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Nous sommes (presque) tous des sans-abri fiscaux

Ces gros pleins de fric ressemblent à ces convives qui se goinfrent au restaurant et partent en abandonnant l'addition aux autres. On les laisse faire malgré le goût amer qu'ils nous laissent.
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Alors que le scandale des Panama Papers commence à peine à montrer l'étendue de l'injustice et l'ampleur du détournement d'argent, le sans-abri fiscal que vous êtes s'échine à remplir sa feuille d'impôt avant le 30 avril, s'il veut éviter que le fisc lui mette une main au collet et l'autre dans le portefeuille.

Comme vous et comme la majorité des contribuables, je n'y connais par grand-chose en matière de fiscalité, d'évitement, d'évasion, de paradis fric sale ou de détournement d'impôts. Je travaille et je paye. C'est comme ça que la société fonctionne. Chacun doit verser sa juste part. Mais chacun, ça ne veut pas dire tout le monde en langage de fiscaliste. Je le sais, vous le savez, même le gouvernement le sait.

Une minorité de bien nantis jongle avec les lois pour faire encore plus de profits et, surtout, éviter de devoir payer son dû.

Ces gros pleins de fric ressemblent à ces convives qui se goinfrent au restaurant et partent en abandonnant l'addition aux autres. On les laisse faire malgré le goût amer qu'ils nous laissent.

Le scandale mondial des Panama Papers n'est pas le premier. «Offshoreleaks», «Luxleaks», «Swissleaks»... combien de scandales fiscaux faudra-t-il encore attendre avant que nos gouvernements se décident à apporter une réponse à la hauteur de l'ampleur du problème? demandait avec fermeté Philippe Lamberts coprésident du groupe des Verts à la Commission européenne. Combien de milliards détournés avant de revoir les règles? Combien de malhonnêtes non taxés en goguette dans les îles Vierges avant de punir les voleurs? Combien de fortunes dissimulées avant d'interdire le vol à l'état lâche? Car ce qui est légal n'est pas toujours juste et ce qui n'est pas illégal n'est pas forcément éthique.

Les scandales indigestes se suivent à une cadence effarante. Mais ce n'est pas assez pour soulever l'indignation et créer le moindre petit mouvement de protestation. La Voix est finie et le Canadien ne fait pas les séries, qu'attend-on pour descendre dans la rue?

Le consommateur surtaxé a, semble-t-il, d'autres soucis que de réclamer un peu plus de justice et d'éthique.

Rafraîchissons-lui la mémoire et profitons-en collectivement pour nous fâcher avant qu'un autre banquier, celui du divertissement et de la télé, ne vienne voler la vedette à l'information.

• L'Agence du revenu du Canada a amnistié des multimillionnaires canadiens qui avaient fait disparaître comme par magie les impôts qu'ils devaient payer ici en envoyant leur argent dans un paradis fric-sale avec la complicité des comptables de KPMG.

• Une mystérieuse banque canadienne a, pas plus tard qu'il y a peu, été condamnée à payer une amende de 1,15 million pour avoir omis de rapporter aux autorités une transaction douteuse de plus de 10 000 $. Le ministère du Revenu n'a pas trouvé judicieux de dévoiler qu'elle était cette banque (peut-être la vôtre). Nous continuons donc de déposer nos petits avoirs dans la grande escarcelle de ces bandits protégés.

• La grosse grosse banque HSBC dont l'acronyme ressort régulièrement dans les bulletins d'infos fréquente les cartels mexicains. Pourtant la multinationale du fric continue d'avoir pognon sur rue.

• Un premier ministre du Québec a placé 600 000 $ dans un compte bancaire de l'île de Jersey, considérée comme un paradis fiscal, pendant huit ans, alors qu'il travaillait en Arabie saoudite.

• Une méga entreprise médiatique bien de chez nous a eu des comptes en Suisse, au Luxembourg, en Islande, mais aussi à la Barbade et aux îles Caïmans.

• Les investissements canadiens dans les paradis fiscaux ont totalisé 130 milliards de dollars en 2011. Barbade: 53,3 milliards. Îles Caïman: 25,8 milliards. Irlande: 23,5 milliards. Luxembourg: 13,8 milliards. Bermudes: 13,2 milliards.

Une seule de ces informations suffit à me faire bondir. Mais, comme vous, je suis trop occupé pour aller manifester sous les fenêtres antibruit de nos autorités. Il faut que je vous laisse, j'ai encore un chèque à faire au nom du receleur général du Canada.

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