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Le crétinisme austéritaire

Non seulement ces coupures tous azimuts ne nous feront pas épargner collectivement, mais elles vont nous coûter cher et pour longtemps.
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Le printemps dernier, lorsque le ministre Barrette avait annoncé qu'il avait l'intention de réviser le Programme québécois de procréation assistée - intention qui devrait se concrétiser d'ici Noël - en raison des coûts trop élevés, je dois vous l'avouer, ça m'avait semblé une excellente idée. À l'époque, j'étais sensible aux arguments qui semblaient ceux du «gros bon sens». Quand on est ignorant sur un sujet, on est facilement manipulable... Je me suis donc renseignée.

L'essai «L'aide à la procréation au Québec» de Judith Lussier, lancé la semaine dernière, est foutrement bien documenté et argumenté à cet égard. À force de lecture, j'ai réalisé que moi, celle qui passe son temps à dénoncer la gouvernance à courte vue, j'étais pour une rare fois tombée dans le panneau. Comme quoi il faut toujours être sur ses gardes!

Oui le programme de procréation assistée coûte cher, mais ce n'est rien à côté de ce qu'il en coûte de ne pas avoir un tel programme.

Pourquoi?

Parce qu'avant, quand ça coûtait 10 000 $ par cycle, les gens acceptaient toutes sortes de pratiques barbares pour s'assurer que ça fonctionne du premier coup (on les comprend!). D'abord, il y a la stimulation ovarienne, très invasive, douloureuse et non sans danger pour la santé des femmes, et l'injection de plusieurs embryons à la fois.

Résultat? Augmentation du nombre de grossesses multiples, ce qui entraîne une augmentation du nombre de bébés prématurés, ce qui entraîne une augmentation des coûts en néonatalité en raison des soins à donner aux bébés prématurés, sans compter les coûts à long terme entraîné pour notre système de santé en raison des soins et hospitalisations prolongées des enfants nés handicapés ou souffrant de maladies chroniques (anomalies congénitales, paralysie cérébrale, troubles neurologiques, mortalité infantile, etc.)

Commencez-vous à comprendre? Ce qu'on économise d'un bord, on le paie de l'autre...

Le summum de l'imbécillité

J'ai par ailleurs trouvé dans ce génial petit essai de Mme Lussier l'illustration la plus éloquente et la plus sinistre du crétinisme austéritaire de Philippe Couillard.

Je vous raconte...

En 2008, alors ministre de la Santé sous le gouvernement Charest, Philippe Couillard était bien au fait que l'injection de plusieurs embryons à la fois causait des naissances multiples et donc des frais accrus en néonatalité, en plus d'une pression à long terme sur le système de santé québécois.

Qu'a-t-il alors proposé de faire pour remédier à la situation? Il a proposé une loi qui interdirait l'injection de plus d'un embryon à la fois (projet de loi 23).

Oh wow, alerte au génie!

Selon cette logique, les «clients» qui avaient recours à la fécondation in vitro, qui payaient à l'époque 10 000 $ par cycle, auraient désormais déboursé ce même montant pour une intervention dont les chances de succès se trouvaient réduites au seuil minimal? Allons donc! Une telle loi aurait plutôt encouragé le tourisme reproductif, les femmes allant effectuer les traitements à l'étranger pour ensuite revenir au Québec avec toutes les complications citées plus haut aux frais de notre cher système de santé québécois. Bref, on aurait déplacé le problème sans pour autant régler le problème de l'explosion des coûts. Bravo champion!

Heureusement, cette loi n'a pas été adoptée à l'époque, mais seulement en raison de la positon minoritaire du gouvernement Charest de l'époque, face aux deux partis d'opposition, qui prônaient le remboursement de l'entièreté des traitements.

À présent que le gouvernement libéral est majoritaire, il n'est pas dit que, dans un manque de vision et de logique similaire, le ministre Barrette ne passera pas la hache dans l'actuel programme de procréation assistée, bien au contraire!

Surtout, un raisonnement aussi simpliste et idiot au possible de la part de Philippe Couillard en 2008 est à l'image de toutes les décisions que ce gouvernement idéologique prend depuis son arrivée au pouvoir en avril dernier. Non seulement ces coupures tous azimuts ne nous feront pas épargner collectivement, mais elles vont nous coûter cher et pour longtemps.

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