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Pourquoi la vidéo des commentaires de Romney lui coûte sa candidature

ÉLECTIONS AMÉRICAINES - Romney nous a déjà fait comprendre qu'il considère les pauvres comme des bons à rien. Ces remarques malsaines aux donateurs en Floride nous indiquent cette fois qu'il considère la classe moyenne de la même manière.
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AFP

La raison pour laquelle le rideau est désormais tombé sur la campagne de Romney n'est pas le ton de ses propos méprisants sur les Américains qui ont des difficultés, lors d'une réunion privée avec des donateurs de sa campagne en Floride. Nous savions déjà que Romney considérait les gens défavorisés comme des losers et des parasites.

La vraie raison qui explique pourquoi cette vidéo achève sa tentative d'accéder à la Maison-Blanche est ce qu'elle nous dit de la façon de Romney d'appréhender la situation de base américaine : il pense qu'il n'y a rien de fondamentalement mauvais dans l'économie, et qu'il y a de nombreuses possibilités lucratives pour qui veut se donner la peine d'y travailler.

Ceci témoigne de sa méprise totale concernant les perspectives qu'un électeur pourrait avoir en allant voter, quel que soit son orientation politique, son âge, son sexe, ses origines ou son idéologie.

Jusqu'à maintenant, la campagne a présenté une division nette dans les propositions des deux candidats, mais pas vraiment dans leur évaluation de la situation. Romney a cherché à faire porter à Obama la responsabilité d'une économie en berne. Obama a répliqué que Romney aggraverait la situation. Mais les deux partageaient jusque là un même constat de départ : que les opportunités économiques manquent cruellement.

Partie 1:

Partie 2:

Or, avec cette vidéo, on voit Romney en train de dire que tout va plutôt bien : si ça ne va pas pour vous et votre famille, c'est de votre faute. Le candidat républicain a reproché publiquement à Obama de faire obstacle à la libre entreprise, comme si l'économie catastrophique était de sa faute. En privé, devant des gens qui possèdent des yachts et des caves à cigares, il accuse les moins chanceux d'être responsables de leur sort.

Considérant le nombre de personnes qui se débattent - 80 % de la main d'œuvre a vu ses salaires baisser lors du dernier quart de siècle, et la moyenne des revenus des ménages a chuté de 40 % au cours de cette Grande Récession -, ce type de remarques est politiquement incendiaire. Elles mettent dans le même panier des gens qui n'ont jamais raté un jour de travail, avec une vision stéréotypée de personnes vivant aux crochets des allocations publiques. Au revoir, Mitt. Va poursuivre tes affaires dans le secteur privé.

Ezra Klein a adroitement souligné le vide factuel de l'affirmation de Romney selon laquelle presque la moitié du pays ne paye pas d'impôts, en remarquant que presque deux tiers de ces gens ont travaillé l'an dernier et ont des retenues sur salaire obligatoires, ce qui rend leur charge fiscale réelle - 15,3 % - plus haute que celle de Romney, à 13,9 %.

Oublions ces faits deux secondes, et concentrons-nous sur ce que le message de Romney implique. Dans une Amérique où presque la moitié de la population est heureuse de vivre aux crochets de l'Etat - en ne payant pas d'impôts tout en utilisant ses bons de ravitaillement pour du caviar et son "carnet de huit bons" pour prendre des suites au Four Seasons - la solution politique est simple : enlever le filet de sécurité et envoyer ces parasites chercher l'un de ces fabuleux emplois qui n'attendent que d'être pourvus.

En choisissant comme candidat républicain à la vice-président Paul Ryan, qui voudrait vider de sa substance Medicaid, et en affirmant sans preuve à la télévision qu'Obama voudrait déverser les prestations sociales comme des confettis, Romney nous a déjà fait comprendre qu'il considère les pauvres comme des bons à rien. Ces remarques malsaines aux donateurs en Floride nous indiquent cette fois qu'il considère la classe moyenne de la même manière.

Il ne se rend simplement pas compte que des dizaines de millions d'Américains ont un salaire si bas qu'ils ne payent pas d'impôts fédéraux sur les revenus. Il ne comprend pas que beaucoup de gens sont écrasés de dettes, et ont besoin d'aide pour pouvoir se loger, se soigner et se nourrir - pas parce qu'ils sont paresseux ou moralement dégénérés, ou parce qu'ils ont le sentiment que tout leur est dû, mais bien parce que leur salaire est insuffisant.

Pour le camp de Romney, cette vidéo donne à voir une image fatale du candidat, venant s'ajouter à une série de couacs qui minent déjà sa campagne.

Ces gens qui ont travaillé dans des usines du Michigan ou de l'Ohio, où ils gagnaient assez pour faire vivre leurs familles mais qui travaillent maintenant chez Walmart, gagnant suffisamment pour pouvoir prétendre à des bons de ravitaillement, Romney vient de les traiter de paresseux.

Selon Romney, les propriétaires en Floride, dans le Nevada et le Colorado dont la vie a été bouleversée par la perte d'un emploi et de la couverture santé allant avec, ce qui les a forcés à hypothéquer leur maison pour couvrir les frais d'une maladie imprévue, pensent que la société leur doit de meilleurs jours.

Ces étudiants dont les parents ne gagnent pas assez pour leur payer l'université, et qui de ce fait doivent emprunter à un programme soutenu par l'Etat qui finance les hautes études, Romney les a appelés sangsues de la société.

Nous venons donc d'avoir un aperçu de l'Amérique que Mitt Romney considère depuis son perchoir de privilégié, dans laquelle quiconque incapable de participer à un gala de charité à 50 000 dollars le couvert, n'a pas assez essayé. Cette vision contraste un peu trop avec l'Amérique où vivent la plupart des gens. Ca va être dur à expliquer aux gens normaux.

Et c'est pourquoi c'est la fin de la candidature de Romney.

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