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Pourquoi le hijab islamiste est une entrave à l'intégration

Dans l'état actuel des choses, nous sommes forcés de reconnaitre que nos femmes musulmanes voilées font face à un vrai dilemme.
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Dans l'état actuel des choses, nous sommes forcés de reconnaitre que nos femmes musulmanes voilées font face à un vrai dilemme. Elles ont le choix entre une carrière réussie, plus de chances de vie pour leurs enfants ou un morceau de tissu sur la tête dont la légitimité religieuse est plus que douteuse.

Pourtant, la solution existe. Elle est même très simple et d'une extrême facilité si ces femmes font preuve de flexibilité et d'ouverture. Elles peuvent choisir un style d'habillement tout à fait décent, convenable et conforme à leur morale religieuse sans qu'il exprime nécessairement leur affiliation confessionnelle. Malheureusement, force est de constater que dans leur cas, leur insertion professionnelle et leur intégration sociale sont beaucoup plus difficiles que celles de nous les hommes musulmans. Le voile islamique est une entrave de plus à l'épanouissement des femmes musulmanes, car il est perçu de trois façons qui font en sorte qu'au Québec actuellement les femmes musulmanes sont beaucoup plus frappées par des expressions de rejet que les hommes musulmans.

Premièrement, le hijab au Québec n'est pas seulement perçu comme un signe d'une expression spirituelle, mais il est surtout considéré comme une affirmation idéologique d'une appartenance à un courant politico-religieux, c'est-à-dire à l'islamisme, qui cherche à imposer à une société laïque une visibilité religieuse qu'elle refuse. C'est cette position précisément qui suscite le plus d'hostilité à son égard au Québec, car il est vu, à l'image de la prière dans les lieux publics, comme un outil de marquage de territoire idéologico-politique particulièrement intolérable. Pour les Québécois, il est le marqueur islamiste par excellence.

Deuxièmement, le voile facilite beaucoup plus l'assignation identitaire de la femme musulmane que l'assignation identitaire de l'homme musulman. D'ailleurs, c'est ce qui explique que les femmes musulmanes ont été des cibles de geste de violence beaucoup plus que les hommes musulmans dans l'espace public québécois dans les dernières années. Il explique aussi pourquoi les femmes musulmanes trouvent plus de difficultés à trouver du travail que les hommes.

Troisièmement, le voile est perçu au Québec comme une remise en cause de l'égalité entre les hommes et les femmes. Il est considéré comme une divinisation de l'inégalité des sexes. Cette égalité a été chèrement acquise au Québec après une lutte féroce contre les autorités religieuses. Il est donc difficile de faire accepter à une société, dont les femmes ont longtemps souffert du machisme de ses institutions religieuses et qui a été éduquée dans un esprit féministe, un signe religieux sexiste et discriminant même si dans la plupart des cas, les femmes musulmanes le portent par choix et par des convictions religieuses très différentes de ces considérations philosophiques propres aux sociétés occidentales.

Il sera difficile aux musulmans du Québec de changer ces perceptions du voile islamique profondément ancrées dans l'inconscience politique des Québécois sous l'effet du conditionnement médiatique planétaire.

Il sera difficile aux musulmans du Québec de changer ces perceptions du voile islamique profondément ancrées dans l'inconscience politique des Québécois sous l'effet du conditionnement médiatique planétaire. Pour nos concitoyennes de confession musulmanes voilées, il ne reste malheureusement que trois choix. Garder leurs voiles tout en sachant que le prix sera leur exclusion sociale assurée, changer de pays avec les conséquences désastreuses que peut générer un tel choix sur leurs parcours individuels et familiaux ou chercher dans leur religion les interprétations qui peuvent leur permettre de se débarrasser du voile.

La dernière solution parait logiquement la plus intelligente, la moins couteuse et la plus pragmatique. Car contrairement à ce que prétendent les théologiens islamistes, théologiquement et historiquement, le hijab n'était pas une obligation religieuse. À l'époque du prophète, il était une disposition de circonstance pour protéger les femmes. Le statut précaire des femmes voilées au Québec prouve qu'il est aujourd'hui devenu au contraire un danger pour eux. C'est de lui maintenant qu'elles devraient être protégées. La théologie musulmane leur offre une exemption de toute pratique religieuse qui peut mettre en péril leur sécurité ou leurs chances de survie. C'est évidemment le cas du hijab. Il est devenu à coup sûr une entrave à leur survie et même une menace à leur intégrité physique. Le Coran n'a-t-il pas dit « Et ne vous jetez pas par vos propres mains dans la destruction » sourate II, verset 195 ?

Pour le niqab ou le voile intégral, il faut cesser de le défendre socialement ou de le légitimer religieusement. Les deux positions sont choquantes. Le défendre sous le prétexte des libertés religieuses est même plus choquant que de le porter. Au-delà des considérations théologiques très complexes, les islamistes salafistes en le défendant et en l'imposant cherchent à manifester ses incidences politiques, sociales et économiques pour provoquer les sociétés démocratiques. Leurs alliés gauchistes, souvent sans le savoir, ne réalisent pas leur complexité non plus.

