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Le Vernet, mon village un an après le crash de la Germanwings

Le 24 mars 2015, un Airbus de la Germanwings s'écrasait dans un massif des Alpes-de-Haute-Provence.
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Le 24 mars 2015, un Airbus de la Germanwings s'écrasait dans un massif des Alpes-de-Haute-Provence, entre Digne et Barcelonnette. Le crash, provoqué par le copilote ayant délibérément précipité l'appareil contre la montagne, a plongé dans le deuil 149 familles et provoqué un vif émoi dans les communes de Barles, Le Vernet et Seyne à proximité desquelles il s'est produit.

Près d'un an a passé. Déjà... Il me semble pourtant que c'était hier qu'en cette fin d'après-midi pluvieuse, je me trouvais soudainement confronté à une scène inimaginable. Celle d'un appareil totalement pulvérisé contre la montagne. Il m'est d'abord impossible de croire qu'un tel drame ait pu se produire ici. Comment un avion de 40 mètres d'envergure, pesant plusieurs dizaines de tonnes, peut-il se trouver réduit à ces débris minuscules dispersés sur plusieurs hectares contre la paroi? Comment a-t-il pu passer entre les montagnes pour arriver jusqu'au fond de cet étroit vallon?

Ma première vision est celle de petites colonnes de fumée s'élevant dans le gris du ciel. Devant moi, un bout d'empennage disloqué. Juste au-dessus, une roue intacte est accrochée à la paroi. Un peu plus haut, je distingue trois hublots arrachés à la carlingue. J'imagine alors la dernière vision d'horreur des passagers qui se trouvaient à bord. En pensant à eux, aux familles qui les avaient laissés à Barcelone, à celles qui les attendaient à Düsseldorf, je finis par réaliser l'ampleur du drame qui s'est déroulé ici quelques heures plus tôt.

J'en suis encore profondément bouleversé au moment où je reprends le même long chemin qui, il y a un an, me conduisait vers cette scène d'apocalypse. Longtemps fermée pour les besoins de l'enquête et la dépollution du site, la zone est désormais rouverte. Sur la piste qui monte vers le col de Mariaud, je croise quelques randonneurs en raquettes. Il n'y a plus personne lorsque j'emprunte l'étroit sentier qui descend en lacets vers le vallon au-dessus duquel l'avion s'est écrasé.

En repensant à la scène que j'avais sous les yeux un an plus tôt, il me semble que l'Airbus de la Germanwings a été avalé par la montagne. Les seules traces que je découvre dans l'épaisse couche de neige tombée quelques jours plus tôt sont celles de lièvres, renards et sangliers; il me semble reconnaitre le passage d'une meute de loups. En sortant d'un bois de mélèzes, je rejoins la large piste ouverte peu après la catastrophe pour permettre l'accès au site. Puis, m'enfonçant jusqu'aux genoux, je me dirige vers la paroi contre laquelle l'avion s'est écrasé. Tout en bas, une barrière a été mise en place.

Des gerbes de fleurs et des messages griffonnés sur des morceaux de papier y ont été accrochés par les familles des victimes. Solidement planté face à la robine, une croix en bois portant le nom d'un passager polonais. Je n'irai pas plus loin. Dans le silence de la montagne, je reste un long moment immobile, avec pour seule présence celle d'un aigle qui un long moment tourne au-dessus des bois. Seule mon ombre dans la neige m'accompagne. La chaîne de la Blanche se détache en dentelles blanches sous un ciel d'un bleu intense.

Malgré le terrible drame qui s'est déroulé ici il y a un an, j'éprouve alors un sentiment de totale sérénité. Comme si d'autres ombres, celles des 149 passagers et membres d'équipage du vol U9525 de la Germanwings s'élevaient avec l'aigle qui maintenant repart dans un vol magistral vers les sommets enneigés de mes montagnes. Comme tous les habitants de la vallée, plus jamais je ne pourrai les voir comme avant.

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