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S'engager contre l'islamisme ne peut que servir les musulmans au Québec et ailleurs

Même s'il y a du racisme au Québec, il n'est pas vrai que le Québec est dans son ensemble une société raciste ou islamophobe.
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La sympathie que de nombreux Québécois, de tous les horizons politiques, ont témoignée à l'égard du deuil de la diaspora musulmane québécoise au lendemain de la tuerie de la Mosquée de Québec est allée au-delà des positions du « politiquement correct » pour exprimer une réelle solidarité. Même s'il y a du racisme au Québec, il n'est pas vrai que le Québec est dans son ensemble une société raciste ou islamophobe.

Pour répondre à ce message de solidarité que le Québec nous a envoyé, nous devons en tant que musulmans nous comporter avant tout en tant que citoyens, pas en tant que croyants. Cet exercice commence par reconnaitre que notre culture traverse une crise profonde d'une extrême gravité. Il faut sortir la tête du sable et affronter la réalité de notre monde moderne. Sans minimiser l'effet des politiques occidentales sur les injustices qui touchent l'espace de l'islam partout dans le monde, il est grand temps que nous nous remettions en question et que nous cessions d'accuser constamment les autres pour les malheurs qui nous frappent. Il est plus qu'urgent de sortir de cette logique de victimisation sclérosée et inutile, voire contreproductive. Jouer le rôle de l'éternelle victime ne fera pas avancer nos causes ni arrêter les injustices qui nous frappent partout dans le monde. Les tensions que nous vivions avec nos sociétés d'accueil sont très profondes et d'une extrême sensibilité. Toutes les statistiques sur ce sujet démontrent que les musulmans sont le groupe ethnoreligieux le moins apprécié au Québec. Pour être plus clairs et plus francs avec nous-mêmes et avec les autres, ayons le courage de dire la vérité comme elle est, sans diplomatie ni maquillage. Les musulmans sont le groupe culturel le plus haï au Québec. Un problème d'une telle sensibilité et d'une telle complexité ne peut pas être seulement la responsabilité d'attitudes racistes ou xénophobes chez une minorité de Québécois. Il ne résulte pas uniquement des résidus de mensonges propagés par les pouvoirs coloniaux pendant des siècles sur l'islam.

Cette prise de conscience doit commencer par un positionnement fort et intransigeant face à l'islamisme, toutes tendances confondues. Elle doit aussi commencer par reconnaitre que la crise de notre culture est d'une étendue et d'une dangerosité telle qu'elle mérite d'être comprise et évaluée à sa juste mesure. Il faut que nous cessions de faire comme si elle n'existait pas ou qu'elle est seulement, comme le prétend l'islamisme, une construction produite par la haine obsessionnelle de l'orientalisme occidental. Ce simplisme déterministe est non seulement stérile, mais aussi trompeur, car c'est lui qui nous inspire cette posture de l'éternel musulman persécuté. Cette posture, avec tous les raccourcis intellectuels qui la fondent, est complètement improductive. Elle ne fait qu'aggraver nos problèmes, car quand un groupe social n'est pas apprécié dans une société, le reste de son environnement social est souvent indifférent à sa souffrance. Il faut donc regagner la confiance de la société québécoise et regagner son appréciation pour regagner son empathie.

Ce processus commence par prendre conscience que l'islamisme est la manifestation la plus dangereuse de la crise que traverse la culture musulmane aujourd'hui. Il est donc impératif, nécessaire et urgent non seulement de prendre ses distances face à lui, mais de le dénoncer clairement, et de s'engager activement dans les combats qui lui résistent. L'islamisme est une idéologie culturellement fasciste, politiquement totalitaire et socialement intolérante. C'est une philosophie politico-religieuse décomplexée qui équivaut et qui dépasse même dans certains cas, par sa fermeture, par son dogmatisme et par sa violence tous les totalitarismes qu'a connus l'histoire humaine jusqu'à maintenant. Pour éviter les généralisations dangereuses, il faut rappeler constamment qu'elle est très minoritaire et qu'elle ne représente en aucun cas l'ensemble des musulmans. Mais son statut minoritaire n'empêche pas qu'elle soit extrêmement dangereuse. Elle est porteuse d'un islam conquérant, envahisseur et violent, car dé-historicisé, décontextualisé, mais surtout déterritorialisé et qui ne reconnait pas les frontières. L'islam que défend l'islamisme et qu'il cherche à promouvoir partout dans le monde est l'islam médiéval. C'est un islam marqué par les croisades, par leur haine, et par leur violence religieuse. À cause du contexte historique de l'époque des croisades, c'est un islam puriste, rancunier, revanchard et guerrier. C'est ce caractère médiéval qui explique l'omniprésence du redoutable théologien hanbalite ultraconservateur et ultra-radical, Ibn Taymiyya, dans la littérature de l'islamisme et dans les prêches des islamistes. C'est cette dé-historicisation dangereuse qui fait de l'islamisme d'aujourd'hui une idéologie suprémaciste et insoluble dans la plus rudimentaire des formes du pluralisme démocratique moderne. Elle est un danger pour l'islam et pour les musulmans eux-mêmes avant d'être un danger pour les autres. L'islam politique, toutes tendances confondues, est ontologiquement anti-démocratique pour la simple raison qu'il réduit les êtres humains à leur identité religieuse tout en continuant à croire que sa foi est la meilleure, que son Dieu est le plus vrai, car les dieux des autres sont des idoles, et que ceci lui donne des droits supérieurs aux autres humains, qu'il déteste et qu'il méprise. Aucune autre conception du monde n'est légitime dans les espaces où il est majoritaire et qu'il contrôle.

