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Et si Poutine tenait sa revanche en Syrie?

Vladimir Poutine, que l'on a diabolisé à propos de l'Ukraine, fait un retour international fracassant au Proche-Orient.
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Les forces loyales au régime de Bachar Al-Assad, appuyées par des raids russes, ont repris le 3 août 2016 aux rebelles de nouvelles positions près de la ville d'Alep, la deuxième de Syrie, réduisant presque à néant les gains tout récemment engrangés par les insurgés lors d'une offensive qui s'annonce comme décisive.

Les avions russes ont ainsi mené d'intenses raids au sud d'Alep en soutien aux forces du régime syrien. Ils ralentissent avec succès l'offensive des rebelles. Et c'est ainsi que Moscou et Téhéran sont désormais sur le point d'asséner un coup qui se révélera fatal à l'opposition. De fait, en coupant la route du Castello le 17 juillet 2016, les forces loyalistes sont parvenues à encercler la partie est de la ville d'Alep, contrôlée par les forces rebelles. Dès lors, il ne reste plus que deux options: soit les rebelles tentent une action désespérée pour briser le siège, soit ils se rendent et acceptent la défaite.

La bataille la plus importante depuis le début de la crise en Syrie

Cette bataille est assurément la plus importante depuis le début de la crise en Syrie. Opposés aux forces du régime et à leurs alliés iraniens et du Hezbollah, bombardés par l'aviation russe, les rebelles jouent leur survie à Alep. Et ils sont désespérément seuls. Qu'on y songe, la reprise totale d'Alep serait une immense victoire pour Bachar Al-Assad. Mais qu'on se le dise, cette bataille ne saurait être assimilée à une libération de la ville, car ce sont al-Nosra, rebaptisé Fateh al-Sham (le Front de la conquête du Levant) et ses alliés qui s'y collent.

Pour rappel, l'accord de coopération militaire en Syrie contre les groupes djihadistes, conclu entre Washington et Moscou fin juillet 2016, souligne assurément des désillusions américaines à l'égard d'une crise qui n'en finit pas, et témoigne assurément du succès de la stratégie russe en Syrie. Il prévoit une coopération dans la lutte contre le Front Fateh al-Sham, en échange du soutien américain contre le groupe leader de la rébellion syrienne. Dans le même temps, Moscou s'est engagée à ne pas attaquer les «rebelles modérés» soutenus par Washington. «L'armée syrienne et les milices chiites étrangères sont en principe elles aussi tenues par cet accord», souligne Fabrice Balanche, maître de conférences à l'Université Lyon-2 et chercheur invité au Washington Institute.

Vladimir Poutine apparaît comme incontournable aujourd'hui en Syrie.

Étant entendu que les Américains, qui projettent de se retirer coûte que coûte de la Syrie, ne négocient ni avec Bachar Al-Assad, ni avec Téhéran mais bel et bien avec Vladimir Poutine en personne. Dès lors, Barack Obama renonce tout à la fois à un changement de régime en Syrie et s'apprête à abandonner le pays à «un condominium russo-iranien».

Barack Obama est tout à fait conscient que les alliés de Bachar Al-Assad ne plieront pas car ils sont trop engagés dans le conflit. En clair, Moscou et Téhéran ne peuvent se permettre de perdre la partie car la Syrie est une pièce maîtresse dans leur dispositif géopolitique. Quant à Barack Obama, il s'est impliqué personnellement dans la campagne présidentielle, et il fera tout pour qu'Hillary Clinton lui succède en janvier 2017. En clair, il fera tout pour éviter un attentat djihadiste sur le sol américain... Et pour mémoire, un attentat dans le métro de Washington a bien été déjoué.

Vladimir Poutine montre que c'est lui qui imprime le tempo de la crise syrienne, sur le terrain militaire comme sur le plan diplomatique. Et il y a plus: on soulignera volontiers que Vladimir Poutine apparaît incontournable dans la région. Du reste, un retrait relatif américain du trop coûteux Moyen-Orient au profit du continent asiatique est assurément inscrit dans la politique étrangère de l'Oncle Sam ; ce qui laisse somme toute encore bien davantage de marge de manœuvre à Vladimir Poutine.

On le sait, l'intervention militaire russe de septembre 2015 en Syrie a permis en outre à Moscou d'oublier l'échec ukrainien. Étant entendu que la récupération de la Crimée qui est russe, et l'appui aux mouvements insurrectionnels de l'est ukrainien n'effacent pas la perte de l'Ukraine peuplée de 50 millions de slaves russophones (Le monde au défi, Hubert Védrine, Editions Fayard 2016) qui ne feront désormais pas partie de l'Union euro-asiatique. On l'aura compris, Vladimir Poutine, que l'on a diabolisé à propos de l'Ukraine, fait un retour international fracassant au Proche-Orient, et bien au-delà...

Dans ce contexte, le chef du Kremlin tient assurément sa revanche en Syrie. Et c'est bel et bien une victoire de Bachar Al-Assad qui se dessine en 2016.

Ce billet a initialement été publié sur le Huffington Post France.

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