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Accord sur le nucléaire iranien: le respect mutuel parle plus que la fermeté

La diplomatie occidentale doit reconnaitre que le président Ahmadinejad n'est plus là. Elle doit entendre la parole des Iraniens qui, par leur vote massif en faveur du modéré Rouhani, n'accepte pas ce langage politique improductif de fermeté. Aucun peuple fier ne l'accepterait. Nous, Occidentaux, ne l'accepterions pas non plus.
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Un accord intérimaire sur le nucléaire iranien « n'est possible que sur une base de fermeté ». Voici les mots du ministre des Affaires étrangères français Laurent Fabius au matin des nouvelles négociations avec l'Iran. Son homologue iranien, Monsieur Zarif, parle lui de respect mutuel et de dignité.

Le respect mutuel, la dignité, la modération, l'engagement et la volonté de retrouver de meilleures relations avec l'Occident étaient les valeurs du programme de campagne du président Hassan Rouhani. C'est ce même programme qui représente les attentes des Iraniens (lorsqu'ils ont mis leur bulletin de vote dans les urnes, 51% des électeurs ont choisi Rouhani). C'est ce programme qui porte la voix des Iraniens dans le monde.

Face à de telles attentes, le ministre des Affaires étrangères de la France répond aux Iraniens que seule « une base de fermeté » rendra possible un accord sur le nucléaire. C'est à se demander si le chef de la diplomatie française mesure l'ampleur de ses mots, surtout dans ce moment crucial.

Le peuple iranien est comme tout autre peuple : il veut qu'on respecte sa fierté et sa dignité. Que dirions-nous en Occident si le ministre des Affaires étrangères de l'Iran nous imposait une politique du bâton et de la carotte ? Une politique ou un peuple entier devrait accepter la menace ferme des coups de bâtons (sanctions).

L'Union européenne et les États-Unis ont adopté cette politique de sanctions paralysantes qui s'associent avec des négociations, certes. Cependant, lorsqu'il s'agit de diplomatie, il faut savoir utiliser un langage de diplomate lorsque notre volonté est de signer un accord, et éviter un échec.

Le président conservateur et provocateur Mahmoud Ahmadinejad n'est plus, à la grande satisfaction de l'immense (voir la quasi-totalité) du peuple Iranien. Son successeur, Hassan Rouhani, est un modéré. Ses qualités de diplomate sont reconnues par l'ensemble des diplomates, dont les ministres des Affaires étrangères des nations européennes.

De 2003 à 2005, ces derniers avaient fait un travail diplomatique remarquable aux côtés d'Hassan Rouhani qui dirigeait alors les négociations sur le dossier du nucléaire (sans confrontation). Ces négociations ont finalement échoué lors de la défaite du camp réformateur à l'élection présidentielle de 2005, grand perdant face au conservateur Mahmoud Ahmadinejad. Ce fut un coup terrible pour les négociations. Un rapport de force s'est créé. Les sanctions contre l'Iran n'ont fait qu'augmenter de manière spectaculaire. Les capacités d'enrichissement de l'uranium de Téhéran ont progressé au même rythme.

La diplomatie occidentale, notamment la France, doit reconnaitre que le président Ahmadinejad n'est plus là. Elle doit entendre la parole des Iraniens qui, par leur vote massif en faveur de la modération et l'engagement avec l'Occident, n'accepte pas ce langage politique improductif de fermeté. Aucun peuple fier ne l'accepterait. Nous, Occidentaux, ne l'accepterions pas non plus.

Les négociations sur le nucléaire doivent aboutir à des résultats positifs, à des avancées. La France a son indépendance et sa souveraineté, mais elle doit s'aligner avec ses partenaires membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU afin de garantir un accord intérimaire. Les bases d'un tel accord sont réversibles, ce qui signifie qu'il y aura possibilité de revenir en arrière en cas de manquement.

Un échec des négociations serait un grand risque puisque la pression deviendra énorme, surtout pour Barack Obama qui, aux côtés de John Kerry et Joe Biden, mène un combat très difficile pour empêcher le Sénat américain de voter pour de nouvelles sanctions qui saboterait les négociations. De nouvelles sanctions feraient sans doute quitter l'Iran de la table des négociations.

À ce niveau, davantage de sanctions signifieraient davantage de capacité d'enrichissement de l'uranium ainsi que la fin de l'option diplomatique. La corde raide cassera et l'option miliaire sera une catastrophe pour tous. Nous aurions donc une sortie perdant-perdant au lieu d'un accord gagnant-gagnant.

Enfin, il ne faut pas mélanger les différentes crises. Il faut rester concentré sur le dossier du nucléaire. Les dernières remarques du Guide suprême Ali Khamenei au sujet du récent voyage de François Hollande en Israël ne doivent pas désaxer l'effort diplomatique sur la crise du nucléaire.

Sortir de cette crise permettra de déverrouiller d'autres problèmes : les crises régionales (Syrie, Iraq, Afghanistan, Yémen, Liban et autres), mais également la question des Droits de l'homme en Iran qui souffre de « l'atmosphère sécuritaire » présente en Iran ; atmosphère sécuritaire qui - pour reprendre les mots de Rouhani - doit « cesser ».

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Avril 2018

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