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Sommes-nous voués à une CAQastrophe?

À quoi bon dépister à 4 ans si l'on n’a pas de mesure avant cet âge et sans avoir de plan détaillé du programme souhaité?
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La pénurie de main-d’œuvre qualifiée et le renforcement des milieux existants sont à examiner sérieusement.
Westend61 via Getty Images
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée et le renforcement des milieux existants sont à examiner sérieusement.

Messieurs les ministres, Jean-François Roberge et Mathieu Lacombe, monsieur le premier ministre François Legault,

Depuis plus d'un trimestre, des centaines de réactions ont été médiatisées à propos de votre gouvernement disant que vous aviez trouvé la meilleure option du gage de réussite future de tous les enfants du Québec: la prématernelle 4 ans. Il est bon de saluer votre mobilisation pour la petite enfance et de constater qu'il y a matière à réflexion. Mais que voulez-vous réellement comme services éducatifs pour nos tout-petits et leur famille?

Oui, offrir des choix aux parents et à leurs enfants est judicieux, mais il ne faut pas omettre que certains prennent la décision de ne pas les intégrer une structure éducative quelconque.

Évidemment, certains n'auront peut-être pas les mêmes chances développementales pour se réaliser que d'autres, mais c'est illusoire de vouloir rejoindre tous ces petits du préscolaire. Cessons d'accuser trop souvent ce choix parental. À proprement parler, votre parti véhicule la pensée magique que la diversité des milieux (centres de la petite enfance (CPE), garderies privées subventionnées, maternelle 4 ans, milieux familiaux gérés par un bureau coordonnateur (BC), haltes-garderies, garderies privées non subventionnées et milieux familiaux non gérés) apporte un choix avisé pour les parents. Malheureusement, les enfants vulnérables à la maternelle proviennent de TOUS ces milieux. Il s'agit plutôt de se questionner sur l'inégalité des services déployés dans chacun d'eux.

Oui, concéder et proposer des choix, messieurs les ministres, mais ne pas oublier que cette promesse vient avec la détermination qu'il faut offrir des services de QUALITÉ. Ceci repose sur plusieurs facteurs tels que du personnel stable, avec une formation reconnue, qui communique et interagit adéquatement avec les enfants, mais aussi avec les parents; du personnel qui participe activement avec les partenaires aux diverses tables de concertation; du personnel qui a devant lui un ratio réaliste d'enfants pour répondre aux besoins et intérêts de chacun d'eux; du personnel qui connait bien le développement global des enfants, qui a l'expertise pour les accompagner dans une démarche professionnelle optimale et qui permet quotidiennement à l'enfant de vivre des réussites et des défis à sa hauteur, pour répondre à son unicité.

Afin de bonifier cette qualité relationnelle, le milieu doit donner aux parents un pouvoir décisionnel sur le milieu éducatif que leurs enfants fréquentent. Qu'ils aient la chance de s'y investir et d'y participer activement. Pour composer avec ces éléments, il ne faut pas négliger un aménagement intérieur et extérieur comprenant du matériel réel et diversifié qui favorise le jeu dans l'apprentissage des enfants.

Ce n'est donc pas le choix du milieu qui est en cause, mais plutôt la qualité des services qui n'est pas du tout universelle.

Oui, accepter que le choix appartienne à la famille: trouver un milieu qui correspond à ses besoins et à ses valeurs est gage d'une meilleure adaptation pour tous, par le biais d'une confiance mutuelle. Cependant, il est nécessaire d'unifier tous les services éducatifs à l'enfance pour que chaque enfant reçu soit assuré d'avoir des ressources équitables et comparables.

Oui, ne le cachons pas: les écarts entre les milieux qui reçoivent les tout-petits sont bien réels quand on multiplie les choix et qu'on ne demande qu'aux deux tiers du personnel éducatif à être formés. Messieurs les ministres, on a besoin de vous pour pallier cette pénurie alarmante dans le système éducatif à l'enfance, dans sa globalité. Notez qu'avec le salaire maigre et les pressions engendrées par de multiples facteurs sociétaux, il n'est pas motivant d'y demeurer ou d'en faire un métier, aussi passionnant soit-il. Il y a peu de considérations pour le réseau.

Présentement, tout cela donne une impression de désordre et d'acharnement à pister les mauvais besoins au préscolaire.

Or, la pénurie de main-d'œuvre qualifiée et le renforcement des milieux existants sont à examiner sérieusement.

Oui, il est bon de saluer votre audace et votre détermination. Mais hors des promesses électorales, dites-moi, qui est convaincu de cette réussite à part vous, chers ministres? De quel droit avez-vous raison de sabrer le système éducationnel des moins de 5 ans de la sorte? Où sont les stratégies et les études éclairées de votre parti sur ces choix actuels?

Admettre que la prématernelle 4 ans n'est pas la seule réponse à la réussite éducative?

Les compétences de personnes formées seraient plutôt à considérer. Éduquer en petite enfance demande une formation très spécifique. Comprendre les besoins des enfants prend une formation optimale, reconnue et adaptée. Vous devriez venir visiter les départements de ces techniques (TÉE) pour constater que l'enseignement est rigoureux. Les futures éducatrices reçoivent tout le bagage nécessaire pour offrir une éducation exemplaire à chaque petit qu'elles côtoient, selon les intérêts de chacun. Elles sont des spécialistes.

Oui, direz-vous, mais qu'en est-il des troubles d'apprentissage, des diagnostics, de la détresse des parents, des éducatrices et des professeurs à tenter de soutenir cette société de performance? L'arrimage avec le ministère de la Santé par l'initiative de votre collègue, Monsieur Carmant avec les membres de cette communauté, comme les Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) et les Centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS) aura, souhaitons-le, son effet pour justement répondre aux familles avec enfants aux besoins particuliers.

À quoi bon dépister à 4 ans si l'on n'a pas de mesure avant cet âge et sans avoir de plan détaillé du programme souhaité?

Les services éducatifs à l'enfance ne demandent que de promouvoir la santé des jeunes qu'ils desservent. Les éducatrices sont formées pour détecter et dépister bien avant l'âge de 4 ans, d'éventuelles carences. Le programme CIRENE ainsi que le projet AGIR TÔT, malgré une mince enveloppe monétaire, pourront, souhaitons-le, soutenir les milieux et rejoindre plus efficacement les familles.

Oui, il est pertinent de comparer les systèmes éducatifs, mais cette fois-ci ce sont nos milieux subventionnés en centre de la petite enfance qui sont la fierté et l'envie de bien des provinces, États et pays. Peut-on demeurer dans nos souliers et poursuivre le chemin avec ce réseau formidable qui est loin d'être encore parfait, mais qui s'investit corps et âme pour le bien-être de chaque famille qu'il côtoie.

Je vous relance, ministres, mais que voulez-vous réellement comme services éducatifs pour nos tout-petits et leurs familles? Si vous désirez mettre l'enfant au cœur de vos réflexions, il faudra penser à tout le réseau qui l'encadre. Cessez l'improvisation et les solutions créatives. Soyez pragmatistes. Évitons la CAQtastrophe, messieurs les ministres: assurons à chaque famille un milieu éducatif de qualité afin de bâtir une réelle mission pédagogique.

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