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150 M$ pour la Stratégie culturelle numérique mais pour la société, on repassera

J'appuie la culture, j'aime la culture, la culture c'est bien, c'est même essentiel. Par contre, lorsque plusieurs étonnés et moi-même demandons un, c'est beaucoup plus que pour la culture strictement. C'est aussi, pour commencer à investir dans les infrastructures, ce grand oublié tant du fédéral que du provincial.
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Bel effort du gouvernement du Québec qui investira 150 millions de dollars pour une Stratégie culturelle numérique. Selon le communiqué gouvernemental:

Pour les organismes culturels, la révolution numérique représente un défi crucial d'adaptation aux nouveaux moyens d'information et de communication. Ainsi, le gouvernement investira 150 millions de dollars pour soutenir les organismes culturels qui doivent prendre le virage technologique. Les sommes investies serviront notamment au remplacement de l'équipement actuel par de l'équipement numérique.

La Stratégie culturelle numérique sera rendue publique prochainement par le ministre de la Culture et des Communications.

(...) « Fondement de l'identité québécoise, instrument de rayonnement à travers le monde et important secteur d'activité créateur d'emplois et de richesse, la culture joue un rôle essentiel au développement du Québec », a tenu à rappeler le ministre Marceau.

J'appuie la culture, j'aime la culture, la culture c'est bien, c'est même essentiel. Par contre, lorsque plusieurs étonnés et moi-même demandons un Plan numérique pour le Québec, c'est beaucoup plus que pour strictement la culture. C'est aussi, pour commencer à investir dans les infrastructures, ce grand oublié tant du fédéral que du provincial, qui est cette autoroute sur lequel devrait circuler cette culture justement.

Je ne vous répéterai pas mon ras-le-bol de notre infrastructure numérique du tiers monde. Je ne vous parlerai pas non plus de notre économie numérique qui fout le camp hors du Québec à chaque mois à hauteur de 40 à 60% de tout l'argent dépensé en ligne par les Québécois. Je ne vous parlerai pas non plus des MOOC qui font fureur dans les universités américaines et dont on n'a pas parlé lors des États généraux sur l'éducation supérieure et qui risque de voir un étudiant de Chicoutimi préféré étudier de chez lui à Harvard plutôt qu'à l'UQAC. Je ne vous parlerai pas non plus des ces centaines de milliers de conducteurs de camion, autobus et taxi qui risque de perdre leurs emplois d'ici quelques années avec l'arrivée du Google car partout en Amérique et dont on ne semble pas encore se soucier. Je ne vous parlerai pas non plus de ces étudiants du primaire à qui on enseigne le code informatique en Estonie, Finlande, Grande-Bretagne ou aux États-Unis alors qu'ici on s'obstine pour savoir si nos écoliers devraient apprendre l'anglais.

Je vous dirai ceci (que nous disions dans notre rapport d'étonnement)

Le Québec glisse vers le bas dans l'échelle de la compétitivité parce que nos voisins, provinces et pays, se sont donné une vision d'avenir pour tirer collectivement tous les bénéfices des nouveaux modes de communication et de l'économie immatérielle sous la forme d'un Plan numérique.

Tous les rapports concernant l'autoroute de l'information, du rapport Berlinguet de 1995 au dernier rapport Gautrin, ont été tablettés ou risquent de l'être. Depuis 30 ans nous n'entreprenons que des actions individuelles et souvent désordonnées, ce qui vaut aussi pour les 23 ministères, et plus de 200 organismes publics qui sont autant de silos. Nous investissons dans le béton, dans l'avoir et trop peu dans le savoir.

Le Québec vit actuellement une série de crises, la perte de confiance des citoyens envers leurs institutions et leurs dirigeants, les crises économiques qui grugent notre bien-être ou nos crises d'identité, etc.

Nous sommes aujourd'hui une société tellement divisée que nous ne pouvons plus établir de consensus concernant nos projets d'avenir. Ces crises surviennent notamment parce que nous passons d'une ère industrielle vers une autre qui devient postindustrielle. Parce que nous perdons tous nos points de repère, nous devenons inquiets, comme d'ailleurs la plupart des autres sociétés de notre planète.

Nous basculons vers une société de la connaissance où l'information devient notre matière première et l'Internet la place publique où se prennent nos décisions. Nous vivons des passages difficiles parce que nous allons:

  • D'une démocratie élective > vers une démocratie participative
  • D'une majorité silencieuse > aux lucides, indignés et carrés rouges
  • D'un individualisme forcené > vers une responsabilisation collective
  • D'une civilisation du livre > vers une civilisation d'images-écran
  • De la loi de l'offre > à celle de la demande, etc.

Nos six demandes:

  1. Créer une Agence du numérique qui relèverait de l'Assemblée nationale (comme la Société Hydro-Québec qui a pour mission de gérer toutes les questions énergétiques). Cette agence relèverait du Parlement et devrait transcender les partis politiques et le pouvoir exécutif.
  2. Co-construire un Plan numérique avec l'ensemble des acteurs et la population de toutes les régions du Québec, capable de développer à la fois l'économie, la culture et les savoirs, dans notre société qui doit s'adapter, comme toutes les autres, au XXIe siècle.
  3. Créer un Conseil national du numérique qui serait formé des représentants reconnus de l'ensemble des secteurs d'activités et de la société civile. Il serait obligatoirement consulté par le Parlement et les ministères pour toutes questions concernant le développement du numérique sur le territoire québécois. Nous pensons au modèle du Conseil supérieur de l'éducation à l'intérieur de la Loi sur l'instruction publique...
  4. Créer un forum de participation citoyenne indépendant du gouvernement, soutenu par celui-ci et une fondation par exemple, avec une gouvernance assurant sa neutralité. Un modèle inspirant : NESTA en Angleterre ou worldwatch.org
  5. Investir prioritairement dans le savoir, et non dans l'avoir, c'est-à-dire principalement dans les transferts et la mutualisation des connaissances.
  6. Investir aussi dans le déploiement de réseaux à très haute vitesse (100 Mb symétriques et plus) et gérer selon les règles « OpenAccess » afin de rendre nos infrastructures interopérables, ouvertes et performantes pour communiquer entre nous et avec l'ensemble des pays avec qui nous entretenons des relations politiques, sociales et économiques

Aujourd'hui, nous investissons dans le passé en empruntant sur l'héritage que nous allons laisser à nos petits-enfants : leur futur. Allons-nous demeurer encore longtemps étonnés devant notre peu d'envergure et de prévoyance?

Qu'attendons-nous?

Signé : Les étonnés

Ma conclusion: l'investissement de 150 millions du gouvernement du Québec est un investissement du passé et nous n'avons toujours pas de vision de l'avenir...

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