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Quel avenir pour le caribou forestier?

La foresterie au Québec doit délaisser la perspective du « coupons plus » pour celle du « coupons mieux ». Diversifions donc l'industrie du bois et faisons en sorte de tirer un maximum de profit de chaque mètre cube de bois emprunté à l'habitat du caribou forestier.
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Un important groupe de scientifiques vient tout juste de publier une lettre ouverte remettant un peu d'ordre dans le dossier polémique qui entoure la protection du caribou forestier au Québec. C'est un véritable vent d'air frais, compte tenu des nombreux mythes et faussetés qui ont circulé à ce sujet.

J'aime le caribou pour bien plus de raisons que son allure majestueuse et son beau pelage. En biologie, on le qualifie «d'espèce parapluie». Cet animal a soif de grands espaces, et en le protégeant, nous protégeons de vastes étendues de la forêt boréale, son habitat : l'eau et l'air filtrés, le carbone stocké dans les arbres, etc. Bref, c'est comme un grand frère qui veille sur les autres.

Le caribou a fait l'objet d'une quantité de recherches scientifiques considérables depuis sa désignation d'espèce en péril en 2002.

Malgré cela, certaines interventions laissent entendre que tout va bien pour le caribou ou que nous n'avons pas encore assez d'études à son sujet pour statuer de sa vulnérabilité, ou encore que la protection du caribou va mettre en péril l'industrie forestière.

À ce sujet, Philippe Couillard, alors candidat, a été clair dans sa circonscription de Roberval au Lac-St-Jean, où la polémique est à son comble.

« Nous ne sacrifierons pas un seul emploi forestier au profit du caribou forestier », a-t-il dit pendant la campagne.

Au Saguenay-Lac-St-Jean, les taux de perturbation dans plusieurs secteurs de la forêt boréale exploitée sont supérieurs à 75%. « À ce niveau, le maintien à long terme du caribou dans la forêt boréale est fort peu probable sans geste concret et immédiat visant la restauration de son habitat », peut-on lire dans la lettre cosignée par 26 scientifiques spécialistes du caribou au Québec.

Un plan de match établi

Pourtant, tous les astres sont alignés pour que le Québec devienne un leader dans la protection du caribou et de la forêt boréale.

Nous avons une équipe de rétablissement qui réunit plus de 40 intervenants des ministères des Premières Nations, de l'industrie forestière et des groupes environnementaux.

Cette équipe a produit l'an dernier un deuxième plan de rétablissement pour l'espèce sur le territoire québécois, basé sur plus de 300 études indépendantes.

Nous savons aussi à quel endroit des aires protégées d'environ 1000 km2 - essentielles au maintien du caribou, selon ce même plan de rétablissement - devraient être créées en forêt commerciale.

Le Québec s'est même engagé à créer une ou deux grandes aires protégées de 10 000 km2 pour la protection des espèces menacées comme le caribou d'ici 2015. Et à protéger 12% du territoire avec la même échéance.

Qu'attendons-nous donc?

Le spectre de la perte d'emploi est aussitôt brandi dès l'évocation du mot « caribou ». C'en est devenu une association malsaine. Une hantise. Le caribou est devenu l'ennemi du forestier. La création d'aires protégées nous empêcherait de faire tourner les usines.

La réalité, c'est que nous sommes à la croisée des chemins et que ce discours est dépassé. Avec une vision forestière à aussi court terme, les emplois seront menacés qu'il soit question ou non du caribou.

Nous sommes au XXIe siècle, et les préoccupations quant à notre environnement sont généralisées dans la population. Les clients de l'industrie forestière demandent du bois certifié FSC, qui les assure d'une foresterie respectueuse de l'environnement, des Premières Nations et des espèces menacées.

Or, d'importants certificats FSC ont été suspendus en janvier dernier au Lac-St-Jean et en Ontario, notamment en lien avec le caribou forestier.

Pour moi qui ai grandi à St-Félicien, c'est une double défaite. D'une part, c'est le risque de perdre des hardes de caribous, emblèmes de la forêt boréale. D'autre part, celui de voir l'économie des régions forestières du Québec péricliter parce que nos pratiques n'atteignent pas les meilleurs standards internationaux en la matière.

M. Couillard habite depuis plusieurs années dans la région et est bien placé pour comprendre les enjeux reliés à l'emploi, de par sa fonction de député régional. Il est également en mesure de cerner cet enjeu plus global qu'est celui de la protection de la forêt boréale de par son rôle de premier ministre. Un défi de taille, certes, mais je crois que M. Couillard sera en mesure de trouver le bon équilibre.

Les scientifiques se disent prêts à apporter leur collaboration pour relever ce défi. « Après tout, conclut la lettre, la présence du caribou dans notre forêt boréale sera, pour les générations futures, le reflet d'une exploitation forestière responsable et durable, dont nous pourrons tous être fiers. »

La foresterie au Québec doit délaisser la perspective du « coupons plus » pour celle du « coupons mieux ». Diversifions donc l'industrie du bois et faisons en sorte de tirer un maximum de profit de chaque mètre cube de bois emprunté à l'habitat du caribou forestier.

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