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Ville sanctuaire ou le retour de la religion en ville

Le maire Coderre qui milite pour interdire les référendums municipaux, ne devrait-il pas demander à ses citoyens, par référendum, ce qu'ils pensent de cette idée de ville sanctuaire ?
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Le maire Coderre vient d'avoir une autre bonne idée, après avoir voulu bannir sans avertissement, les calèches du Vieux-Montréal, justifier le rejet des égouts de la ville directement dans le fleuve, demander que les enfants de réfugiés syriens soient exemptés des cours de français obligatoires et puissent fréquenter l'école anglaise, exiger de Québec que les référendums populaires, donc trop démocratiques soient bannis, il récidive avec son idée de «Ville sanctuaire».

Plusieurs groupes dans notre société québécoise moderne regrettent que la religion perde de plus en plus d'importance, que le peuple se réveille devient moderne, délaisse ses mythes qui ont toujours justifié son exploitation et sa domination. Ces groupes, comme le Lobby idéologique des Droits de la Personne et de la Jeunesse, la Fédération des femmes du Québec, Québec-Solidaire avec sa loi anti islamophobie, etc. veulent ramener la religion par le biais des vêtements religieux que l'état ne veut pas interdire. Ils ne sont appuyés par nul autre que les premiers ministres Trudeau et Couillard, le grand philosophe catholique Charles Taylor, plusieurs professeurs des départements de philosophie des universités catholiques de Montréal et de Laval.

Vouloir une «ville sanctuaire» c'est vouloir sacraliser un espace.

Vouloir une «ville sanctuaire» c'est vouloir sacraliser un espace. Mircea Eliade, le grand spécialiste de l'histoire des religions, a expliqué cette volonté dans son livre Le sacré et le profane. Toutes les sociétés possèdent des lieux profanes, utiles à tous pour vivre et travailler, et des temps et lieux sacrés, pour commémorer les grands passages de la vie, comme l'arrivée d'un nouveau-né, le mariage, le grand départ, les événements importants de l'année à l'occasion du solstice ou de l'équinoxe, les parcs, grands monuments et édifices érigés par nos ancêtres, etc.

En voulant faire de la ville de Montréal, une ville sanctuaire, où ne s'appliqueraient pas les lois sur les immigrants illégaux et les sans-papiers, que la police municipale ne pourrait arrêter, ce qui dans les faits représente une suppression des lois communes, en leur fournissant des logements sociaux, que des vieux Montréalais attendent souvent depuis des années, en les acceptant dans nos hôpitaux gratuitement, après un certain délai et en leur fournissant des services sociaux, etc. le maire Coderre ne risque-t-il pas de déplaire à plusieurs ?

Paradoxalement, en bon fédéraliste multiculturaliste inclusif, le maire Coderre risque de stigmatiser les Québécois des régions, qu'une telle nouveauté dérange. Prétendre que Montréal est plus ouverte aux immigrants, c'est un peu comme dire que le reste du Québec ne l'est pas, alors que tous les spécialistes militent pour que les nouveaux arrivants s'installent en région. Le signal donné est très négatif.

En déclarant sanctuaire une ville, Montréal reprend une vieille tradition occidentale qui présentait les églises comme des lieux où les exclus pouvaient se réfugier. Ces lieux saints possédaient un statut juridique spécial, qui les plaçait hors d'atteinte des policiers ou des soldats. En Europe au Moyen-âge, des gens se réfugiaient dans une église et le fait d'offrir ce service était considéré comme sacré. Tout établissement religieux pouvait accueillir temporairement des voyageurs de passage qui voulaient se cacher.

Cette façon de faire antique se retrouve partout dans le monde de nos jours. Au Canada, de nombreuses églises catholiques et protestantes ont servi de refuge à des personnes menacées d'extradition. Plusieurs illégaux peuvent les habiter pendant que leur cause est plaidée en cour.

Bien que les églises soient ouvertes à tous les demandeurs d'asile, indépendamment de leur religion, nous n'avons pas d'exemple d'une synagogue, une mosquée ou un temple bouddhiste, hindouiste ou sikhs, qui a déclaré son lieu de culte comme étant un sanctuaire.

Cette pratique ancienne peut avoir du sens dans une société dominée par l'église comme ce fut le cas au Moyen-âge, mais dans une société moderne qui reconnait la séparation des pouvoirs entre l'état et l'église, qui met de l'avant la laïcité, on peut s'interroger sur la pertinence de ces lieux resacralisés.

La création d'une ville sanctuaire semble être une tentative pour ramener la religion par la porte d'en arrière. Avons-nous besoin, dans notre société plus qu'ouverte aux immigrants, de cette nouveauté, qui pourrait permettre, entre autres, à certains de se cacher des forces de l'ordre ?

Paradoxalement, le maire Coderre qui milite pour interdire les référendums municipaux, ne devrait-il pas demander à ses citoyens, par référendum, ce qu'ils pensent de cette idée de ville sanctuaire ?

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