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Un Hiver sans fil conducteur

Dans, (pourquoi ce titre d'ailleurs), je n'ai jamais décelé la moindre histoire, le moindre fil conducteur dans ce qui est toujours demeuré, et demeure toujours pour moi, complètement abscons.
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La pièce débute alors qu'un rideau transparent sépare le public des comédiens, sans doute pour établir une distance. Des indications de mise en scène sont projetées sur le rideau, puis disparaissent. Un homme et une femme échangent des bribes de dialogues. Une narratrice, debout dans un coin, s'immisce dans tout cela. Il y a des bruits d'orage. La femme dit qu'elle appartient à l'homme, l'homme dit qu'il appartient à la femme. Ils se traînent par terre comme dans les années 70 lorsque tout le monde tentait de faire du théâtre expérimental.

Le texte se résume à des mots sans suite et des répétitions irritantes comme, par exemple : « Mais oui...oui...mais oui, tu veux, tu veux, tu veux boire, boire quelque chose, tu veux boire, tu veux, tu veux boire quelque chose... » et ainsi de suite alors que la spectatrice que je suis se demandait où tout ça s'en allait. S'il y avait un point de départ (je n'en ai pas décelé) ou un but (je n'ai pas été capable de l'identifier) et entre les deux, un propos.

À partir de là ça ne s'améliore pas. Un autre comédien/danseur se joint aux trois protagonistes, mais on ne sait jamais pourquoi ils sont là. Quelles sont leurs motivations? Qu'est-ce qu'ils essaient de nous communiquer à travers ces dialogues désincarnés qui n'ont pas de sens? Ça m'a rappelé les théories fumeuses de l'École du regard chère au Nouveau Roman et dieu sait que je frémis encore en pensant à ces lectures imposées de Claude Simon ou d'Alain Robbe-Grillet sur lesquelles il fallait trouver quelque chose à dire dans les cours d'université. Tout comme dans Hiver, (pourquoi ce titre d'ailleurs), je n'ai jamais décelé la moindre histoire, le moindre fil conducteur dans ce qui est toujours demeuré, et demeure toujours pour moi, complètement abscons.

Je n'ai jamais entendu parler de l'auteur de cette pièce, Jon Fosse, qui est norvégien et qui a remporté de nombreux prix de dramaturgie. On dit de lui que son écriture minimaliste et répétitive provoque pour le comédien et le spectateur, une sorte de frustration qui excite la curiosité et éveille l'imaginaire. Désolée, ma curiosité n'a jamais été excitée et mon imaginaire est resté tapi bien au chaud dans un recoin éloigné.

Après la représentation, alors que je discutais avec l'ami qui m'y avait accompagné, nous sommes tombés d'accord pour dire qu'il existe dans l'histoire de l'humanité et dans la production théâtrale contemporaine plein de textes pas mal plus intéressants et bien plus faciles d'accès qui viennent chercher le public et parlent à son cœur et à son âme. Ce que j'ai vu au Prospero ce soir-là m'est apparu complètement déconnecté et plutôt que de provoquer quelque chose chez moi, je n'en ai retenu que l'atmosphère mortifère proche du néant qui s'en dégageait.

Soit dit en passant, les comédiens et les danseurs qui s'agitent là-dedans ne sont pas mauvais, loin de là. Mais les émotions qu'ils expriment semblent toutes plaquées et artificielles puisqu'on ne peut deviner ou saisir d'où elles viennent. Même chose pour la mise en scène très physique, violente parfois, entrecoupée d'épisodes stylisés, mais qui, somme toute, et en dépit d'une recherche esthétique, ne fait que souligner la vacuité du texte.

J'ai assisté à un exercice stérile, sans queue ni tête, qui n'a suscité chez moi aucune émotion, aucune réaction sinon un incommensurable ennui. Je suis sortie du théâtre consternée et, vraiment, il me semble que la vie est trop courte pour cela.

Crédit photo : DuoB

Hiver, une production de la Compagnie Rodramexport, est présenté à la salle intime du Prospero jusqu'au 2 novembre 2013

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