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Personne ne mentionne que ce n'est peut-être pas le rôle de l'État, encore moins du palier municipal, de transformer une ville en camp de rééducation à ciel ouvert.
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Ivan-balvan via Getty Images

Voilà que la Ville de Montréal veut se doter « d'agents antirumeurs ». Ces agents, tirés de tous les milieux, seront des personnes, qui, il semblerait, ne s'identifieront peut-être pas (ce qui n'est pas clair) comme des agents de l'État (ce qu'ils seront) pour s'immiscer dans nos conversations quotidiennes, sur la rue, au café du coin, dans nos classes, au travail, aux sports, etc. pour s'assurer de nous éduquer sur les « préjugés envers les immigrants », comme Radio-Canada l'indiquait il y a quelques jours.

Idée saugrenue : et si l'État ne détenait pas la vérité divine ?

Si les informateurs étatistes en venaient à se buter à quelqu'un qui serait informé, instruit, érudit et qui contredirait le discours officiel robotisé, appris par cœur et régurgité sur les mauvais esprits par les fidèles agents gouvernementaux. Alors quoi ? Doit-on s'attendre à des excuses du délateur anonyme et de son employeur, la Ville de Montréal ?

Vont-ils également s'assurer de notre soutien moral envers le Parti ? Avons-nous encore le droit de penser par nous-mêmes sans qu'un agent incognito de l'État vienne jouer au savant endoctriné dans nos vies ? Et qui croit réellement que cela ne sera pas documenté et enregistré dans une base de données gouvernementale ? Croire que le gouvernement s'arrêtera-là, n'abusera pas de ces pouvoirs (c'est déjà fait), est d'une ignorance historique aberrante et dangereuse.

Il faut dire que le reportage de Radio-Canada se rapproche du « fluff piece », alors que l'animatrice, le journaliste et les personnes citées nous présentent le projet comme un remède à une épidémie d'ignorance sans qu'aucun d'entre eux soulève la moindre critique. Personne ne mentionne que ce n'est peut-être pas le rôle de l'État, encore moins du palier municipal, de transformer une ville en camp de rééducation à ciel ouvert par l'entremise de surveillants de conversations.

Il me peine de le dire, mais il devient difficile de différencier Radio-Canada (Radio-Cadenas, comme Pierre Falardeau disait si bien) de La Pravda. Au moins les citoyens russes savaient bien que La Pravda n'était que la presse officielle du Parti et donc qu'il n'y avait rien de vrai dans La Pravda (La Vérité, en Russe).

On en riait en pleurant, on était fataliste par moment, mais au moins les Russes, somme toute, n'étaient pas crédules, ils savaient très bien que la signification réelle du discours officiel était toujours l'inverse, l'opposé de l'intention du message véhiculé par les différents appareils de communications et les différents agents (antirumeurs?) de l'État.

Dans un langage orwellien, on dirait que la guerre, c'est la paix; la liberté, c'est l'esclavage; l'ignorance, c'est la force, et une police de la pensée n'est que des « agents antirumeurs ».

Il n'est pas nécessaire d'avoir obtenu un doctorat en philosophie politique pour comprendre qu'on est déjà enseveli jusqu'au cou dans un cadre idéologique qui, tranquillement, sous le signe de la bienfaisance et des bonnes intentions, nous emporte vers une forme de totalitarisme soft, où l'on se croit libre et où l'on nous fait croire qu'on est libre, mais où, dans les faits, même nos pensées ne sont plus libres d'exister sans que l'État veuille les rectifier.

L'histoire se répète, tout d'abord comme une tragédie, après comme une farce, disait un certain Marx.

Ça fait longtemps que je ne ris plus.

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