Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Haïti : 18 mai, fête du Drapeau!

C'est le jour où les Haïtiens d'alors, tous rangés derrière un objectif commun, ont pris la décision de se défaire à tout jamais des chaines de l'esclavage, de briser les liens de la servitude, de secouer le joug de l'asservissement, de s'affranchir, de s'émanciper de la tutelle française et de se donner un pays.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Le 18 mai est la date de la fête du drapeau haïtien.

C'est une date importante dans l'Histoire d'Haïti et dans l'Histoire du monde. C'est une source de fierté et de consolation pour chaque Haïtien, pour celui qui vit en Haïti et pour celui qui vit à l'extérieur du pays. Elle est une source de fierté en ce sens que les Haïtiens ont réussi l'impossible, l'impensable et l'inimaginable. Ils ont, quoiqu'inférieurs en nombre et en armements, réussi à mettre en déroute les forces armées de la France colonialiste et ont tenu en échec des militaires expérimentés qui ont suivi Napoléon un peu partout en Europe et en Afrique, notamment en Égypte. L'Haïtien porte en lui cette fierté que rien ne saurait lui enlever. Elle est une source de consolation en ce sens que, en dépit du spectacle de désolation qu'offre le pays, l'espoir n'est pas perdu.

Le 18 mai, lors du Congrès de l'Arcahaie, un accord a été réalisé, qu'un pacte a été conclu et que la décision a été prise de faire un pays, de former une nation, de se libérer à tout jamais du joug français et de créer un drapeau qui désormais, lorsqu'il flotterait dans l'azur, rappellerait aux Haïtiens la bravoure de leurs aïeux, le courage de leurs ancêtres et les prouesses de ceux qui sont morts en martyrs. Qui leur rappellerait que des hommes et des femmes, toutes couleurs confondues, ont donné leur vie en sacrifice afin que les Haïtiens puissent vivre librement et souverainement sur un territoire qui leur appartient, sur un sol où ils sont les seuls et uniques maîtres, sur une terre qui est à eux, dans un pays où ils sont citoyens à part entière et où leurs droits sont reconnus et respectés.

Les différents leaders indépendantistes ont compris que, pour faire avancer la cause de la liberté et arriver à l'indépendance, il leur fallait mettre de côté leurs différends, leurs querelles et leurs rivalités, leurs divergences de vues ou leur appartenance sociale et se ranger derrière un objectif commun. Il leur fallait se donner un leader unique, un généralissime, quelqu'un qui est capable de mener la lutte, de conduire le peuple à la liberté et à l'indépendance, de forger une nation et de lui faire prendre la place qui lui revient dans le concert des nations en tant que peuple souverain et libre au même titre que tous les autres. «Du sol, soyons seuls maîtres», tel était leur leitmotiv.

Et comme acte symbolique, on crée le Drapeau haïtien à partir du drapeau tricolore français. Du bleu, du blanc et du rouge, on retire en le déchirant la partie blanche symbolisant les Français, et des deux extrémités, bleu et rouge, cousues ensemble nait le Drapeau bicolore. Plus tard seront ajoutées les armoiries de la République et la désormais célèbre devise : «L'Union fait la force». Ce drapeau haïtien devient le symbole de la lutte pour une indépendance totale, pleine et entière. La séparation avec la France est consacrée. Un pas décisif a été franchi. Impossible de revenir en arrière. La lutte pour l'autonomie et l'égalité avec les Français se transforme en guerre d'indépendance. Dans le Fort, en présence des insurgés, Jean-Jacques Dessalines, le Général en Chef, place tout le monde devant un choix. Il prononce les mots suivants : «Que ceux qui veulent redevenir esclaves des Français sortent du Fort, mais que ceux qui veulent mourir en hommes libres se rangent autour de moi.» Personne ne quittera le Fort, la ferveur y étant à son comble. La conscience d'une victoire possible et la perspective d'un destin nouveau, celui d'une nation libre, d'un État souverain ou d'un pays indépendant ont galvanisent l'assistance et transforment les motivations des insurgés en déterminations, dans une atmosphère assurément fébrile, mais néanmoins solennelle.

