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Habituez-vous aux manifestations

Les statistiques le démontrent: les jeunes sont moins nombreux que leurs aînés. Ils sont moins nombreux à entrer sur le marché du travail, moins à pouvoir faire pression sur le gouvernement afin de faire entendre leurs points de vue. Par ailleurs, les décideurs ayant participé à la création de l'État providence québécois joignent aujourd'hui les rangs des retraités. Le changement de garde décisionnel s'opère tranquillement, mais sûrement. Ainsi, bien qu'ils comblent peu à peu les postes de pouvoir, ils sont économiquement et démographiquement plus faibles que leurs parents
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Laurent Therrien

Plus que jamais les plaques tectoniques générationnelles s'entrechoquent. Les manifestations étudiantes n'en sont qu'un exemple: il y a làconfrontation entre les intérêts de chacune des générations. Plus encore, il y a là débat sur nos priorités en tant que société, voire même sur l'avenir de notre social-démocratie. Et ce n'est que le début.

Les statistiques le démontrent: les jeunes sont moins nombreux que leurs aînés. Ils sont moins nombreux à entrer sur le marché du travail, moins à pouvoir faire pression sur le gouvernement afin de faire entendre leurs points de vue. Par ailleurs, les décideurs ayant participé à la création de l'État providence québécois joignent aujourd'hui les rangs des retraités. Le changement de garde décisionnel s'opère tranquillement, mais sûrement. Ainsi, bien qu'ils comblent peu à peu les postes de pouvoir, ils sont économiquement et démographiquement plus faibles que leurs parents. En d'autres mots, le phénomène de la pyramide inversée se manifeste.

Les jeunes sont dans la rue pour maintenir le gel des frais de scolarité. Mais n'est-ce pas également pour dénoncer le fait qu'on en demande davantage aux étudiants qu'aux retraités provinciaux? Et si la majorité silencieuse est d'accord avec la hausse, n'est-ce pas pour protéger les droits acquis des plus ainés qui la composent? Ultimement, il s'agit de se tailler une part du gâteau, part qui se rapetisse d'année en année.

En effet, selon une analyse du ministère des Finances du Québec de 2010, le Québec est la cinquième nation la plus endettée dans le monde industrialisé, après la Grèce et l'Islande. Avec un endettement public total de 94% de notre PIB, nous sommes plus endettés que la France (75,7%), le Portugal (75,2%), les États-Unis (70%), la Suède (47,1%) ou le Canada pris dans son ensemble (69,7%). Le Québec est bien entendu la province la plus endettée du Canada. Non seulement on nepeut s'endetter davantage, mais il est à penser que la croissance économique sera moins forte en raison du vieillissement de la population.On peut également prévoir que les institutions qui financent le Québec feront pression sur le gouvernement afin de rembourser l'argent emprunté... et ce sera les jeunes citoyens (et leurs enfants) qui seront appelés à terme à payer.

La recette est simple : augmenter les revenus de l'État (impôts des particuliers et des entreprises, taxes et redevances) ou diminuer les dépenses (financement de programmes, ressources humaines ou coûts d'exploitation). La stratégie gouvernementale doit être claire : face à l'endettement prononcé, tous les Québécois, peu importe l'âge, doivent mettre l'épaule à la roue. Une stratégie d'exploitation de nos ressources naturelles avec redevances élevées? Une règle d'utilisateur-payeur pour certains usages? Un 2%, 5%, 17% (comme pour les frais de scolarité) d'efforts par contribuable par service? Le gouvernement doit établir une stratégie claire afin de maintenir l'équité intergénérationnelle et de ce fait, une paix sociale.

Tant et aussi longtemps que l'on n'aura pas défini la part de chacun, la question des frais de scolarité n'est qu'une bataille de l'épopée générationnelle qui se pointe à l'horizon. Le nerf de la guerre sera d'établir comment répartir équitablement entre générations la juste part du gâteau et de la dette. Le financement des soins de santé, les garderies et les régimes de pension (l'âge et la compensation) seront les prochains entrechocs. C'est la première fois depuis longtemps que les jeunes confrontent si fortement leurs aînés. Habituez-vous aux manifestations, ce n'est pas la dernière.

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