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La mise sous tutelle de Montréal s'impose

La mise sous tutelle de Montréal permettrait de mettre à plat le fonctionnement de la métropole, ses structures de gouvernance, les «grands projets du Maire», l'état des finances, celui des infrastructures et tant d'autres avenues engluées dans la boue de la corruption.
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Les récentes accusations qui pèsent sur les épaules du Maire de Montréal par intérim ont fini par faire déborder la patience des citoyens. Les pompiers supposés venus éteindre le feu sont... des pyromanes de première! L'image de marque de la métropole du Québec est à nouveau salie alors qu'éclate une grève de la construction qui risque fort de plonger plusieurs chantiers immobiliers dans le marasme. En fait, nous sommes déjà rendus aux «vacances de la construction»... avec un mois d'avance !

Pourquoi ne pas profiter de cet enlisement pour, fort justement, nous ressaisir? C'est le moment - avant que l'Assemblée nationale ne parte en vacances - idéal pour marquer une pause salutaire, histoire de mettre un terme à cette fuite en avant qui risque de dégénérer à brève échéance. La mise sous tutelle de Montréal s'impose d'elle-même. Et, c'est le patient, lui-même, qui réclame un traitement qui est repoussé du revers de la main par ses propres médecins.

Traiter les symptômes ou s'occuper de la cause ?

La classe politique nous fait penser aux médecins de Molière qui s'acharnaient - dans la célèbre pièce de théâtre - à se quereller au chevet d'un malade servant de prétexte pour faire fructifier leurs propres intérêts de prévaricateurs. Que certaines têtes tombent ou que certains mécanismes de contrôle soient resserrés ne changeront rien au fait que la pièce de théâtre montréalaise sombre dans une sorte de vaudeville qui ne fait plus rire personne. Avec un malade, le citoyen contribuable, qui n'en peut plus de subir des saignées qui sont supposées l'aider à se rétablir!

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C'est un secret de Polichinelle qui nous faudra bien songer - et le plus tôt sera le mieux - à réduire la taille de l'appareil municipal et à liquider les trop nombreux duchés qui gangrènent la Ville de Montréal. Il est plus que temps de rétablir l'autorité de la «ville centre» pour que la ville réelle échappe aux fléaux qui menacent son état de santé. Montréal est une ville morcelée de toutes parts, avec des constituantes dont la gouverne échappe jusqu'à une classe politique qui s'agite en vain.

La mise sous tutelle de Montréal permettrait de mettre à plat - sur la table du véritable procès de la démocratie - le fonctionnement de la métropole, ses structures de gouvernance, les «grands projets du Maire», l'état des finances, les principales transactions conclues avec le privé, l'état des infrastructures, la gestion des transports et tant d'autres avenues engluées dans la boue et la fange d'une corruption qui remonte aux calendes grecques.

Le syndrome du déni

Le philosophe français Michel Onfray, lors d'une conférence intitulée «Le principe de Don Quichotte», nous parle du syndrome du déni de la réalité qui est en jeu dans le célèbre roman de Cervantès. Don Quichotte, représentant d'une élite intellectuelle qui se complait dans ses schémas intellectuels, refuse de voir la réalité en pleine face et c'est son fidèle écuyer, Sancho Panza, qui le ramène sur le «plancher des vaches». Onfray estime que Sancho Panza représente cette sagesse populaire - pétrie de gros bon sens et faisant preuve d'un épicurisme de bon aloi - qui sait très bien que les schémas proposés par l'élite ne représentent que des leurres en définitive. Don Quichotte serait prisonnier, toujours d'après Onfray, d'une sorte de quête de la transcendance qui évacue le réel afin de mieux mystifier les personnages du théâtre du quotidien.

Loin de nous l'idée d'évacuer toute transcendance du procès politique, histoire de ramener la gouvernance de nos cités à une simple question de gestion des fonds publics et de contrôle des appels d'offres. L'idéalisme a toujours sa place en politique, sinon... on aurait qu'à engager des gestionnaires en bout de ligne. Mais, au point où nous en sommes rendus, la mystification montréalaise dépasse l'entendement et les bornes! Il est temps de retomber sur le «plancher des vaches», afin de pouvoir remonter le fil de l'histoire.

Remonter le fil de l'histoire

Contrairement à ce que tentent de nous faire croire plusieurs illusionnistes, le fil de l'histoire ne remonte pas au passage du pouvoir de l'administration Bourque à celle de l'infortuné Maire Tremblay. Non. La pelote est bien trop grosse... il faut prendre le temps de dérouler un amalgame de politiques municipales qui remonte jusqu'au célébrissime Maire Drapeau et même bien avant! Pourquoi nos édiles ont-ils tu le fait que les grands projets routiers, immobiliers et urbains ont toujours été voulus par des instances de gouvernance extérieures, voire étrangères? Les grands axes routiers, à l'instar de la tristement célèbre autoroute Ville-Marie, ont été esquissés avec l'idée de faire de Montréal une plaque tournante, un espace de transit destiné à accueillir des flux de marchandises, de voyageurs ou d'investissements sensés nous apporter modernité et prospérité.

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Montréal est tombé en désuétude parce que sa propre destinée lui a été confisquée il y a un demi-siècle par une caste d'oligarques manoeuvrant depuis des officines étrangères. Ils ont pris la décision de prolonger la voie maritime, déplaçant les transports de marchandises, mais tout autant les centres de production et de décision vers Toronto parce que l'industrie automobile le commandait. Tout le reste fut à l'avenant et Montréal, privée de sa réelle souveraineté, est devenue, contre son gré, un centre de divertissement à grand déploiement. Il fallait à tout prix que Montréal devienne une métropole «internationale», assume son branding salutaire ...

La corruption montréalaise remonte, en effet, aux calendes grecques. Son destin lui a échappé parce que la bourgeoisie compradore canadienne aura jeté son dévolu sur une autre cité mieux positionnée sur l'échiquier de... l'Empire. Remonter le fil de l'histoire ne signifie pas retourner brasser de vieilles querelles ou se lamenter face à un passé qui ne reviendra plus. Que nenni. Pour guérir du syndrome du déni il faut connaître l'histoire afin de pouvoir redessiner notre schéma de navigation. Avant de s'ouvrir sur le monde - ce qui peut s'apparenter à une fuite en avant dans le cas de Montréal - une cité doit pouvoir jouir d'un état de santé satisfaisant. Une cité c'est un organisme qui comprend une multitude d'organes qui sont inter-reliés et qui doivent fonctionner normalement, dans un état de santé minimal. Et, si l'on prend du recul au niveau de notre analyse, on finira par réaliser que Montréal représente le poumon économique du Québec.

Le gouvernement du Québec doit mettre un terme à la progression de ce qui s'apparente à un cancer virulent. La mise sous tutelle de Montréal représente bien plus qu'une simple mesure administrative ou judiciaire. Il s'agit - pour la nation québécoise au grand complet - d'empêcher que notre métropole ne devienne une zone de non-droit, un espace de transit pour des opérations financières dont la portée et la finalité échapperont de plus en plus à notre destinée. Nous, les Sancho Panza du Québec.

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