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Saturation du marché des condominiums à Montréal

Le marché immobilier est inondé de condominiums sur l'île de Montréal. Nous avions prédit, dès le printemps 2012, qu'il y aurait un risque de surchauffe et, même, qu'un bulle immobilière pourrait se former au point de menacer les tentatives de relance économique de la grande région métropolitaine. Déjà, en octobre dernier, le Fonds monétaire international (FMI) mettait en garde les autorités canadiennes au sujet du surendettement des ménages...
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Le marché immobilier est inondé de condominiums sur l'île de Montréal. Nous avions prédit, dès le printemps 2012, qu'il y aurait un risque de surchauffe et, même, qu'un bulle immobilière pourrait se former au point de menacer les tentatives de relance économique de la grande région métropolitaine.

Surendettement des ménages

Déjà, en octobre dernier, le Fonds monétaire international (FMI) mettait en garde les autorités canadiennes au sujet du surendettement des ménages, dans un contexte où beaucoup trop d'hypothèques ont été consenties aux consommateurs. Par ailleurs, le FMI disait craindre une chute de la valeur des unités d'habitation, ce qui porterait un coup supplémentaire aux ménages endettés et provoquerait, par voie de conséquence, une contraction de la demande intérieure.

En d'autres termes, de plus en plus de ménages surendettés seraient incapables de rembourser leurs prêts hypothécaires. Certaines études font état du fait que la majorité des acheteurs sont obligés de consacrer entre 40 % et 80 % de leurs revenus afin de s'acquitter de leurs obligations hypothécaires. En définitive, seuls les très bas taux d'intérêt et la mise en commun des revenus des couples auront permis à cette croissance artificielle de poursuivre sa course. Mais, déjà, on note un ralentissement notable de la construction de condominiums au Québec (recul de 15,6 % cette année).

Surplus de condominiums de luxe

Il appert que les unités de condominiums de luxe sont toujours produites sans tenir compte de la demande réelle, dans un contexte où la demande québécoise concerne les unités de 200 000 dollars et MOINS. Un article récemment publié dans les pages du quotidien Le Devoir précise que le nombre des vendeurs serait supérieur au nombre des acheteurs au Québec, une première depuis 2000.

En fait, les unités de condominiums d'une valeur de 500 000 $ et plus poussent comme des champignons à Montréal, alors que les unités abordables (moins de 300 000 $) sont de moins en moins construites. Plusieurs études ont démontré que près de 30 % des unités de luxe seraient vendues à des acheteurs étrangers qui les loueront par la suite. Il est important de préciser, ici, que contrairement à des pays comme l'Italie, il n'y a pas de loi ici qui contraignent les acheteurs de biens immobiliers à y résider. Le marché des condominiums de luxe pourrait, tout simplement, servir à alimenter une cabale spéculative profitant à des groupes sélects de financiers et générant des revenus de permis de démolition et de construction aux arrondissements concernés.

Les autorités financières réagissent

Malgré tout, les acteurs du développement local et une partie de la classe politique prétendent que tout va bien. Pourtant, la Banque du Canada, la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) et les autres officines responsables de la fixation des taux hypothécaires et des barèmes d'octroi de prêts hypothécaires ont commencé à réagir dès la fin de l'été 2012.

Toujours selon Le Devoir, les autorités concernées ont, bel et bien, donné un sérieux «coup de frein» à l'emprunt hypothécaire l'été dernier. Conséquemment, le nombre de condominiums vendus à Montréal aurait chuté de 29 % pour le seul mois de décembre 2012. Cette situation fait dire à l'économiste Hélène Bégin, du Mouvement Desjardins, que le surplus de condominiums qui ne trouveront plus d'acheteurs pourrait faire en sorte que ... la bulle immobilière explose, une fois pour toutes.

Fin de partie

De fait, les observateurs sérieux craignent que le Canada, et plus particulièrement ses métropoles, vive une situation comparable à la crise du marché hypothécaire qui a frappé les É.-U. en 2010 ou celle qui a pulvérisé l'économie espagnole en 2012. La bulle immobilière explosant, les ménages incapables de rembourser leurs prêts hypothécaires, un nombre important d'unités construites sans acquéreur, les prêteurs hypothécaires perdant une part de leur mise, le marché domestique se contractant et la récession s'installant à demeure.

Quelques pistes de réflexion

Le développement immobilier ne pose pas de problèmes en soi, ce sont ses orientations et l'encadrement politique qui sont en cause. Si la construction d'unités neuves profite à plusieurs industries, encore faut-il relancer d'autres secteurs d'emplois afin que les ménages puissent faire face à la musique. Par ailleurs, le développement immobilier des anciens faubourgs de Montréal devrait s'inscrire de façon plus harmonieuse à un Plan d'urbanisme qui aurait, au préalable, été bonifié et actualisé.

Nos édiles ne cessent de répéter que l'industrie immobilière participe à la Renaissance de Montréal. En fait, les familles sont de moins en moins nombreuses sur l'île de Montréal (dernier recensement de Statistique Canada de 2011) et les ménages à faibles ou moyens revenus peinent à trouver des unités d'habitation à prix ... abordables.

En effet, comment honorer des mensualités hypothécaires de l'ordre de 1 200 dollars par mois (hypothèque peu élevée), lorsque le consommateur ne peut compter sur des revenus nets d'environ 1 600 dollars pour la même période (chiffre un peu plus haut que le salaire moyen) ? Et, tout cela sans oublier la hausse constante et aberrante du niveau de taxation municipale.

À ce rythme, Montréal ne pourra croître et son centre-ville sera, désormais, dédié aux ménages fortunés de retraités, cadres supérieurs ou investisseurs étrangers. Les arrondissements périphériques souffriront de cette inflation immobilière et ne pourront PLUS assurer les services de proximité de base à leurs citoyens. L'étalement urbain se poursuivra de plus belle et, hormis un centre-ville sous cellophane, Montréal deviendra, à l'instar des Détroit de ce monde, une zone sinistrée.

Il est urgent d'arrimer le développement immobilier à une vision plus globale d'un développement urbain qui prendrait en compte le grand Montréal métropolitain.

Pour une fois que, pratiquement, tous les acteurs politiques et institutionnels s'entendent: les banlieues doivent assumer leur quote-part au niveau du partage des infrastructures routières et de l'affluence des 500 000 travailleurs et étudiants présent dans le centre-ville de Montréal durant la journée. Il incombe de juguler la congestion routière en sol montréalais (en progression constante malgré les mensonges répétés de la classe politique), d'harmoniser la rénovation des anciens faubourgs, de favoriser des INCUBATEURS d'entreprises et un NIVEAU DE TAXATION adapté aux industries de la culture et à certains créneaux porteurs. Tout cela sans oublier les ménages à faible revenu qui représentent plus de 60 % de la population montréalaise.

Il est encore temps d'empêcher que la bulle immobilière n'éclate, en ralentissant la folle course d'un marché qui s'apparente plus à une table de poker de casino qu'à un effort concerté de relance économique viable et pérenne.

Découvrez le blogue de Patrice Hans Perrier ici.

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