Cette indépendance sera obtenue six mois plus tard, jour pour jour, soit le 18 novembre 1803. L'armée française capitule, le Général Rochambeau signe la reddition des forces françaises et conclut un accord pour le retrait de ce qui reste de l'armée napoléonienne. Saint-Domingue» deviendra désormais «sol haïtien» dans les jours qui suivent. L'indépendance proclamée le 1er janvier 1804, Haïti devient la première République «noire» du monde, le premier État à être né d'une révolte victorieuse d'esclaves, le deuxième État indépendant de l'Amérique et le troisième État au monde, après les États-Unis et la France, à avoir acquis son indépendance au terme d'une longue guerre de libération.

Le 18 mai 1803 est à l'origine d'événements qui vont à tout jamais changer le cours de l'Histoire et amener les États et les législateurs à revoir et élargir leur conception des droits de l'homme, du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et à redéfinir les principes du droit international. Lorsque pour la première fois de l'Histoire, dans la France révolutionnaire, on a adopté la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dont le premier article disait ceci : «Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commue», la traite d'esclaves battait son plein dans les colonies et notamment à Haïti, alors Saint-Domingue, la plus riche et la plus prospère des colonies françaises. On comprend très bien que la définition attribuée au mot «homme» n'inclut pas «le noir», «l'Africain» ou l'autre. Elle était restrictive et limitée aux Européens et aux blancs seulement.

L'indépendance d'Haïti a auguré une nouvelle ère dans les relations internationales et annoncé l'entrée prochaine sur la scène internationale d'un nouveau pays, un État essentiellement composé d'Africains déportés et de leurs descendants qui ont brutalement arraché à la France leur liberté, proclamé leur indépendance et créé dans l'Histoire un précédent.

L'indépendance d'Haïti a auguré une nouvelle ère dans les relations internationales et annoncé l'entrée prochaine sur la scène internationale d'un nouveau pays, un État essentiellement composé d'Africains déportés et de leurs descendants qui ont brutalement arraché à la France leur liberté, proclamé leur indépendance et créé dans l'Histoire un précédent. En viendront ensuite d'autres avec lesquels il faudrait désormais compter et nouer des relations diplomatiques.

Cette date, par les événements qui se sont produits, a joué un rôle de catalyseur. À l'instar d'Haïti qui s'est libérée de la domination française, les autres peuples, encore aux prises avec l'esclavage, vont vouloir réaliser pour eux-mêmes et par eux-mêmes leur propre libération. La Révolution haïtienne a donné le coup d'envoi des révolutions à venir. L'exemple de Dessalines et des autres révolutionnaires haïtiens, Toussaint Louverture en tête, sera suivi par tous ceux qui rêvent de réaliser la liberté de leur peuple. En Amérique du Sud, Simon Bolivar, dit le «Libérateur», s'est donné la mission d'amener les colonies espagnoles d'Amérique latine à l'indépendance. Subissant des revers et en fuite, il sera aidé par la jeune nation haïtienne qui l'abritera pendant quelque temps, lui fournissant argent, munitions et soldats pour qu'il puisse poursuivre la lutte. On en connait la suite. Les années qui suivent verront l'indépendance des colonies latino-américaines, c'est-à-dire les colonies espagnoles, dont la Bolivie, la Colombie, L'Équateur, le Panama, le Pérou et le Venezuela.

Somme toute, le 18 mai est une date importante, unique et pleine de signification dont la portée déborde le cadre national pour se placer parmi les dates les plus marquantes de l'Histoire du monde. Cette date n'est pas uniquement la commémoration du drapeau haïtien. Ses conséquences sont extraterritoriales et géopolitiques. C'est la fête de l'émancipation et de la liberté. C'est la fête de tous, de tous les amoureux de la fraternité humaine, les combattants de la liberté et les défenseurs des droits humains, ceux de l'homme, de la femme, des enfants, des minorités et du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Le 18 mai est un appel à la cohésion, à la coopération, à la solidarité et surtout à l'unité, comme nous le rappelle la devise haïtienne : «L'union fait la force». C'est le jour où les Haïtiens d'alors, tous rangés derrière un objectif commun, ont pris la décision de se défaire à tout jamais des chaines de l'esclavage, de briser les liens de la servitude, de secouer le joug de l'asservissement, de s'affranchir, de s'émanciper de la tutelle française et de se donner un pays. C'est cet appel à l'unité qui mène à la liberté que la date du 18 mai commémore. Voilà pourquoi les Haïtiens et les Haïtiennes sont fiers de cet héritage et que, en tout lieu, en Haïti comme à l'étranger, ils commémorent la date du 18 mai et célèbrent cette merveilleuse fête du drapeau !

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.