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Le TDAH n’est pas un déficit d’attention

Les personnes ayant un « TDAH » sont les mieux placées pour comprendre leur propre mode d’apprentissage.
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Être concentré sur une seule chose à la fois n’est pas l’unique mode de percevoir notre monde.
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Être concentré sur une seule chose à la fois n’est pas l’unique mode de percevoir notre monde.

Le terme « déficit » d'attention porte grandement à confusion. Tout d'abord, ce terme laisse sous-entendre que la personne est incapable de se concentrer du tout ou seulement sur une très courte période. Pourtant, lorsqu'on s'attarde au fonctionnement interne d'une personne ayant un « TDAH », l'attention n'est pas manquante, au contraire, ni troublée dans sa modulation.

Il n'y a pas qu'une seule, unique et bonne manière de se concentrer. Thom Hartmann a fait une comparaison intéressante pour illustrer l'attention distinctive des personnes ayant un « TDAH ». Leur attention fonctionne comme un radar à balayage. Comparativement aux personnes neurotypiques qui ont une attention comparable à un projecteur.

Ainsi, l'observation de l'environnement, d'un objet ou d'une image se fait point par point. Ils ont pleinement conscience de leur environnement en entier. On parle d'une attention multifocalisée. Tandis que l'attention d'un neurotypique se concentre sur un seul point à la fois.

Ils ont la capacité de voir le portrait global d'une situation avec l'ensemble des détails, même ceux qui passent généralement inaperçus pour la majorité des gens.

Les personnes ayant cette attention multifocalisée sont hypersensibles (frontières interpersonnelles souples) et perceptives. Ainsi, ils ont la capacité de voir le portrait global d'une situation avec l'ensemble des détails, même ceux qui passent généralement inaperçus pour la majorité des gens. C'est ainsi qu'il devient pour eux, extrêmement difficile de percevoir qu'une seule chose à la fois et de s'y concentrer, s'il n'y a pas d'intérêt pertinent de le faire. Elles voient constamment le portrait en figure-fond sans interruption. Ces personnes perçoivent ainsi la globalité de leur environnement de manière très complexe. Elles sont sensibles aux bruits ambiants, à la lumière, aux mouvements des gens, etc. Elles voient et ressentent tout, constamment. Comme le souligne la psychologue Diane Dulude dans son livre le TDAH, une force à rééquilibrer, elles ont la capacité de percevoir les différentes perspectives. Ce qui peut s'avérer une grande force et un véritable défi à la fois.

Il est donc faux de croire que la personne ayant un « TDAH » ne perçoit pas les détails ou n'y prête pas attention.

Il est donc faux de croire que la personne ayant un « TDAH » ne perçoit pas les détails ou n'y prête pas attention. C'est totalement l'inverse. Et, lorsque nous avons cette capacité de percevoir tous les détails d'une situation, il devient extrêmement difficile de rester concentré sur une seule chose précise à un moment précis.

La difficulté de cette attention réside principalement du fait que l'environnement, particulière l'environnement scolaire, est très peu adapté à cette neurologie. L'enseignement et les salles de classe sont pensés et conçus par rapport à la norme : l'attention comme un projecteur, un seul angle.

Cette hypersensibilité et cette intelligence perceptives les amènent à être plus facilement décentrés par leur environnement et c'est sur ce plan que nous pouvons travailler avec eux.

En se basant sur le modèle d'attention déficitaire, les stratégies qui sont couramment offertes servent à pallier ce « faux déficit ». Ainsi, ces stratégies, en plus de faire fausse route sur la compréhension du « TDAH », ne sont pas du tout adaptées à cette neurologique. Plutôt que d'apprendre à la personne comment son cerveau fonctionne et de respecter son fonctionnement, nous travaillons contre sa neurologie, en mode compensatoire. Les méthodes comportementales utilisées actuellement encadrent la personne de manière stricte. On instaure souvent un système de récompenses pour motiver l'enfant, on impose des limites, des horaires à respecter, on tente de le structurer au maximum. Or, à la base, le « TDAH » n'est pas un trouble de comportement, il n'y a donc rien à corriger ou à améliorer à ce sujet. Les méthodes comportementales essaient également de compenser le « déficit attentionnel », en ayant comme objectif d'amener la personne à avoir une attention standard (normale) plutôt que de comprendre comment fonctionne son attention.

Si au contraire, on apprend à la personne ayant un « TDAH » comment fonctionne son cerveau, on peut s'adapter à sa manière d'aborder les travaux scolaires par exemple, les tâches quotidiennes, les rapports sociaux, etc.

Les personnes ayant un « TDAH » sont les mieux placées pour comprendre leur propre mode d'apprentissage.

Les personnes ayant un « TDAH » sont les mieux placées pour comprendre leur propre mode d'apprentissage. Il est donc essentiel de leur faire confiance, même si cela semble complètement inusité. C'est en misant sur ses préférences, sa créativité, en les laissant elles-mêmes explorer ce qui leur convient le mieux qu'elles parviendront à mieux se définir, à mieux se connaitre, à comprendre leur neurologie et à en tirer profit.

Lorsque la personne a un concept de soi mieux défini et des intérêts personnels qui soulèvent la passion, sa motivation incroyable se soulève et elle peut mettre à profit sa capacité de grande concentration d'où peuvent immerger plusieurs nouvelles idées créatives. L'hyperfocalisation est une force incroyable souvent banalisée et parfois même ignorer lorsqu'on aborde le TDAH.

Nous pouvons donner des outils à la personne afin qu'elle puisse mieux gérer son attention de manière autonome, sans être constamment éparpillée. Nous pouvons également l'accompagner afin de clarifier son concept de soi en l'aidant à prendre conscience de ses intérêts et passions.

On ne peut pas parler de « déficit » d'attention puisque celle-ci n'est ni absente, ni inférieure, ni déficiente. Il y a seulement un cerveau qui fonctionne de manière différente : une variation génétique du traitement de l'information.

Être concentré sur une seule chose à la fois n'est pas l'unique mode de percevoir notre monde.

Références :

Théorie du chasseur-cueilleur

Le TDAH, une force à rééquilibrer : Le trouble de l'attention avec ou sans hyperactivité, Diane Dulude, PH.D, Les éditions du CRAM et les éditions Porte-Bonheur.

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