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«La face cachée de la lune»: Robert Lepage. Toujours.

Yves Jacques, qui a joué la pièce plus de 300 fois sur à peu près tous les continents, trouve visiblement toujours du plaisir à manier ce texte et à déambuler dans cet étonnant théâtre d'objets.
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La venue de la pièce à Montréal est providentielle pour les gens comme moi, qui n'avait pas encore vu la pièce (j'ai honte) ou pour tous ceux qui veulent la découvrir de nouveau en compagnie de l'incomparable Yves Jacques.
David Leclerc
La venue de la pièce à Montréal est providentielle pour les gens comme moi, qui n'avait pas encore vu la pièce (j'ai honte) ou pour tous ceux qui veulent la découvrir de nouveau en compagnie de l'incomparable Yves Jacques.

On se doute peu de l'impact et de la popularité de La face cachée de la lune, cette pièce de Robert Lepage créée en 1999 qui a fait (et fait encore) le tour du monde avec un succès qui ne se dément pas. Cet arrêt à Montréal au Théâtre Jean-Duceppe est providentiel pour les gens comme moi, qui n'avait pas encore vu la pièce (j'ai honte) ou pour tous ceux qui veulent la découvrir de nouveau en compagnie de l'incomparable Yves Jacques.

Deux frères qui ne s'entendent ni ne se comprennent, la mort de la mère et un poisson rouge en héritage, la conquête de l'espace en compagnie de cosmonautes soviétiques, des explications données à un barman ignare et la planche à repasser la plus intelligente de l'univers.

Ce sont quelques-uns des éléments qui forgent ce récit d'où ressort l'émerveillement face aux réalisations humaines, mais aussi la solitude qui caractérise le monde brutal dans lequel nous vivons.

La lune et sa face cachée, symbole peut-être de tout ce non-dit qui plombe nos existences, est ainsi investie d'une mission. Astre longtemps inaccessible et apanage des rêveurs, elle conserve des secrets que nous voudrions séduisants.

Robert Lepage nous raconte des histoires à travers l'Histoire. Lorsque la réalité est discutable, il est du ressort du fantasque de nous apporter des certitudes et c'est le rôle que remplit la technologie dans ce théâtre. Bien sûr qu'il y a vingt ans, les moyens et les avancées n'étaient pas ceux que nous connaissons maintenant, mais le miracle réside dans le fait que cette technologie (révolutionnaire pour l'époque) humanise encore davantage le propos puisqu'elle se fait complice des émotions et découvertes semées tout au long du récit.

Il faut voir cette magie dont sont investis ces objets de tous les jours, leur découvrant une vocation remplie de surprises et d'humour.

Que ce soit le hublot aux multiples fonctions ou cette fameuse planche à repasser (qui m'a laissé une impression indélébile), la pièce nous fait voir autrement, bousculant notre perception des choses et étendant le registre des possibles, nous laissant médusés devant le mystère de ce qui est pourtant familier.

Yves Jacques, qui a joué la pièce plus de 300 fois sur à peu près tous les continents, trouve visiblement toujours du plaisir à manier ce texte et à déambuler dans cet étonnant théâtre d'objets. Il continue de confirmer quel admirable et grand comédien il est, charmeur de serpent, charismatique orateur, ambassadeur de cette contrée qui est la nôtre, mais qui semble parfois bien lointaine. La musique de Laurie Anderson nous enveloppe et devient une présence de même que la mise en scène fluide qui ne se fait jamais sentir.

C'est une leçon d'âme que nous propose Robert Lepage: à partir de l'infiniment petit, de l'individu, il nous fait accéder au cosmos et à l'universel, il nous fait franchir la clôture de nos pensées et sortir de nos évidences et appréhender le vertige d'un univers différent. On quitte le théâtre avec nostalgie parce que l'on sait que l'on vient de quitter un monde.

La face cachée de la lune: Une production de Ex Machina, au Théâtre Jean-Duceppe jusqu'au 11 mai 2019.

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