Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Autisme et TDAH: plaidoyer pour la reconnaissance positive de la diversité humaine

Ce qui est identifié comme étant pathologique dans le modèle médical devient l'une ou l'autre des variantes biologiques naturelles de la différence humaine, sous la loupe de la neurodiversité.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.
La neurodiversité est une réalité biologique qui représente la diversité des cerveaux et des esprits humains. Cette infinie diversité provient d’une combinaison de facteurs innés et acquis, qui interagissent entre eux et avec l’environnement pour former l’individualité de chaque être humain.
Getty Images/iStockphoto
La neurodiversité est une réalité biologique qui représente la diversité des cerveaux et des esprits humains. Cette infinie diversité provient d’une combinaison de facteurs innés et acquis, qui interagissent entre eux et avec l’environnement pour former l’individualité de chaque être humain.

La neurodiversité est un concept dont on parle de plus en plus, mais qui demeure encore méconnu de plusieurs, incompris par d'autres, et également, très controversé.

Il y a maintenant 20 ans, lors de sa thèse en sociologie, Judy Singer a mis en oeuvre une énorme réflexion. Constatant une détection sans cesse croissante de «pathologies» au cours des dernières décennies, elle a constaté qu'elles n'avaient de sens que lorsque considérées à travers le prisme de la diversité humaine. C'est ce qu'elle nomme «neurodiversité».

La neurodiversité est un concept qui se compare à la biodiversité. La biodiversité s'apprécie en considérant la diversité des écosystèmes, des espèces et des gènes. En ce sens, le cerveau est comparable à un écosystème: un réseau sain et en équilibre, d'une extrême complexité et infiniment diversifié.

La neurodiversité est une réalité biologique qui représente la diversité des cerveaux et des esprits humains. Cette infinie diversité provient d'une combinaison de facteurs innés et acquis, qui interagissent entre eux et avec l'environnement pour former l'individualité de chaque être humain.

Ainsi, le paradigme de la neurodiversité se distingue en faisant positivement référence à la gamme complète des «possibles», plutôt qu'à des identifications péjoratives telles qu'«incapacité», «déficience», «maladie», «trouble», «dysfonctionnement» et «anormalité» proposées par le modèle médical actuel.

Ainsi, ce qui est identifié comme étant pathologique dans le modèle médical devient l'une ou l'autre des variantes biologiques naturelles de la différence humaine, sous la loupe de la neurodiversité.

En croyant qu'il existe un être humain «normal» et que tout être humain doit entrer dans cette norme, nous faisons deux grossières erreurs. Tout d'abord, celle de croire que cet humain «normal» existe et que celui-ci aurait le bon mode de fonctionnement cognitif. Ensuite, celle de croire que tout ce qui dépasse de cette normalité provient d'un désordre cognitif et, par conséquent, de vouloir tout faire pour corriger cette anormalité.

Dans ce contexte, il est évident que la neurodiversité rassemble les êtres humains. De par sa définition, ce concept est inclusif. L'humanité est neurodiverse. Chaque être humain est entier et complexe. Chaque humain possède une énergie et un esprit unique qui évolue à chaque instant.

Il s'agit d'accepter que la diversité cognitive existe, sans chercher à vouloir la guérir ou la surmédicamenter.

Le mouvement de la neurodiversité ne porte pas une vision romanesque de la diversité humaine. Plusieurs obstacles sont à franchir et, souvent, certaines difficultés peuvent sembler insurmontables. L'aide véritable se fait très rare. Ainsi, il ne s'agit aucunement de nier les nombreux défis que peuvent rencontrer parents d'enfant «atypiques» et personnes neurodivergentes. Il ne s'agit pas de faire l'autruche ni de refuser l'aide ou les services offerts. Il s'agit d'accepter que la diversité cognitive existe, sans chercher à vouloir la guérir ou la surmédicamenter.

La neurodiversité contribue à l'épanouissement de chaque être humain, dans le respect de sa singularité, en lui apportant l'aide et le soutien nécessaire, dans une approche bienveillante, selon les besoins qui lui sont propres.

Les mouvements de la neurodiversité qui en découlent souhaitent que tous les êtres humains aient les mêmes droits. Ainsi, ce mouvement de justice sociale favorise les droits civils, l'égalité, le respect et l'inclusion sociale complète.

Plusieurs personnes se demandent ce que la neurodiversité leur apporte dans leur quotidien. Les différences neurologiques, comme l'autisme et de trouble déficitaire de l'attention, les deux principaux diagnostics en hausse fulgurante depuis les dernières années, doivent être repensés autrement.

Dans le quotidien, il y a des risques et des impacts majeurs à considérer pathologiques des comportements atypiques, perturbants, voire déconcertants, mais, somme toute, normaux. Plutôt que d'aller à la source, on perçoit la personne comme un lot de déficits que l'on doit s'empresser de combler, de pallier, de compenser.

On condamne d'emblée des êtres humains à être inférieurs et limités tout au long de leur vie.

En ne voyant que les difficultés et en essayant par tous les moyens de faire entrer les humains dans un moule de conformité, nous nuisons à l'estime et à la confiance en soi de ces personnes neurodivergentes et nous limitons le développement de leur plein potentiel. On condamne d'emblée des êtres humains à être inférieurs et limités tout au long de leur vie.

Par exemple, lorsqu'on oublie toutes les idées reçues sur le développement «normal» d'un enfant, qu'on oublie cette norme inventée, on cesse d'observer notre enfant à travers le prisme d'une accumulation de déficits à combler, de retards d'acquisition et d'incapacités insurmontables. On cesse d'être paralysé et désarçonné devant ces comportements dérangeants, voire déstabilisants. Nous ne sommes plus dans un sentiment d'anxiété et d'urgence absolue dans lequel nous plonge invariablement la tombée d'un diagnostic psychiatrique. Le regard, qu'on pose sur notre enfant et ses comportements, change. La relation que nous développons avec lui se transforme également.

Quand nous considérons l'être humain avec le regard teinté par la neurodiversité, nous pouvons apprécier la richesse de l'individu. Plutôt que de voir chez les personnes des troubles à contrer, nous pouvons apprécier la créativité, la spontanéité, le leadership, l'esprit scientifique, leur vision des détails, leur sensibilité, leur ardeur, leur intuition logique, leur sens artistique.

Nos énergies devraient se concentrer sur l'acceptation, l'appréciation et la compréhension de cette neurodiversité humaine, plutôt que sur l'uniformisation des attitudes, des comportements, et d'étiqueter pathologiquement tout ce qui ne s'y conforme pas.

Considérer la diversité des esprits humains, c'est simplement revenir à la base: adopter une approche bienveillante et considérer l'être humain par le biais de son unicité.

Le 30 septembre prochain aura lieu la Journée mondiale de la neurodiversité, en collaboration avec Josef Schovanec, Joël Monzée, Laurent Mottron et Judy Singer. Ainsi, professionnels, personnes neurodivergentes ainsi que parents uniront leur voix avec pour objectif de changer le regard de la société sur les «pathologiques».

Les personnes qui sont identifiées comme ayant un TDAH et les personnes autistes sont bien mal comprises. Le bagage historique de l'autisme est lourd et souffrant, autant pour les autistes que pour les non-autistes. Pouvons-nous, ensemble, construire un nouvel avenir pour la diversité humaine?

À VOIR AUSSI:

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.