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Banaliser la misogynie, c'est dangereux

Ces jours-ci, à l'approche du triste anniversaire du 6 décembre 1989, la campagne 12 jours d'action pour l'élimination des violences envers les femmes est en cours.
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Le week-end dernier, je suis allée à un party, un gros party, comme dirait Elvis G. Qu'est-ce que j'ai eu du plaisir! L'énergie, les échanges, les sourires, tout était agréable. Une vraie de vraie de belle soirée.

L'affaire avec ces soirées parfaites, c'est que ça prend un accro, autrement, on serait dans un conte de fée version Disney et ça, eh bien, ça se peut pas.

Alors voilà, j'ai croisé un sacré beau spécimen de goujat, un cas fascinant de con d'entre les cons. Vous savez, le gars qui refuse de vous parler. Vous lui dites, je sais pas moi, quelque chose comme «Salut! Ça va?» et il regarde ailleurs, avant de carrément vous tourner le dos. Grande naïve devant l'éternel, ça m'étonne toujours, les personnes antipathiques.

C'est alors qu'on est venu à ma rescousse, m'expliquant que le type en question était en fait le genre d'homme qui considère les femmes comme des être inférieurs et que la seule chose qui l'intéresse en ce qui les concerne, c'est de les baiser et que plus jeunes elles sont, mieux c'est.

Avec mes 35 ans bien sonnés, mon léger embonpoint (qui se résorbe doucement, mais néanmoins...) et la présence de mon chum au party, j'imagine bien que je ne lui étais d'aucun intérêt. Pas comme si j'avais eu un cerveau et que je pouvais être de conversation agréable, hein? Hé non, juste une vulgaire femelle insipide, tout juste bonne à caqueter...

De l'étonnement, je suis passée à l'irritation. Ce type détestable se trouve être l'ami de plein de mes amis (de gars, il va sans dire...)?

Vous tolérez ça? Je veux dire, le comportement, la mentalité, les valeurs de ce gars-là. C'est votre ami? Sérieux?

C'est parce qu'il y a une appellation pour ce genre de chose, on appelle ça de la misogynie.

Question, de même: seriez-vous ami avec un raciste? Un chum qui rit «des osties de cawiche», qui refuse d'être servi par un «nèg»?

Je vous vois déjà faire des grands signes de dénégation de la paume de vos mains. Ah ça, non de non, ce n'est pas possible... Jamais!

Mais un misogyne, qui considère les femmes comme des objets sexuels écervelés, ça, que voulez-vous, ça reste un chum?

Oh, c'est que vous, vous n'êtes pas comme lui, mais tsé, il a d'autres qualités. Il est ben drôle... Et, hein ho, on le changera pas non plus...

De la tolérance

Force est de constater qu'il y a des choses plus tolérables socialement que d'autres et, malheureusement, la misogynie en fait partie.

À force de réfléchir à ça, j'en suis venue à me dire que cette banalisation, cette tolérance envers les comportements sexistes, est un des facteurs qui contribuent à la persistance des violences envers les femmes dans notre société, violences physiques, sexuelles et psychologiques.

Parce que ça part de là, parce qu'entre les deux, il n'y a pas tant de marches à franchir. Après tout, si un misogyne fini peut passer sa vie entière à se comporter comme tel, sans jamais ressentir l'opprobre de ses pairs, c'est quoi la limite?

Des gestes concrets

Ces jours-ci, à l'approche du triste anniversaire du 6 décembre 1989, la campagne 12 jours d'action pour l'élimination des violences envers les femmes est en cours. Encore une fois, cette année, va-t-on commémorer la tragédie entre femmes? Va-t-on dialoguer entre nous sur les sources et les causes de la violence?

J'ai assisté en juin dernier au Forum gouvernemental itinérant sur les agressions sexuelles. Non seulement il était présidé par quatre députées, mais les intervenants était en fait à 95% des intervenantes.

Ça n'a aucun sens.

La violence n'est pas un enjeu féminin, comme le dit si bien le conférencier américain Jackson Katz dans cette conférence TED. Les hommes aussi sont plus que concernés.

L'idée n'est pas de dire que tous les hommes sont fautifs, mais bien que le jour où tous, peu importe notre genre, nous nous sentirons concernés par la violence, alors on pourra sérieusement espérer l'éradiquer. Notamment en changeant comment on éduque nos garçons à grand renfort de virilité masculine stéréotypée traditionnelle. On ne le dira jamais assez, les enfants apprennent par observation et les hommes sont des modèles au même titre que les femmes.

Pour les gars, se sentir concernés et agir contre la violence, ça passe par toutes sortes de gestes concrets, ici, aujourd'hui, dès maintenant. Comme de dire à son chum qu'on n'apprécie pas ses blagues sexistes, que sa façon de traiter les femmes n'est pas acceptable. Parce qu'on est en 2015 après tout et que la misogynie devrait être aussi répréhensible socialement que le racisme. Or, ce n'est pas le cas.

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