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Ma réponse à la violence menée au nom d'Allah

Mon combat personnel depuis des années est d'affirmer que l'islam a plus que jamais besoin de se redéfinir sur des bases concrètes et modernes, de refaire son point de vue sur l'individu, et d'accepter qu'il n'est pas mauvais en soi. Je prêche pour l'émergence d'un sujet responsable, qui doit assumer sa modernité, sans référer au passé ou à l'extérieur ou à une cause déclenchante qui ne lui appartient pas.
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L'état lamentable dans lequel se trouve le droit personnel dans les régions sous la coupe des fondamentalistes et des ignorants au sens large est en soi un motif d'exaspération, d'étonnement et de tristesse. D'autant que le paradoxe est terrible, puisque c'est grâce au Coran et à la civilisation de l'islam que nous avons obtenu une interprétation de ce texte par les théologiens des Lumières. Dès le Moyen-âge, le travail d'Al Ghazali laisse penser qu'il y avait un potentiel spectaculaire de tolérance et de respect du partenaire dans la religion musulmane. Me fondant sur ce patrimoine fabuleux, je dis aujourd'hui que nous sommes en train de détruire, massacrer, annihiler, méconnaître toute cette civilisation. Telle est ma réponse à ces fondamentalistes sans foi ni loi, qui osent se réclamer de l'islam.

L'exemple le plus flagrant de l'ouverture de cette religion, je le cite dans mon dernier livre, L'Érotisme arabe : il s'agit de la part à 100 % équitable et respectueuse de la dualité amoureuse, qui fait qu'une femme dans l'intimité amoureuse est une part absolument entière et égale à celle de l'homme. Ainsi, cette égalité totale et absolue dans l'intimité est prescrite par le Coran et l'islam. Cet exemple montre que l'islam est capable de porter du respect. On ne voit pas la transposition de cette prescription à l'extérieur du champ de l'intime. En effet, la capacité à porter une parole individuelle autonome est inscrite dans les textes et piétinée dans les faits.

Mon travail sur l'érotisme et la sensualité du corps vient contrecarrer l'optique obscurantiste, qui gomme tout désir de liberté et de lumière.

L'islamisme n'est pas le seul phénomène qui salit l'islam. L'un des premiers signes de malversation à l'égard des textes sacrés est d'extraire un verset coranique de son contexte lexical immédiat. C'est une malhonnêteté à l'égard de ce beau texte. Et c'est ce qui est souvent fait à la fois par les extrémistes, mais également par ceux qui veulent critiquer l'islam sans le connaître. Ainsi, priver un verset coranique de son contexte revient à volontairement et sciemment dire le contraire de ce qu'il dit. Les gens à l'extérieur de l'islam manipulent parfois des concepts qu'ils ne maîtrisent pas et les détournent sciemment. Et ceux qui sont à l'intérieur de cette religion et qui s'inspirent d'interprétations contraires à l'islam des lumières se trompent. Ils sont parfois de bonne foi, mais ils se trompent tout de même, car il est inclus dans le texte qu'une démarche compréhensive est nécessaire à toute personne qui approche le Coran.

Comment alors faire comprendre à tous que l'islam est une religion de paix? Peut-être en ouvrant son esprit et son cœur, en ne considérant pas que ce que nous savons est définitif, en écoutant les autres, en comprenant les anciens.

Le vrai procès qu'on fait à l'islam, c'est de faire croire qu'il manque de connaissance et de savoir, qu'il empêche d'ouvrir son cœur à la modernité, de ne pas être assez souple et subtil, de ne pas accepter la diversité de l'être humain.

Mon combat personnel depuis des années est d'affirmer que l'islam a plus que jamais besoin de se redéfinir sur des bases concrètes et modernes, de refaire son point de vue sur l'individu, et d'accepter qu'il n'est pas mauvais en soi. Je prêche pour l'émergence d'un sujet responsable, qui doit assumer sa modernité, sans référer au passé ou à l'extérieur ou à une cause déclenchante qui ne lui appartient pas.

Aujourd'hui, ce qui prévaut dans la religion musulmane - comme dans d'autres - c'est de dire que l'individu seul ne vaut rien, alors même qu'il faut envisager l'individu comme le moteur de la nation. Cette révolution copernicienne que j'essaie d'introduire est la possibilité de réévaluer la place de l'individu, par rapport à des concepts qui relèvent de la tradition.

L'équipe des contributions extérieures recommande la lecture du dernier livre de Malek Chebel, L'Érotisme arabe, qui est une somme de 14 siècles de savoirs et de culture, autour du corps et de la sexualité.

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