend de la part de ceux qui aspirent au pouvoir une position claire et précise.

Québec solidaire et Option nationale s'opposent non seulement à la hausse, mais proposent la gratuité scolaire tout en détaillant son financement. La CAQ et le Parti libéral favorisent quant à eux une hausse des frais. Ces positions ont l'avantage d'être claires. À Pauline Marois, maintenant, de dissiper le flou artistique et de faire ce que devrait faire toute femme d'État: affirmer ces convictions et ses propositions en tentant de convaincre la population du bien fondé de celles-ci. Chercher à naviguer vers le centre consensuel des sondages d'opinion ne peut que la mener à tourner en rond ...

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