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Pourquoi je ne remercierai jamais assez les infirmières

En plus de leur expertise médicale, elles apportent la touche d'humanité nécessaire au monde froid et stérile des hôpitaux. Les médecins font de grandes choses, mais ils ont tant à faire qu'ils ne peuvent rendre visite à chaque patient qu'une fois par jour...
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Aujourd'hui, alors que je prenais un repas rapide dans un restaurant mexicain, je me suis retrouvé attablé à côté d'infirmières. Tandis qu'elles étaient en train de bavarder, je me suis surpris à repenser à toutes les infirmières auxquelles ma famille avait eu affaire ces dernières années et j'ai éprouvé une gratitude profonde pour tout ce que ces femmes - et ces hommes - formidables font pour nous.

C'est d'abord au Service de néonatalogie et de soins intensifs (SNSI) que j'ai pu constater à quel point ces infirmières étaient extraordinaires. Mon premier enfant, Maddie, est née avec presque douze semaines d'avance, et l'équipe hospitalière l'a envoyée d'urgence au SNSI en raison de ses poumons immatures. Là-bas, Maddie s'est retrouvée entre la vie et la mort et bien qu'il nous tardait à ma femme Heather et moi, de prendre soin de notre fille, son état ne nous le permettait pas. Nous avons donc dû faire confiance aux infirmières du SNSI pour prendre soin de notre bébé, et ça a été particulièrement éprouvant, surtout la nuit, quand nous devions rentrer chez nous pour rattraper quelques heures de sommeil.

Dormir était bien sûr impossible. Je n'étais pas aux côtés de mon enfant malade et je sentais peser la menace du téléphone sur la table de nuit. S'il sonnait avant l'aube, ça ne serait que pour une seule raison : nous annoncer la mort de Maddie. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point j'étais terrorisé à l'idée qu'il se mette à sonner. Heureusement, ça n'est jamais arrivé.

Chaque matin, j'appelais le SNSI à 7 heures pour apprendre de l'infirmière comment s'était passée la nuit de Maddie, et ce temps d'attente avant qu'elle ne décroche était terrible. Allait-on me dire qu'elle avait passé une mauvaise nuit et que les choses ne se présentaient pas bien ? Et si jamais l'infirmière tardait à me répondre, cela voulait-il dire qu'elle et le reste de l'équipe médicale étaient justement en train de se battre pour stabiliser l'état de Maddie (un spectacle auquel j'ai hélas assisté un certain nombre de fois) ? Croyez-moi, mes mains tremblaient à chaque fois que j'attendais que quelqu'un décroche.

Cependant, une fois que l'infirmière décrochait, je commençais en général à me sentir mieux. Même si elle venait d'achever une veille longue et épuisante, elle prenait toujours le temps de nous raconter en détail la nuit de Maddie. Les infirmières du service néonatologie n'ont jamais ménagé leurs efforts pour notre fille. On nous a ainsi raconté qu'une nuit, alors que Maddie ne répondait plus au respirateur artificiel, elle n'a survécu que grâce aux infirmières qui se sont relayées sans arrêt pour insuffler manuellement de l'air dans ses poumons, jusqu'à en avoir des crampes.

Si tous ces gestes sont incroyables, je suis surtout reconnaissant envers ces infirmières pour la façon dont elles ont aimé Maddie, la manière dont Maddie comptait pour elles. Elle n'était pas juste un bébé anonyme derrière les vitres d'une couveuse, couverte de cables, de sparadrap et de tuyaux respiratoires. Elle était une super petite fille appelée Maddie (surnommée aussi "Bunny" ou "Little Mama" par les infirmières), belle et forte. Je me rendais bien compte qu'elles trouvaient ma fille formidable, la considéraient comme un cadeau, et voir d'autres personnes ressentir la même chose que moi à son égard était, à mes yeux, fondamental.

Maddie a fini par pouvoir quitter le SNSI, mais durant les 17 mois suivants, il lui est arrivé plusieurs fois d'être atteinte par une infection et d'être réhospitalisée. Ces séjours à l'hôpital étaient à la fois effrayants et tristes, et encore une fois, les infirmières nous ont été d'un grand secours. Elles étaient toujours là pour nous, promptes à amener une couverture ou à nous expliquer la raison de tel ou tel traitement pour notre fille. Comme celles du SNSI, ces infirmières ont entouré Maddie de leur affection, la couvrant de compliments et lui faisant des grimaces pour la distraire.

Bien que cela soit toujours difficile à admettre, le 7 avril 2009, deux jours après avoir été hospitalisée pour une infection respiratoire, Maddie est décédée. En ce jour terrible, c'est encore une infirmière qui a passé tout son temps auprès d'Heather et je lui suis profondément reconnaissant de sa gentillesse envers ma femme. Une autre infirmière a beaucoup compté pour moi cette nuit-là, bien qu'elle ne se soit pas tenue à mes côtés, qu'elle ne m'ait pas apporté un verre d'eau, ni même adressé la parole. En fait, je ne crois pas l'avoir vue avant d'être sorti du service de soins intensifs pédiatriques (SSIP), mais elle a pourtant fait toute la différence.

Vous comprenez, ce jour-là, ma vie avait volé en éclat. J'avais vu ma fille mourir sous mes yeux et c'est une expérience si terrible que même encore aujourd'hui, elle me semble irréelle : est-ce que c'est vraiment arrivé? A moi et à ma famille ? Mais si, cela s'est vraiment produit, et je me rappelle surtout la façon dont je n'ai pas eu l'impression que les docteurs trouvaient Maddie belle, forte, ou incroyable, ni que c'était un cadeau. Peut-être que le médecin-chef était très stressé, mais la manière dont il a constaté son décès n'était pas appropriée. Il ressemblait à un arbitre mettant fin à un combat de poids lourds plutôt qu'à la vie d'une merveilleuse enfant. Ensuite, alors que nous tenions notre fille morte dans nos bras et l'embrassions pour lui dire au revoir, nous pouvions entendre derrière les rideaux les médecins discuter de ce qui s'était passé avec la froideur de mécaniciens débattant d'une voiture hors d'usage.

Ce n'est que lorsque que j'ai quitté le SSIP que j'ai ressenti de l'humanité. Là se tenait mon infirmière, assise sur une chaise, une larme coulant sur sa joue. Cette larme m'a rappelée que pour elle au moins, tout cela comptait. Heather, moi, et plus important, ma merveilleuse Maddie.

C'est pour cela que les infirmières sont si importantes. En plus de leur expertise médicale, elles apportent la touche d'humanité nécessaire au monde froid et stérile des hôpitaux. Les médecins font de grandes choses, mais ils ont tant à faire qu'ils ne peuvent rendre visite à chaque patient qu'une fois par jour. C'est là qu'intervient l'infirmière, tenant votre main - au sens propre comme au figuré - et vous rappelant que vous n'êtes pas seul et que votre vie est importante, même si elle ne peut pas être sauvée.

Aujourd'hui, à ce restaurant, quand les infirmières ont fini leur repas, j'ai voulu les remercier, mais je ne l'ai pas fait et je l'ai bien regretté. Mais voici une occasion de me rattraper :

Aux infirmières du monde entier : sachez que vous faites la différence pour bien des gens, ma famille y compris, et pour ça, je ne vous remercierai jamais assez.

Mike and Maddie

Mike and Maddie Spohr

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