Dans la même logique, paradoxalement, ce même suprématisme idéologico-religieux lui donne le droit de s'exprimer et de revendiquer des droits dans les espaces où il est minoritaire. Sa façon hégémonique et suprémaciste de construire l'altérité lui donne la liberté de tout se permettre et de croire que rien ne peut ni ne doit lui être refusé. Pourtant, quand il est majoritaire ou dominant, il refuse aux autres les droits qu'il revendique lorsqu'il est minoritaire. L'islamisme est en grande partie responsable des blocages des sociétés arabo-musulmanes. Il suffit de contempler l'état des pays où ce fascisme politico-religieux est actif. Là où les islamistes sont passés, il n'y a que destruction, oppression, chaos et horreur. Il faut dire qu'en Occident la logique du pluralisme démocratique l'a aidé dans cette entreprise, mais elle n'est pas la seule. Certaines tendances de la gauche occidentale qui ne comprennent pas la spécificité idéologique et historique de l'islamisme ont aussi facilité la propagation de cette version radicale de l'islam.

Le Québec et l'Occident après lui n'ont pas à payer pour les déchirements idéologiques, confessionnels et religieux qui secouent le monde arabe et le monde musulman.

Dans tous les cas, en tant que diaspora musulmane, notre dénonciation et notre condamnation du terrorisme que l'islamisme pratique au nom de l'islam, avec le conditionnement idéologique qui le prépare ou qui le justifie, doivent être catégoriques et sans réserve. Il faut s'inspirer de l'attitude des Québécois après les attentats du 29 janvier 2017. À part quelques esprits égarés, aucun Québécois n'a essayé de légitimer le geste de Bissonnette. La société québécoise dans son ensemble l'a condamné fermement. Alexandre Bissonnette est sans doute le produit d'une atmosphère de haine, parfois gratuite et surtout très inquiétante en Occident contre l'islam. Son geste a été rendu possible par les dérapages médiatiques et politiques qui ont caractérisé le débat autour de la présence musulmane au Québec depuis la commission Bouchard-Taylor. En revanche, il faut reconnaitre aussi qu'il est une réponse à cet islamisme conquérant et envahisseur. Le Québec et l'Occident après lui n'ont pas à payer pour les déchirements idéologiques, confessionnels et religieux qui secouent le monde arabe et le monde musulman. Nos sociétés d'accueil nous ont généreusement offert une chance de vivre en paix et en sécurité. Il ne faut pas permettre à l'islamisme d'importer avec nos souffrances les ingrédients des conflits que nous avons laissés derrière nous.

Prendre de la distance avec l'islamisme, le condamner et le dénoncer ne peuvent que servir notre intégration. Cette prise de position ferme face à son projet obscurantiste, face à son discours de haine et face à ces crimes odieux et barbares ne peut que servir les causes justes des musulmans partout dans le monde. Il ne faut pas avoir peur des islamistes. C'est cette peur qui sert leur agenda moyenâgeux et criminel. Elle détruit en même temps nos chances de s'épanouir dans nos sociétés d'adoption. Garder le silence face à sa barbarie dont les dernières victimes étaient de jeunes adolescents londoniens à peine sortis de l'innocence de l'enfance qui n'ont commis comme crime que l'amour de la musique, c'est l'encourager implicitement à continuer dans cette voie sanguinaire. En plus de son caractère inhumain, cette violence n'est qu'une absurdité stratégique, car elle n'avance en rien les causes musulmanes. Bien au contraire, elle ne fait que les discréditer. Se taire face au mal absolu que l'islamisme radical incarne peut être interprété comme une complicité silencieuse. Il est donc grand temps pour que les musulmans aux Québec et partout en Occident se dressent contre l'islamisme. Malgré les risques, d'ici du Québec, nous ouvrons la marche.

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Mai 2017

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