Pour s'engager dans la réforme de l'islam et dans la résistance à l'islamisme, il faut inviter les autorités publiques à interdire le niqab pas seulement dans les institutions étatiques, mais partout dans l'espace public. Il faut aussi les rassurer en leur expliquant qu'en l'interdisant, elles ne briment aucune liberté religieuse d'aucune manière, car ce code vestimentaire n'a rien à voir avec l'islam. Le niqab est une tradition tribale, mais pas une obligation religieuse. Il n'y a aucun texte religieux en islam qui le légitime.

Il est une tradition bédouine qui au départ était un moyen de se protéger des tempêtes du désert, mais aussi des regards des étrangers, un aspect d'une extrême importance dans une société tribale. Il s'est urbanisé ensuite chaque fois que les pouvoirs centraux des civilisations musulmanes s'affaiblissaient et n'était pas en mesure de protéger ses sujets éloignés des possibles abus de pouvoir des autorités locales insubordonnées. Pour l'époque moderne, vers la fin de l'Empire Ottoman, les gouverneurs des provinces arabes éloignées de la sublime porte sous l'effet de l'affaiblissement du pouvoir central ont commencé à kidnapper les belles femmes dans les rues ou de chez leurs familles. Comme le hijab, le niqab était donc devenu un mécanisme de défense de circonstances. L'islamisme de nos jours surtout sa variante salafiste s'en est emparé. Elle l'a islamisé pour continuer à justifier son sexisme, son antiféminisme et surtout sa volonté de contrôler la vie des femmes musulmanes dans les espaces musulmans. Les salafistes l'encouragent aussi en Occident pour narguer les pays occidentaux et empoisonner leurs vies sociales. De toute évidence, l'intégration et la réussite des musulmans occidentaux ne sont pas une de leur priorité.

Sans puiser dans ces dispositions historico-religieuses complexes, l'interdiction du niqab relève du bon sens sociopolitique. Sans s'aventurer non plus dans les impératifs sécuritaires qui malgré leur importance relèvent d'une analyse politico-juridique de deuxième degré, la question du niqab pose un véritable problème philosophique dès le départ. La condition rudimentaire de toute socialisation humaine implique l'accès à l'identité de son interlocuteur. Posée ainsi, la question n'est plus de l'ordre du religieux ou du culturel. Elle relève du minimum des prérequis pour toutes coexistences humaines, quelles que soient la culture et la religion qui y sont engagées. Après tout, si une femme a choisi de nier sa propre identité elle-même, je ne vois pas pourquoi nous en tant que société politiquement organisée devrions-nous lui reconnaitre les considérations sociales et politiques reconnues à nos autres concitoyennes « normalement ou habituellement » habillées. Il sera très difficile de lui octroyer les droits ou d'attendre d'elle de respecter les devoirs de la citoyenneté démocratique universellement reconnus, car nous ne savons même pas s'il s'agit toujours de la même personne en question.

Comment l'administration d'un État démocratique peut-elle garantir les droits d'une personne ou la contraindre à respecter ses obligations alors qu'elle n'a aucun moyen de s'assurer de l'identité de la personne elle-même ? J'imagine que les islamistes, pour riposter à ce type de réflexion, avec leur simplisme philosophique habituel, vont nous sortir la possibilité d'accréditer une femme pour s'assurer de l'identité de la femme musulmane voilée intégralement. Par de telles propositions, ils nous renverront encore une fois au problème des accommodements. En revanche, le problème dans ce cas-ci dépasse le simple accommodement, il s'agit quasiment d'une adaptation totale du fonctionnement de l'appareil de l'État pour accommoder une poignée de femmes. Il ne s'agit pas seulement d'une exemption de l'universalité de la norme étatique, il s'agit plutôt d'une quasi-privatisation de l'État.

Accréditer une femme pour s'assurer de l'identité des femmes intégralement voilées non seulement déstabilisera le travail de l'administration publique, mais nécessitera à coup sûr une logistique extrêmement complexe et sans doute très couteuse, car il va falloir le faire dans les hôpitaux, les services d'immigration, dans les universités, dans les aéroports, bref partout ou un rapport entre le citoyen et l'administration publique est envisageable. Une telle mobilisation des ressources publiques ne pourra qu'alimenter l'hostilité, la haine et le rejet envers nous, les musulmans du Québec, car même si nous ne sommes pas d'accord avec de telles demandes nous en serions associés un peu malgré nous. Il faut donc cesser de se retrancher derrière les libertés publiques pour les détourner dans la défense du niqab. Il faut s'en dissocier clairement et le condamner explicitement.

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Avril 2018

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