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Investiture d'Obama: à quoi bon toute cette fanfare?

À quoi bon toute cette fanfare, toute cette agitation à Washington? Les événements méritent-ils vraiment que les yeux et les caméras du monde entier soient une fois de plus rivés sur la capitale américaine? Tout juste quatre ans après l'intronisation historique de Barack Obama, le 20 janvier 2009, quel est l'intérêt de tout recommencer avec une nouvelle mise en scène aussi grandiose que coûteuse
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AFP

À quoi bon toute cette fanfare, toute cette agitation à Washington? Les événements méritent-ils vraiment que les yeux et les caméras du monde entier soient une fois de plus rivés sur la capitale américaine? Tout juste quatre ans après l'intronisation historique de Barack Obama, le 20 janvier 2009, quel est l'intérêt de tout recommencer avec une nouvelle mise en scène aussi grandiose que coûteuse? Après tout, Obama est déjà président. Nous n'assistons pas à une passation de pouvoirs, ni à une transition. Tous les acteurs sur la scène sont les mêmes qu'il y a quatre ans: Barack, Michelle Obama et leurs deux filles; Joe et Jill Biden et leurs enfants; John Roberts, le Chief Justice de la Cour Suprême. Au fond, la seule nouvelle venue est Sonia Sotomayor, chargée de la prestation de serment de Joe Biden, car elle ne siège à la Cour Suprême que depuis août 2009.

Un observateur plus cynique pourrait effectivement se dire que toutes ces célébrations sont futiles. Eh bien, non. Pas du tout. La seconde inauguration, comme la première, est un aspect vital de la présidence. Elle dynamise la nation et donne le coup d'envoi d'un nouveau mandat.

En premier lieu, sa valeur symbolique est considérable. Même si cette année les festivités sont moins élaborées que celles d'il y a quatre ans -moins de monde sur le National Mall, moins de bals et de fêtes à travers la capitale, et moins d'empressement populaire pour y assister- la nation s'arrêtera l'espace d'un jour pour regarder et écouter son chef d'Etat. D'ailleurs, il convient de mentionner qu'il est inscrit dans la loi que le président doit prêter serment le 20 janvier suivant son élection, à midi pile. C'est donc ce que Barack Obama a fait, en tout petit comité, sans le Salon Bleu de l'Aile Est de la Maison Blanche. Car la coutume veut que quand le 20 janvier tombe un dimanche, les célébrations publiques soient décalées d'un jour. Obama et Biden auront donc chacun prêté serment deux fois: en privé le 20 janvier et en public le lendemain. Coïncidence supplémentaire, cette année le 21 janvier on célèbre également Martin Luther King Day.

Au delà de la symbolique rituelle, cette seconde inauguration marque un vrai tournant. C'est le début d'un nouveau mandat, avec de nouvelles priorités. Barack Obama se trouve exactement à la moitié de sa présidence. Il est conscient du fait qu'il lui reste quatre ans, ou un peu moins, pour accomplir ce qu'il veut accomplir.

Cette opportunité d'appuyer sur reset, de remettre en quelques sortes les compteurs à zéro est l'équivalent de ce que font tant de personnes de manière quasi-automatique à l'aube d'une nouvelle année, en s'armant de nouvelles résolutions -arrêter de fumer, faire du sport et ainsi de suite. Sauf qu'Obama, lui, devra s'y tenir.

En prenant la tribune devant le Capitole, Barack Obama parlera au monde entier de ses nouvelles résolutions et donnera le ton pour les quatre années à venir. Il énoncera sa vision et ses priorités. Et il esquissera sa place dans l'Histoire.

Il réservera probablement les détails précis et programmatiques pour son discours sur l'Etat de l'Union, prévu pour le 12 février, et se contentera de donner le ton. Un ton que l'on imagine et que l'on désire plus fort, plus résolu encore que celui qu'on connaît. Il en a déjà donné quelques indices et nous pouvons d'ores et déjà nous attendre à une présidence active et entreprenante.

Le message qu'émet Obama en filigrane est qu'il a du pain sur la planche et qu'il ne se laissera pas faire par des Républicains obstructionnistes. Il l'a montré au moment des négociations de dernière minute sur le fiscal cliff, refusant de lâcher prise et forçant les Républicains à un compromis. Ces derniers y ont perdu quelques plumes, notamment John Boehner, le chef de la majorité républicaine dans la Chambre des Représentants. Obama n'en est pas pour autant au bout de ses peines en ce qui concerne les questions budgétaires et leur impact sur la croissance. Sur ces sujets, au moins les trois mois à venir seront un parcours d'obstacles.

L'expérience qu'il a acquise lors de son premier mandat lui permet d'adopter un ton plus vigoureux et d'affûter sa stratégie à l'égard du Congrès. Quand il demandera aux leaders Républicains de jouer le jeu, ceux-ci vont devoir obtempérer, ou risquer d'en souffrir dans les urnes en 2014 (élections législatives) et 2016. Le message est clair: coopérez ou c'est vous qui en paierez le prix.

De même sur la réglementation du port d'armes à feu. Ce sujet, si complexe et controversé dans la psyché américaine, a été propulsé sur le devant de la scène par la tragédie de Newtown, juste avant Noël. C'est généralement un thème que les personnalités politiques américaines évitent autant que possible tant il met en jeu de questions constitutionnelles et, surtout, passionnelles. Mais Barack Obama et Joe Biden ont choisi de prendre le taureau par les cornes et sont déterminés à mettre en place de vraies régulations.

Les chantiers ne manquent pas. L'assurance médicale, succès de son premier mandat, restera elle aussi une priorité. Une des ironies de cette inauguration est qu'il y a quatre ans, John Roberts, le Républicain nommé par George W. Bush à la Cour Suprême, avait bafouillé les paroles du serment de Barack Obama -au point qu'ils ont dû répéter la cérémonie en privé juste après, afin que personne ne puisse remettre en question la légitimité de son intronisation. La relation entre ces deux hommes n'avait donc pas démarré sans stress. Puis, coup de théâtre, trois ans plus tard, c'est John Roberts qui, en tant que chef de la Cour Suprême, tranchera en faveur de la réforme sur la santé voulue par Obama.

Maintenant qu'il est réélu, et sachant qu'il n'aura plus jamais à faire campagne, Barack Obama peut agir plus délibérément, sur toutes sortes de sujets, allant de l'éducation et de l'immigration aux sujets brûlants de politique étrangère. Mais seulement si le monde et le cours des choses ne lui assènent pas trop de drames et d'imprévus.

Le défi pour le 44e Président des Etats-Unis, en prenant la parole sur les marches du Capitole, sera de dépasser le thème un peu usé du "bipartisanship, de regarder au-delà de Washington, et d'appeler l'Amérique entière à l'union nationale.

Et on espère qu'il pensera à prendre une toute petite pause, indiscernable pour le public, une seconde rien que pour lui, pour profiter du moment. Car ce 21 janvier est probablement le plus beau jour de sa vie. Son premier mandat est derrière lui, il a gagné sa dernière élection et il a maintenant quatre ans devant lui pour changer le cours de l'Histoire.

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