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«Art»: trois excellents comédiens, une pièce ordinaire

Le texte se résume à des discussions verbeuses, oiseuses et répétitives et, franchement, est d'un intérêt très relatif.
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Benoît Brière, Martin Drainville et Luc Guérin évoluent avec aisance dans cet univers, mais disons qu'il n'y a aucun défi à relever pour eux avec ce texte somme toute lisse et sans surprise qui se résume en des chicanes de cour d'école.
François Laplante Delagrave
Benoît Brière, Martin Drainville et Luc Guérin évoluent avec aisance dans cet univers, mais disons qu'il n'y a aucun défi à relever pour eux avec ce texte somme toute lisse et sans surprise qui se résume en des chicanes de cour d'école.

J'avais beaucoup aimé Le Dieu du carnage de Yasmina Reza, vu il y a quelques années au TNM. Je ne peux pas en dire autant de Art, présenté au Rideau Vert. Ç'aurait pu être une exploration de l'amitié masculine à travers un discours sur l'art contemporain, une tentative de débusquer les secrets de ce qu'on ressent et pas nécessairement de ce qu'on voit, de l'abstraction et de l'attraction inexplicables que peut exercer sur nous un tableau ou une personne. Mais ce n'est pas ça.

Dans un décor dépouillé et géométrique, l'appartement de Serge, nous rencontrons ce dernier et ses deux meilleurs amis, Marc et Yvan. Serge, un amateur d'art, vient d'acheter un tableau du peintre Andriose (je pense bien que ça s'écrit comme ça), une toile de deux mètres sur trois, toute blanche qui lui a coûté 100 000$. Stupeur et tremblements s'ensuivent.

Marc (Martin Drainville) ne comprend absolument pas les motivations de Serge (Benoît Brière) et ne tolère pas que son ami ait acheté cette chose. Il va lui servir un discours très dur où vont entrer des considérations personnelles et les amener tous deux au bord de la fracture. Yvan (Luc Guérin), le troisième larron de cette histoire, va tenter de temporiser et de jouer le jeu de la diplomatie au sein de ce conflit qui prend des proportions démesurées.

Ah, oui! Et Yvan se marie, très bientôt, semble-t-il. Il arrive en retard à une rencontre des trois amis et pique une crise au sujet des cartons d'invitation sur lesquels les belles-mères tiennent à avoir leurs noms. Quand on se marie, ce n'est pas l'une des premières choses dont on s'occupe, les cartons d'invitation? Et pas un jour ou une semaine avant la cérémonie? Et, vraiment, je crois sincèrement que ce genre de préoccupations n'effleurerait jamais l'esprit d'un futur marié. Les hommes ont très peu tendance à se transformer en Bridzella, c'est l'apanage des femmes, ça.

Le texte, composé des échanges entre les trois personnages, en duo ou en trio, se résume à des discussions verbeuses, oiseuses et répétitives et, franchement, est d'un intérêt très relatif.

Ces trois hommes sont désespérément ordinaires, ils n'ont pas de passion (surtout pas à propos de l'art contemporain). On fait allusion à Sénèque dans la pièce, qu'il faut lire absolument, un classique, et je me disais que c'est moi qui allais avoir besoin de Sénèque après la représentation.

La pièce française a été adaptée et il y a un problème avec les niveaux de langage qui oscillent entre le très familier québécois et des envolées caractérisées par une langue et un vocabulaire très recherchés, sinon précieux. De c'est d'la marde à la vibration du monochrome, le changement de registre m'a semblé bizarre et peu vraisemblable.

Évidemment que les trois comédiens, dont on sent la connivence, s'amusent à jouer ces rôles. Benoît Brière, Martin Drainville et Luc Guérin évoluent avec aisance dans cet univers, mais disons qu'il n'y a aucun défi à relever pour eux avec ce texte somme toute lisse et sans surprise qui se résume en des chicanes de cour d'école chez trois hommes d'âge mûr ergotant sur des détails insignifiants. La mise en scène de Marie-France Lambert ne fait pas non plus preuve d'une grande originalité: plutôt statique, manquant de rythme et misant sur les échanges entre les personnages.

Les dernières minutes de la pièce rachètent un peu ce qui a précédé. C'est à ce moment-là qu'on sent l'âme et l'essence de ce qui aurait pu être. Mais auparavant, les trois personnages auront été à l'image du tableau: uniformes et drabes. Et je n'ai pas cru une minute à cette désintégration d'une longue amitié à cause de l'achat d'une toile toute blanche.

Art: au Rideau Vert jusqu'au 2 mars 2019, avec des supplémentaires les 20, 23 et 27 février.

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