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Quand la question nationale saute à la face de l'immigrant

Très vite, dès mon arrivée au Québec, j'ai cherché à m'abreuver d'informations, à comprendre la place et ses gens, à me baigner dans le Québec et sa culture et à le situer dans sa propre histoire et celle du monde. La question nationale est, à dire vrai, quelque chose qui m'a très vite sauté en pleine face.
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Commençons par une clarification. Le terme «immigrant», personnellement, me rebute un peu. Parce qu'il évoque pour moi le verbe immigrer au participe présent, donc une action en cours. Or, pour moi qui vis au Québec depuis près de quatorze ans, comme pour tout autre «immigrant» étant d'ores et déjà un sujet (plus ou moins loyal) de Sa Majesté, le processus d'immigration est chose du passé. Je ne suis plus «en train d'immigrer» et le soulagement d'être passé au travers du dédale administratif de l'immigration fait qu'on est amené à le laisser derrière soi avec plaisir et regarder devant pour avancer. A fortiori si on porte en soi un fort désir de s'intégrer à sa société d'accueil.

Alors, sachez-le, en ce qui me concerne je suis un Québécois de première génération!

Pourquoi le Québec, ça c'est dans le précédent billet. Parlons plutôt de ce qui nous intéresse aujourd'hui, la question nationale.

Une question fondamentale

Très vite, dès mon arrivée au Québec, avec l'esprit allumé que j'avais et la fougue de mes 19 ans, j'ai cherché à m'abreuver d'informations, à comprendre la place et ses gens, à me baigner dans le Québec et sa culture et à le situer dans sa propre histoire et celle du monde. Et très vite j'ai saisi ce qu'il allait m'arriver.

La question nationale est, à dire vrai, quelque chose qui m'a très vite sauté en pleine face. D'ailleurs, l'une des premières anecdotes à saveur politique dont j'ai le souvenir, lors de ma première année au Québec, est cette affaire du « chiffon rouge », provoquée par Bernard Landry, à l'époque vice-premier ministre. Elle donna lieu, je me souviens, à un échange animé autour d'une table, où nos amis québécois s'invectivaient pendant que les étudiants français que nous étions, mes amis fraîchement débarqués et moi, comptions les points. Et, pour les plus téméraires dont j'étais, posaient des questions afin de comprendre l'émotivité évidente qui se dégageait du sujet. Je saisissais progressivement de multiples enjeux : histoire, langue, culture, identité, démocratie, poids politique.

Autant de défis pour un peuple qui se retrouvaient cristallisés au sein d'une question fondamentale: qui sommes-nous?

Le débat, au Québec

Ce fut aussi un de ces moments de grande vérité où je compris la grande difficulté qu'on a couramment au Québec à débattre sereinement et qu'ont certains en particulier à s'appuyer sur un argumentaire construit et solide. Cette difficulté à dialoguer, les idées reçues et les positions campées, bien souvent, enveniment voire annihilent toute possibilité de débat. Tout ça sans compter que les positions tendent à se radicaliser ces dernières années, médias sociaux à l'appui.

Le débat, au Québec, vire malheureusement trop souvent en considérations personnelles et en ego blessés, ce qui empêche généralement le vrai débat de fond, sur les idées, d'avoir lieu. Je me l'explique encore un peu mal, mais je crois qu'il s'agit d'un de ces mélanges étonnants dont le Québec a le secret (comme la poutine!). Il y a ce vieux fond canadien-français, celui de la défaite et de la sujétion, qui fait que les Québécois n'ont pas confiance en eux-mêmes et ont eu l'habitude de se taire et de ne pas faire de vagues, de manquer d'audace, tout en n'en étant parfois révoltés à l'intérieur. Il se mêle à cet individualisme anglo-saxon issu de l'éthique protestante qui caractérise la sphère nord-américaine.

Et puis, au Québec, on est des gens simples, on est entre nous autres, on est « en famille ». Et les réunions de famille donnent parfois lieu à de la chicane. Et personne n'aime les chicanes de famille. Mais parfois, il faut en passer par la case « explications » pour avancer collectivement (c'est ce que mes amis et moi avons expérimenté récemment au sein d'Option nationale, où nous avons de nombreux débats d'idées!).

Ne vous en faites pas; malgré cela, j'aime le Québec dans toute sa complexité! C'est même ce qui le rend si unique et si beau, sa complexité.

Pour ce qui est de la prise de conscience de la question nationale, j'ai cité une anecdote comme j'aurais pu en citer des dizaines d'autres. Quand tu arrives en Outaouais et que naturellement, tu te retrouves avec beaucoup d'amis souverainistes, que tu décèles des clivages marqués par ce que beaucoup de gens de la région eux-mêmes nomment «la frontière» (la rivière des Outaouais); que tu fais le constat de diverses tensions, notamment ethniques, linguistiques, politiques, si tu es quelqu'un d'allumé, de concerné et qui réfléchit et se questionne un tant soit peu, tu sais que tu amorces une réflexion qui va immanquablement t'amener à faire un choix.

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