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Il faudra retenir des leçons de cet événement. De vraies leçons. Pas des leçons de rapport tabletté. C'est le système carcéral, qu'il faudra revoir : nombre de personnel, mesures de sécurité internes et externes, financement, espace disponible, transmission des informations, etc.
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Nous connaissons tous l'histoire de la prison d'Orsainville de samedi dernier. Ces trois prisonniers qui s'évadent par hélicoptère à partir de la cour intérieure de la prison. Rappelons-nous que 15 mois auparavant, la même situation s'était produite à la prison de Saint-Jérôme.

Il y a plusieurs raisons de s'indigner devant cette deuxième évasion. C'est tout à fait normal, il y a maintenant trois fugitifs qui sont accusés de meurtre et qui sont en processus de procès qui courent librement dans nos rues!

La première question qui nous vient tous en tête : comment? Comment est-ce que cela a pu se faire aussi facilement? Comment les membres du personnel carcéral n'ont-ils rien vu venir? Comment peut-on ne pas les avoir déjà retrouvés? Comment cette opération a-t-elle pu se réaliser alors qu'il n'y avait visiblement aucun système de sécurité visant à prévenir ce genre d'évasion?

La deuxième question que l'on se pose : qui? Qui sont les complices? Qui était au courant? Et la principale question : qui est responsable de cette situation de crise? À cette dernière question, plusieurs personnes pointent directement la ministre de la Sécurité publique Lise Thériault. Mais est-ce vraiment sa faute? Oui, diront certains, parce qu'elle n'est pas capable de répondre clairement aux questions. Alors, vous me dites que parce qu'elle n'est pas en mesure de répondre à des questions, elle est responsable de ce désastre opérationnel? Certes, elle est la ministre et, moralement, elle est responsable des actes commis sous sa juridiction. Mais dans les faits, soyons réalistes, elle n'a rien à voir. Regardons quelques échelons plus bas.

La ministre ne peut pas tout savoir sur tout. Elle doit se faire briefer sur certains dossiers. Si elle se fait dire n'importe quoi, il y a de forts risques qu'elle dise n'importe quoi en chambre ou aux médias. C'est malheureusement ce qui est arrivé.

« Est-ce que des gens mentent quelque part dans l'appareil ? Certainement. L'enquête [interne lancée par le premier ministre et la ministre de la Sécurité publique] va se pencher sur ça aussi. » - Lise Thériault

Alors, il faut être un peu déconnecté et de mauvaise foi pour demander une démission aussi rapidement, alors que si l'on prend la peine de regarder la situation, la ministre Thériault ne fait que subir les conséquences de mauvaises informations et d'erreurs de communication. Une situation qui, je l'espère, sera probablement corrigée sous peu. Descendons encore quelques échelons.

Suite à l'évasion de la prison de Saint-Jérôme, une enquête interne avait été commandée pour déterminer les causes et trouver des solutions pratiques afin que cela n'arrive plus. Rapport qui n'a jamais été dévoilé publiquement. Quelles en sont les conclusions et les recommandations? Ont-elles été appliquées? Visiblement, soit qu'elles ne sont pas suffisantes ou bien rien n'a été fait puisque le même événement s'est reproduit. Il faudrait rapidement corriger le tir à ce sujet parce que les évasions à la Hollywood, nous aimons que cela reste dans les films. Maintenant, faisons un déplacement parallèle vers un autre ministère.

Je suis maintenant du côté du ministère de la Justice. Certains ont accusé le juge qui préside le procès des trois fugitifs d'avoir favorisé leur évasion en abaissant le niveau de sécurité auquel les détenus avaient droit. Pourtant, jeudi matin, une partie du document de la cour a été dévoilé et nulle part nous n'y voyons une ordonnance de réduire la cote de sécurité. Toutefois, une mesure peut être controversée. En effet, au paragraphe 58 du jugement, on stipule que « pendant les journées où le procès se déroule », les accusés peuvent« avoir accès, ensemble, à des sorties de cour extérieure en soirée, selon les disponibilités du personnel carcéral et des cours extérieurs ».

« C'est le juge qui a fait les recommandations et, de manière générale, quand un juge dit « on va à droite », on va à droite. Les services correctionnels sont tenus d'exécuter ce que le juge a décidé » - Lise Thériault

L'évasion s'est déroulée un samedi, il n'y avait donc pas de procès. Ce n'est donc pas en cause. Toutefois, comment peut-on demander à ce que trois détenus puissent se parler pendant le procès, dehors, le soir? Je répète : les trois, ensemble, dehors, le soir. Suis-je le seul qui trouve que c'est courir après les ennuis? Bien sûr, on spécifie « selon les disponibilités du personnel carcéral », mais si un hélicoptère a pu s'approcher, atterrir et y faire monter trois personnes avant de repartir, il ne devait pas avoir beaucoup de personnel carcéral dans la cour extérieure de «disponibles».

Il faudra retenir des leçons de cet événement. De vraies leçons. Pas des leçons de rapport tabletté. C'est le système carcéral, qu'il faudra revoir : nombre de personnel, mesures de sécurité internes et externes, financement, espace disponible, transmission des informations, etc. Il faut saisir cette occasion pour faire un examen de conscience sur notre système carcéral et prendre des mesures concrètes pour éviter qu'un tel événement ne se reproduise.

Pour répondre à l'ultime question mentionnée plus haut : à qui la faute? Est-ce celle de la ministre Thériault? Des sous-ministres et conseillers? Du directeur de la prison? Du juge? Du personnel carcéral? Non, ce n'est pas la faute à aucune de ces personnes. Parfois, il n'y a pas de responsable et il ne faut pas toujours avoir une tête de Turc. Parfois, ce n'est qu'un ensemble de circonstances qui permettent à une situation de se produire. Il ne faut pas chercher une personne à blâmer, il faut chercher à réduire au maximum les circonstances menant à ces tristes et dangereux événements.

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