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Les États-Unis votent des sanctions contre l'Iran au pire moment

La Chambre des représentants du Congrès américain a voté en faveur de nouvelles sanctions contre l'Iran. Ce vote survient quatre jours avant l'inauguration du nouveau président iranien, Hassan Rouhani, et il envoie un signal envoyé très négatif aux Iraniens alors que ces derniers ont choisi le candidat modéré, ouvert au rapprochement avec les États-Unis et l'Occident.
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Mercredi, la Chambre des représentants du Congrès américain a voté (400 pour, 20 contre) en faveur de nouvelles sanctions contre l'Iran. Ce vote survient quatre jours avant l'inauguration du nouveau président iranien, Hassan Rouhani. Bien que ce projet de loi doive être voté par le Sénat en septembre, le signal envoyé aux Iraniens est très négatif. Alors que ces derniers ont choisi le candidat modéré et ouvert au rapprochement avec les États-Unis et l'Occident, les espoirs de trouver une solution diplomatique au conflit sur le programme nucléaire renaissaient. Malheureusement, face à cette volonté d'ouverture la réponse du Congrès américain est de sanctionner davantage les exportations pétrolières de l'Iran d'un million supplémentaire de barils par jour sur une période d'un an.

L'Iran et les 5+1 - les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU (France, États-Unis, Grande-Bretagne, Chine et Russie) plus l'Allemagne - vont entrer dans une nouvelle phase de négociation concernant le programme nucléaire de Téhéran. Pour rappel, l'Iran n'a pas d'arme nucléaire, ni les moyens de s'en fournir, mais les 5+1 et l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ont des inquiétudes concernant une possible diversion militaire du programme. Pour résoudre la question, l'Iran et les 5+1 se rencontrent régulièrement pour tenter de résoudre les différents. L'Iran connait certainement le plus lourd régime de sanctions jamais imposé et les capacités d'enrichissement d'uranium de la République islamique augmentent au rythme de ces sanctions (l'Iran a besoin d'uranium enrichi pour son programme civil, mais des doutes persistent chez les 5+1 - principalement les États-Unis et l'Europe).

Le vote de la chambre basse du Congrès américain s'oppose à la volonté de l'administration Obama de laisser une chance au nouveau président iranien. Voter des sanctions avant même que Hassan Rouhani, qui connait parfaitement le dossier du nucléaire puisqu'il était le chef négociateur de 2003 à 2005, envoie un signal qui rend la tâche encore plus difficile. Car il faut bien comprendre qu'il existe des législateurs en Iran qui s'opposent à des pourparlers avec les États-Unis et qui ont une mentalité de ce qu'ils appellent «résistance face à l'oppresseur». Par conséquent, si les législateurs américains ne sont pas ouverts au vote du peuple iranien qui a élu le seul candidat appelant à «la paix et la réconciliation», la modération et à un rapprochement avec l'Occident (en d'autres termes, tout le contraire de la politique provocatrice du président sortant Mahmoud Ahmadinejad), les États-Unis risquent de manquer le coche.

Parmi les 20 Représentants au Congrès américain qui ont voté contre, le démocrate Jim McDermott parle d'un «signe dangereux que nous envoyons et cela limite notre capacité à trouver une solution diplomatique concernant les armes nucléaires en Iran». Le National Iranian American Council (NIAC), une organisation non-partisane à but non lucratif basée à Washington, déplore le vote en faveur de nouvelles sanctions en rappelant les efforts menés par des dizaines d'anciens diplomates, officiels miliaires, experts ainsi qu'une lettre signée par 131 membres du Congrès appelant à «revigorer la diplomatie» pour résoudre le conflit.

Pourtant, depuis l'élection de Rouhani le 14 juin, les signaux envoyés par l'Iran ont été très positifs. Parmi ces signaux, l'ancien ambassadeur de la République islamique d'Iran aux Nations-Unis, Javad Zarif, vient d'être nommé au poste de ministre des Affaires étrangères par le président Rouhani. Zarif a eu son Doctorat aux États-Unis, il y a vécu plusieurs années et il connait parfaitement les inquiétudes et perceptions des Américains sur l'Iran. Par ailleurs, il est bien connu des diplomates américains et il est décrit comme la personne la plus à même de créer ce rapprochement souhaité par le Président Rouhani lors de la campagne électorale et la conférence de presse suivant son élection. En réponse à cette ouverture, le Congrès américain s'oppose à l'appelle à la modération choisie par le peuple iranien, aux gestes d'ouvertures de Rouhani (avant même son inauguration) et enfin à la volonté du Président Obama et de son administration de résoudre les différents de manière pacifique et diplomatique (Obama souhaitait ne pas imposer davantage de sanctions pour laisser une chance à Rouhani).

Hassan Rouhani, qui sera inauguré dimanche 4 août et qui a fait le geste inédit depuis 1979 d'envoyer des invitations à tous les pays occidentaux en geste d'ouverture, devra faire face aux plus conservateurs en Iran. Ces derniers protestent déjà contre la présence de l'ancien président Réformateur Mohammad Khatami à l'inauguration. Si l'objectif du Congrès américain est la résolution pacifique du conflit sur le programme nucléaire - chose qui est remise en question par de nombreux législateurs iraniens, des membres des Gardiens de la Révolution et le Guide suprême l'Ayatollah Ali Khamenei - ce vote ajoute déjà une pression supplémentaire sur Rouhani qui devra gérer politiquement les forces qui s'opposent à un rapprochement entre l'Iran et l'Occident (principalement les États-Unis).

Le président de NIAC, Trita Parsi, rappelle que «comme nous l'avons vu avec l'Irak, les sanctions sont souvent la voie vers la guerre et le leadership du Congrès [américain] doit changer de cap au plus vite pour que la diplomatie soit un succès». Avec ce vote, le message du Congrès américain envoyé à l'Iran n'est pas celui de la volonté d'une résolution diplomatique du conflit, mais plutôt celui d'une dernière opportunité d'imposer des sanctions qui seront plus difficiles à justifier lorsque le président modéré Rouhani sera en place.

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