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«La convivialité»: aaaah... l'orthographe!

C'est à une heure absolument charmante, diversifiée, pédagogique et extrêmement divertissante que nous convient Arnaud Hoedt et Jérôme Piron.
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Jusqu'au 17ème siècle, tout le monde écrivait n'importe comment, y compris Rabelais et Montaigne, l'orthographe étant un concept fluide avant que Richelieu ne fonde l'Académie française.
Véronique Vercheval
Jusqu'au 17ème siècle, tout le monde écrivait n'importe comment, y compris Rabelais et Montaigne, l'orthographe étant un concept fluide avant que Richelieu ne fonde l'Académie française.

C'est avec une adorable bonhomie qu'Arnaud Hoedt et Jérôme Piron nous parlent, sur la scène dépouillée de la salle Fred-Barry du Théâtre Denise-Pelletier, de cette inexistante convivialité dans notre expérience avec l'orthographe de la langue française.

Les deux lurons belges sont des professeurs découverts par hasard par Claude Poissant à Avignon, qui a eu l'idée géniale de les inviter à venir faire ce spectacle/conférence chez nous. Parce que la francophonie n'est pas un vain mot et que nous avons tous, tant que nous sommes, des problèmes, des doutes et des interrogations lorsque nous écrivons.

Jusqu'au 17e siècle, tout le monde écrivait n'importe comment, y compris Rabelais et Montaigne, l'orthographe étant un concept fluide avant que Richelieu ne fonde l'Académie française.

Arnaud et Jérôme nous entretiennent des bizarreries de cette langue: par exemple, que le son «S» peut s'écrire de 12 manières différentes, que les consonnes «J», «K» et «V» sont les seules qui sont toujours prononcées alors que toutes les autres peuvent être muettes, comme dans tabac, profond ou monsieur.

Que jusqu'au 17 siècle, tout le monde écrivait n'importe comment, y compris Rabelais et Montaigne, l'orthographe étant un concept fluide avant que Richelieu ne fonde l'Académie française chargée de fixer la norme. Et qu'avant cette époque, il faut peut-être blâmer les moines copistes dans leurs monastères, recopiant les manuscrits à la lueur de la chandelle, établissant sans même s'en rendre compte des règles qui nous accompagneront dans les siècles qui suivront parce qu'ils désiraient aller plus vite et se débarrasser d'un pensum harassant et ennuyeux.

Il y a aussi l'étymologie des mots: nous écrivons «Philosophie», mot issu du grec ancien, et nous pouvons le décortiquer en «Philo», l'amour de, et «Sophia», la sagesse. Mais les Italiens écrivent «filosofia» et ne s'en portent pas plus mal. Il y a aussi tous ces homophones qui rendent fous la plupart des gens: sang, sans, cent... mes préférés étant ver, vers, vert, verre et vair. Oh boy!

L'orthographe se place parfois dans des stratosphères d'inanité, précipitant dans le désespoir les enfants d'école incapables de se rappeler des règles innombrables et des exceptions absurdes qui scandent son utilisation. J'ai sorti mon Grevisse, il est devant moi, il y a 14 pages sur les participes passés et leurs exceptions. C'est à devenir fou. Mais écrire sans fautes est toujours lié au sens de l'effort, au dépassement de soi et également à une certaine reconnaissance sociale accolée à un statut socio-économique. Nos deux Belges sympathiques ne nient pas le fait qu'il faut une norme, mais laquelle? À l'heure actuelle, les règles d'orthographe sont les mêmes qu'il y a 150 ans et sont la cause d'une insécurité linguistique que nous connaissons tous.

Tout cela est livré de manière vive et spirituelle, avec l'apport de Gaspard Samyn à la régie, qui projette sur le tableau en fond de scène des exemples ou des commentaires remplis d'humour. Le public est aussi appelé à participer avec une dictée (oui, oui) au début de la représentation. Il est aussi invité à donner son opinion sur certains mots orthographiés plus simplement.

C'est à une heure absolument charmante, diversifiée, pédagogique et extrêmement divertissante que nous convient Arnaud Hoedt et Jérôme Piron. Pour ma part, je dois dire que j'aimerai toujours nénuphar, clef et pharamineux et que je ne souhaite pas changer mon rapport avec l'orthographe française, aussi bizarre puisse-t-elle être parfois.

Mais La convivialité a ouvert une porte et m'a appris et fait prendre conscience de plein de choses, des crevasses, des fractures, des incongruités existant dans ce rapport très émotif que nous entretenons avec notre langue et son orthographe, capricieuse, maniaque, délicieuse aussi, ce ciment de la nation indéniablement lié à notre identité.

La convivialité: Une Production Chantal et Bernadette, au Théâtre Denise-Pelletier jusqu'au 10 novembre 2018, supplémentaire dimanche 4 novembre à 15h.

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