Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Trump-Clinton, la possibilité d'un vote stratégique

La campagne électorale américaine ne s'arrête pas pour autant et l'horreur d'Orlando risque bien de booster Trump, qui n'est pourtant pas un ami des homosexuels, les personnes visées, mais qui est un soutien de la NRA qui bloque toute tentative de limiter l'accès aux armes à feu.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

En ces temps d'horreur et de tueries homophobes revendiquées par Daech en Floride, il peut paraître décalé de s'interroger sur ce qui était le thème médiatique de la semaine passée. La campagne électorale américaine ne s'arrête pas pour autant et l'horreur d'Orlando risque bien de booster Trump, qui n'est pourtant pas un ami des homosexuels, les personnes visées, mais qui est un soutien de la NRA qui bloque toute tentative de limiter l'accès aux armes à feu.

On sait que le camp démocrate n'est pas uni et que le sénateur Sanders a décidé de batailler jusqu'à la convention du parti démocrate en juillet. La question qui se pose est celle de son ralliement à Hillary Clinton et surtout du vote de ses partisans en novembre.

La campagne de Sanders s'est principalement faite sur le thème de l'inégalité et a mis en avant des thèmes qu'il appelait "socialistes", mais qui sont proches soit de la social-démocratie (avant qu'elle ne devienne un parti de droite en Europe) soit du New Deal lancé par Franklin Roosevelt aux États-Unis dans les années 30.

Le succès inattendu de cette campagne tient en grande partie au fait qu'Hillary Clinton est et est perçue comme la candidate de Wall Street pour qui elle fait des discours grassement payés et dont elle refuse de révéler le contenu. Clinton a aussi une longue carrière politique derrière elle durant laquelle elle a soutenu des politiques droitières de son mari (crime bill, démantèlement de l'aide sociale) ou s'est montrée très va-t-en-guerre lorsqu'elle était secrétaire d'État.

La perspective de voir Trump se faire élire devrait convaincre la majorité des soutiens de Sanders de rallier le camp de celle que pourtant ils ne portent pas dans leur cœur. Clinton compte sur ce que l'on qualifie de "moindre mal" (lesser evil) pour bénéficier des voix d'électeurs bien plus à gauche qu'elle. Étant donné qu'elle représente l'establishment depuis des décennies, c'est difficile pour elle, même si Trump est bien le réactionnaire abject, sexiste, raciste, xénophobe et ignare qui est inlassablement décrit dans les médias. Sur la tuerie d'Orlando, les différences entre Trump le xénophobe simpliste proche de la NRA et tous les démocrates, d'Obama à Sanders en passant par Clinton sont patentes, mais est-ce suffisant pour désamorcer la colère des partisans, souvent jeunes de Sanders?

Comme dans les démocraties, qui ont toutes rejoint la "post-démocratie" où les peuples ne choisissent plus grand-chose, mais où la liberté de la presse est garantie, on vote souvent plutôt contre un candidat que pour un ou une candidate qui défend les idées auxquelles on croit on peut penser que Trump en épouvantail absolu sera le garant d'une victoire de Clinton. On voit cependant que la colère de gens déclassés, oubliés et marginalisés est forte et que l'envie de faire péter le système prime sur les considérations rationnelles sur le "moindre mal".

Clinton est elle-même un épouvantail et représente les classes dominantes, abusivement appelées les "élites" qui ont créé le déclassement qui favorise Trump, le Frankenstein des néolibéraux, qu'ils soient républicains ou démocrates.

Élire Trump serait une catastrophe, tant il est réactionnaire et raciste, mais aussi parce que son ignorance implique que l'on ne peut savoir ce qu'il ferait une fois au pouvoir, sinon s'en remettre aux institutions les plus réactionnaires comme la NRA. Voter pour Clinton, pour les Sandernistas convaincus, est l'équivalent de voter pour l'establishment qui a rendu Trump possible et pose donc problème.

Il y a pourtant, dans le système politique américain, une façon de défaire Trump sans donner un blanc-seing à Clinton. Il s'agit du vote stratégique. Comme l'élection est en fait l'addition de 50 élections dans chacun des États, il est possible d'avoir une stratégie électorale que la France n'offre pas. Ainsi, dans certains États l'avance de Clinton et des démocrates est importante, comme à New York et en Californie. Dans ces États, les Sandernistas convaincus pourraient donc choisir de voter pour Jill Stein, la candidate des Verts dont les positions sont beaucoup plus proches de celles de Sanders que de Clinton qu'elle critique vigoureusement.

Jill Stein est une femme et cela permettrait à un électorat progressiste qui a de forts doutes quant au progressisme de Clinton de faire émerger un autre parti plus proche de leurs idées et de donner une plus grande influence politique à une femme, effectivement bien plus à gauche, et honnête que Clinton.

Dans les autres États, comme la Géorgie ou la Floride, soit des États habituellement acquis aux républicains soit des swing states qui passent d'un parti à l'autre, les Sandernistas convaincus pourraient se pincer le nez et voter pour Clinton.

Divers intellectuels recommandent cette démarche qui éviterait le désastre d'une présidence Trump en lançant une relève progressiste. La gauche radicale, qui, pour partie, a émis des doutes quant aux motivations de Sanders, insiste sur le fait que les élections sont un cirque ou une extravaganza (spectacle démesuré) et que les vraies avancées s'obtiennent dans les mouvements de mobilisation, mais elle est aussi effarée par la dérive quasi fasciste de Trump.

Chez les républicains, Trump ne convainc pas tout le monde et même le monde des affaires auquel le milliardaire affabulateur appartient ne l'apprécie pas beaucoup. Charles Koch, l'ennemi acharné d'Obama et des politiques environnementales s'apprête à voter pour Clinton. Celle-ci est également appréciée par Netanyahou qui déteste profondément Obama lequel a pourtant plus fait pour Israël que n'importe quel autre président depuis Truman.

La rhétorique du moindre mal conduit souvent à des impasses, c'est l'équivalent du bonnet blanc et blanc bonnet, mais dans le cas de Trump il est impossible de la rejeter totalement. Sanders pourrait donc participer à la lutte pour défaire Trump et en même temps contribuer à la constitution d'un mouvement, voire à terme d'un autre parti qui serait la vraie opposition de gauche à une Clinton néolibérale, élue mais dans des conditions non triomphales.

Le succès de Sanders deviendrait alors la première étape d'une reconstitution du paysage politique américain et ferait d'une femme, Jill Stein, une figure de proue du nouveau progressisme. Les partisans de Sanders ne sont en général pas sexistes et verraient la promotion d'une femme douée et de gauche d'un bon œil. Donc, mettre du vert entre le bleu (démocrates) et le rouge (républicains) pour que le système politique en voie de toutes les couleurs.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Donald Trump: les grimaces les plus marquantes

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.