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Éthique, éducation et langue: demander des comptes au PLQ

Refuser la généralisation de l'anglais intensif en sixième année c'est faire preuve de discernement et d'un esprit critique éclairé; les difficultés de l'éducation sont trop nombreuses, les conséquences trop graves, pour qu'elle fasse l'objet de quelques coups de scalpel sur les cerveaux des jeunes...
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J'aimerais ramener un questionnement esquissé dès mars 2011, au lendemain du discours inaugural du gouvernement du PLQ, sur le sujet de l'achat massif de tableaux interactifs (TBI) et du programme précipité d'anglais intensif en sixième année.

On aura confondu, encore une fois, programme universel à ressources technologiques par projet ou en fonction des objectifs pédagogiques d'un certain nombre d'enseignements au sein des écoles. Dans le cas de l'anglais intensif, on aura confondu programme universel à projets éducatifs particuliers de certaines écoles.

Ce programme d'acquisition a été critiqué sur la base de doutes sur l'utilité véritable pour la réussite des élèves, de l'ampleur des budgets prestement alloués et de la fragilité même d'une telle technologie. On aura raison d'évoquer que l'évaluation de la valeur/utilité des TBI n'a pas été démontrée en regard d'autres besoins largement plus criants. D'autres auront soulevé le doute quant à la probité des contrats alors convenus ( La Presse, 1 mars 2012). Mais, qu'en est-il vraiment? S'agit-il d'un autre cas de corruption à porter à l'ardoise du PLQ? Si faute il y a, les responsables en répondront-ils à la population en cette période électorale?

Singulièrement, le programme d'anglais intensif universel du gouvernement Charest reposait sur une évaluation partielle d'un projet pilote mené dans la région du Lac-Saint-Jean. Le rapport d'évaluation que nous avions obtenu ne permettait d'ailleurs pas de conclure au bien-fondé de ce programme, surtout pas de la pertinence d'en faire un programme universel pour les régions déjà bilingues de Montréal et de l'Outaouais où il existe une réelle situation de problèmes à l'intégration linguistique de l'ensemble des jeunes immigrants et des carences de la qualité du français.

Le bon sens indique déjà qu'une approche différente serait plus judicieuse. Il faut bien reconnaître que l'enseignement de l'anglais intensif peut constituer un projet éducatif de certaines écoles, mais non un programme généralisé, notamment sous la conjoncture démo et socio-linguistique actuelle. La cohérence même du système d'enseignement en français exigerait de se référer à un paradigme différent.

Nous le reformulons: l'intégration à la langue identitaire commune semble maintenant incertaine en milieu scolaire montréalais, ce qui annoncerait alors une forme de désintégration assez semblable à ce qui se passe là où le français est minoritaire et qui préside au transfert à la langue anglaise partout au Canada, voire même dans certains quartiers montréalais (travaux de C. Castonguay et M. Paillé).

Avec une composition ethnique tout aussi diversifiée, Toronto, Vancouver, et d'autres villes n'éprouvent pourtant pas de difficulté à réaliser l'intégration totale et inconditionnelle à la langue anglaise. Ici, à Montréal, une nouvelle forme d'anglomanie alimente un climat contraire à l'intégration à la langue française. L'observation du comportement linguistique ambigu des francophones du grand Montréal révèle déjà qu'un obstacle à la vitalité du français et à la francisation des allophones réside dans l'ambiguïté et le manque de fierté des francophones pour leur langue: ce peuple ambivalent est dû pour une psychanalyse de masse, dirais-je pour paraphraser le Dr Camille Laurin!

Comprenons que sur l'île de Montréal près de 60% des enfants sont issus de l'immigration. Certaines écoles comptent plus de 80% de jeunes allophones. Sous une telle conjoncture, pour la grande région de Montréal, le programme improvisé d'anglais intensif pour tous souhaité par le PLQ viendrait définitivement enlever au français sa force d'attraction relative en tant que langue commune de cohésion sociale. Il constituerait une forme de plan d'assimilation à la langue anglaise. Telle est la nature de la dynamique de la vitalité des langues (UNESCO, La vitalité et le danger de disparition des langues).

Résister à l'anglomanie, c'est déjà, donnée la chute du poids de la langue française au Canada, engager un combat humaniste en faveur de toutes les langues minoritaires. La langue identitaire est toujours et partout vitale à la cohésion sociale, et son enracinement au sein d'un système d'enseignement constitue une condition entendue de la vitalité linguistique. Il en est singulièrement au Québec et au Canada français. Le système d'enseignement (d'éducation et d'instruction) doit alors impérieusement répondre à des critères de cohérence.

Ainsi, refuser la généralisation de l'anglais intensif en sixième année c'est faire preuve de discernement et d'un esprit critique éclairé; les difficultés de l'éducation sont trop nombreuses, les conséquences trop graves, pour qu'elle fasse l'objet de quelques coups de scalpel sur les cerveaux des jeunes...

Refuser un plan impropre n'exclut pas l'obligation de proposer des options de rechange utiles. Ainsi, nous avions proposé les prémisses d'un projet éducatif facultatif que le MELS et des commissions scolaires ( fusionnées!) pourraient développer, puis proposer sur la base du libre choix à des écoles (Arguments autour de thèmes portant sur la cohérence du système d'enseignement). Il serait avantageusement possible d'offrir l'option d'un projet éducatif facultatif dont la nature permettrait à la fois un renforcement de l'apprentissage du français, une introduction à des fondements de langues romanes, voire une ouverture sur la spécificité étymologique de la langue anglaise... Le projet à l'essai esquissé dans cette brève communication porte le sceau d'un engagement humaniste et d'une prise de conscience d'un devoir fondamental de transmission de la francité par et au sein de l'école...

La maîtrise du français constitue la priorité en matière d'éducation et d'enseignement. La mission première de l'école est double (et singulière pour toute la région de Montréal accueillant près de 90% des immigrants dans un milieu sous influence de l'anglais): réaliser l'intégration linguistique positive et réussir la problématique maîtrise de la langue commune. Le défi est colossal; il requiert une cohérence sans faille des moyens. Pourtant, voilà que le PLQ voudrait encore faire des ratures sur le livre de l'éducation comme on lobotomiserait de maladroits coups de scalpels sur le cerveau... La même mauvaise foi aura été observé lors des discussions autour du renforcement de la loi 101 et autour du projet de Charte de la laïcité..

Je ne suis pas loin de penser que l'honorable Claude Ryan aurait appuyé une proposition de rechange et le libre choix, et que l'honorable Paul-Gérin Lajoie l'appuierait. Mais hélas, l'idéologie néo-libérale de l'actuel PLQ n'est plus de la noble pensée libérale d'hier...

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