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Quand le gouvernement Harper dilue la protection de l'environnement

Le projet de loi C-38 déposé par le gouvernement Harper est un projet de loi fourre-tout lié au budget. Il contient entre autres une section modifiant laqui sera dorénavant restreinte à la protection «». Cette mesure a plus d'importance qu'il n'y paraît.
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ROLAND WEIHRAUCH / AFP

Le projet de loi C-38 déposé par le gouvernement Harper est un projet de loi fourre-tout lié au budget. Il contient entre autres une section modifiant la Loi sur les Pêches qui sera dorénavant restreinte à la protection « des pêches commerciales, récréatives et autochtones ». Cette mesure a plus d'importance qu'il n'y paraît.

Dans son communiqué, le ministre des Pêches et Océans, Keith Ashfield, a présenté ces modifications comme « mettant l'accent sur les menaces réelles et importantes qui pèsent sur les pêches et sur les habitats dans lesquelles elles sont pratiquées». Dans un passage particulièrement insidieux , le ministre Ashfield déclare : « nous avons clairement fait valoir que les règles qui régissent actuellement la protection de l'habitat du poisson sont générales et non représentatives et qu'elles ne reflètent pas les priorités des Canadiens. Nous nous engageons donc à veiller à ce que nos règles protègent les pêches qui sont importantes pour les Canadiens, ainsi que les habitats où ces pêches sont pratiquées. En ce faisant, nous accorderons aux Canadiens la liberté de conserver leurs biens et nous minimiserons les restrictions relatives aux activités quotidiennes qui ont peu ou pas d'incidences sur les pêches canadiennes. »

Ce que M. Ashfield ne précise pas, c'est que le ministère des Pêches et Océans avait élaboré au cours des dernières décennies tout un régime de protection de l'environnement aquatique fondé sur la section « Protection de l'habitat des poissons et prévention de la pollution » de la Loi sur les Pêches. Ce régime permettait aux agents fédéraux d'intervenir partout au Canada pour faire cesser des activités pouvant perturber les écosystèmes aquatiques susceptibles d'abriter des poissons et autres animaux marins, y compris des mammifères, des oiseaux, des crustacés et des mollusques. Il est vrai que le ministère avait poussé un peu loin en échafaudant un régime de compensation non prévu à la loi, mais son action opiniâtre palliait souvent les carences des institutions provinciales plus dépourvues ou simplement indolentes.

Dorénavant, cette protection n'existe plus. Le nouvel article 6 précise notamment qu'avant de proposer un règlement ou d'exercer des pouvoirs prévus à la section sur la protection de l'habitat des poissons et la prévention de la pollution, le ministre devra tenir compte des 4 facteurs suivants 1) l'importance du poisson visé pour la productivité continue des pêches commerciale, récréative et autochtone, 2) les objectifs en matière de gestion des pêches, 3) l'existence de mesures et de normes visant à éviter, à réduire ou à contrebalancer les dommages sérieux à tout poisson visé par une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou à tout poisson dont dépend une telle pêche et 4) l'intérêt public. Il est complété par l'article 6.1 qui stipule que « L'objet de l'article 6 et des dispositions qui y sont visées est d'assurer la durabilité et la productivité continue des pêches commerciale, récréative et autochtone ».

Le projet de loi laisse présumer que les agents du ministère des Pêches et Océans auront désormais le fardeau de démontrer qu'il existe une pêche réelle, actuelle et continue et ne pourront se contenter d'une présomption de pêche ou d'une pêche potentielle pour intervenir afin de préserver un habitat. Suivant ce raisonnement, les cours d'eau où s'est pratiquée la pêche par le passé ou qui sont susceptibles d'être utilisés à cette fin dans un avenir quelconque seront exclus de la juridiction du ministre et pourront être pollués sans permis. De plus, on peut se demander s'il suffira à un entrepreneur de démontrer l'existence ailleurs de mesures et de normes visant à réduire ou contrebalancer des dommages sérieux à une espèce de poisson visée par une pêche commerciale pour pouvoir exercer son activité sans protéger un milieu spécifique.

En restreignant l'application de la Loi sur les Pêches aux secteurs commerciaux et récréatifs et aux activités amérindiennes, le gouvernement Harper abdique ses responsabilités environnementales aux provinces et donne son aval aux activités industrielles en milieu aquatique. Le visage du Canada ressemble de plus en plus à celui de son premier ministre...

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