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Le droit international et l'intervention américaine en Syrie

Si, pour le moment, les communications émanant du gouvernement syrien saluent l'offensive multinationale contre l'État islamique, il serait hasardeux de considérer qu'une telle salutation de la part du gouvernement de Damas puisse se substituer à un consentement sans ambigüité qui respecterait l'esprit de la Charte des Nations-Unies.
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Dernièrement, le président Barack Obama s'adressait à l'assemblée générale des Nations-Unies afin d'inviter tous les États du monde à se mobiliser derrière la coalition plurinationale partenaire de l'Irak afin de faire face à la menace que représente l'État islamique.

Comme souvent lors des missions militaires auxquelles participent les forces américaines, la question de la légalité d'intervention en droit international refait surface.

Certains commentateurs ont avancé que l'Article 51 de la Charte des Nations Unies permettait, sous le principe de la légitime défense collective, à une coalition internationale d'intervenir sur le territoire de la Syrie en soutien à l'Irak.

Or, il faut comprendre que le droit à la légitime défense définit par l'Article 51 implique les états, non pas les organisations non gouvernementales qui existent sur leurs territoires [voir : Avis consultatif sur l'érection d'un mur à Jérusalem et les territoires occupés]. Ainsi, l'Irak et sa coalition ne peuvent prétendre agir en vertu de la légitime défense sur le territoire de la Syrie, car les forces militaires syriennes n'ont pas commis d'agression envers l'Irak.

L'Irak peut légitimement invoquer l'Article 51 de la Charte de l'ONU si et seulement si elle est capable de démontrer que les combattants de l'État islamique sont expressément financés et mobilisé par l'État syrien [voir: L'affaire Nicaragua c. États-Unis].

Le problème d'une articulation juridique qui reposerait sur l'Article 51 est que celle-ci reposerait sur une interprétation extensible de la notion de légitime défense afin d'y inclure le principe de légitime défense préventive. Cette articulation repose donc sur la menace potentielle que représente l'État islamique pour les pays tiers (États-Unis, Canada, Israël, etc.). Or, l'idée de la légitime défense préventive fut formellement écartée par l'Assemblée générale de l'ONU en 2005 lors des débats sur le 60e anniversaire de l'ONU.

Ce refus d'accepter le concept de légitime défense préventive s'est également confirmé par le refus des Nations Unies d'appuyer la mission américaine en Irak au début des années 2000.

Cependant, une intervention sur le territoire syrien demeure possible, mais celle-ci doit se faire en vertu du régime encadrant l'obligation de protéger. Ce régime prévoit deux conditions possibles de licéité pour une telle intervention. Celle-ci se déroule soit avec le consentement du gouvernement syrien reconnu par l'Organisation des Nations-Unies; celui de Bashar Al-Assad, soit sous l'autorité d'une résolution du Conseil de sécurité [voir: Document final du sommet mondial de 2005,par.138-139].

Il est vrai que la légitimité du gouvernement Al-Assad est contestée par plusieurs états, il n'en demeure pas moins que c'est ce gouvernement qui siège à l'Organisation des Nations-Unies dont répond le régime de la Charte. Conséquemment, c'est de ce gouvernement que doit provenir le consentement en ce qui concerne la responsabilité de protéger. Cependant, pour des raisons politiques (les États-Unis ne reconnaissent plus Al-Assad comme chef d'État légitime de la Syrie), le gouvernement américain refuse d'obtenir le consentement et la coopération du gouvernement syrien dans sa lutte contre l'État islamique en Syrie.

Si, pour le moment, les communications émanant du gouvernement syrien saluent l'offensive multinationale contre l'État islamique, il serait hasardeux de considérer qu'une telle salutation de la part du gouvernement de Damas puisse se substituer à un consentement sans ambigüité qui respecterait l'esprit de la Charte des Nations-Unies.

Il existe cependant une alternative.

Le Chapitre 7 de la Charte de l'ONU prévoit que dans un cas où la paix et la sécurité mondiale ou régionale se trouvent menacées, le Conseil de Sécurité peut prendre une résolution autorisant l'usage de la force. Dans une telle figure de cas, il serait possible pour la coalition d'entreprendre une action multilatérale contre l'État islamique en Syrie, sans pour autant contraindre Washington à revenir sur sa dénonciation du gouvernement de Bashar Al-Assad.

Au final, si le droit international ne s'oppose pas fondamentalement à une intervention multinationale en Syrie, n'en demeure pas moins qu'il impose un cadre restrictif à la forme et à la manière qu'une telle intervention doit suivre.

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